Chapitre 14 - May

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May

Pourquoi est-ce que je pense autant à lui ? Enfin je veux dire, j'ai déjà eu des crushs, comme tout le monde. Mais James hante mon esprit.

Je dois dérailler. Le stage, le boulot au bar, la fatigue qui s'accumule... Tout ça me fait perdre la tête, c'est la seule explication. Il est devenu sympa, et je n'arrive même pas à lui en vouloir de m'avoir ignoré ces deux dernières semaines.

Idiote ! 

Ou peut-être que je suis en manque ? Oui, ça doit être ça. Mon précédent rapport sexuel remonte à quoi ? Deux mois ? Peut-être plus... Avec un apollon pareil dans le secteur, difficile de penser à autre chose. Mes hormones jouent des airs de salsa quand il est dans les parages et la mélodie me reste dans la tête continuellement. C'est ça.

Soulagée d'avoir trouvé une explication, je me redresse dans mon lit. Le jour m'éblouit, je n'ai toujours pas installé de rideau à cette satanée fenêtre. Il est tôt, je le devine à la position du soleil et à la circulation presque inexistante du dimanche matin.

Il faut que je me vide la tête. Que je fasse abstraction de James et ses bras épais comme mes cuisses au risque de faire une bêtise. Encore dans mon lit, je farfouille dans ma valise installée à même le sol pour trouver mon legging de sport et une brassière. Je me contorsionne pour m'habiller sans taper dans les murs, puis attrape mes baskets et me glisse silencieusement dans la cuisine en rassemblant mes cheveux en une queue de cheval.

— Salut.

Je sursaute et laisse tomber l'élastique que j'avais coincé entre mes dents sur le sol. James est appuyé contre un plan de travail, un verre de jus de fruits entre les mains.

Est-ce que j'ai des problèmes cardiaques ? Mon cœur a loupé un battement quand j'ai posé mes yeux sur le visage de mon colocataire. Il faudra que je pense à faire contrôler ça par la médecin avec qui je bosse à Medtech. Elle va me prendre pour une tarée, mais tant pis. Je me baisse pour ramasser mon chouchou, et surprends son regard sur mon décolleté lorsque je me redresse. Il se détourne et se cache derrière sa boisson en avalant une gorgée.

— Salut, lui réponds-je enfin en attrapant un verre dans le placard. Déjà debout ?

— Ouais, je vais aller courir.

L'eau qui coule du robinet dans mon verre déborde et je jure en saisissant un torchon.

— Cool.

— Cool.

Un silence s'installe, et nous restons tous les deux à descendre nos boissons respectives en nous lançant de temps en temps des regards gênés.

— Tu veux qu'on y aille ensemble ? Je ne connais pas trop les parcs dans le coin, hormis celui de l'angle de la rue. Je ne serais pas contre sortir avec un guide.

Mais où se sont donc enfuies mes bonnes résolutions ? À coup sûr, elles se sont fait la malle quand il a levé son bras pour boire, faisant glisser par la même occasion son t-shirt pour découvrir son biceps.

— Ouais, c'est une bonne idée. Mais est-ce que tu es sûr de pouvoir me suivre ? raille-t-il en m'adressant un sourire moqueur.

— Méfie-toi, Alex me compare souvent à un chien de traîneau. Je suis increvable sur la distance.

— J'attends de voir ça, me répond-il en attrapant ses clés.

Je rejoins l'entrée et enfile mes chaussures sur les marches, pendant que James verrouille la porte. Il passe devant, et me fait signe de le suivre. Les rues de South End sont encore désertes, et l'air sent l'humidité et les œufs brouillés. Les teintes orangées des arbres contrastent avec le ciel couvert, et la brise fait tournoyer les feuilles. Il fait frais, mais le vent est doux. Le temps parfait pour la course à pied.

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