VITO
– Non mais je rêve, je ne suis parti que deux jours et maintenant tu arrives à me battre. Tu t'es entraîné jour et nuit pendant mon absence ?
– Négatif, j'ai toujours été meilleur que toi. J'ai juste décidé de ne plus te laisser gagner.
Alessio récupère ma queue de billard posée sur la table. Il la range, ainsi que la sienne, dans le grand pot prévu à cet effet tandis que je me dirige vers le bar pour nous servir un verre de scotch.
– Mais oui bien sûr. Tu n'es absolument pas du genre à laisser gagner ton adversaire, me contredit-il sur le ton de l'humour.
Il a raison. Je lui réponds d'un léger sourire.
– Il est vrai que je ne t'ai jamais laissé gagner. De toute façon, dans ta vie, tu as passé plus de temps autour d'un billard que dans des chiottes, donc compliqué de te battre.
– Hum... Impossible de me battre tu veux dire.
– Impossible ne fait pas partie de mon vocabulaire, affirmé-je. Si un adversaire a un coup d'avance, tu attends un moment de faiblesse pour attaquer et tu fonces.
– Après un séjour intense en Italie, il est clair que je ne suis pas en totale possession de mes capacités. Je suis crevé, souffle-t-il en s'affalant dans l'immense canapé d'angle en cuir noir du salon.
Alessio est rentré à la maison cet après-midi après deux jours de mission. Je ne cache pas mon soulagement de le retrouver sans aucune égratignure. Mon père l'a envoyé en Italie pour superviser la livraison d'armes faite à Enrico Mavalas, le mafieux le plus reconnu et respecté d'Italie, et aussi le plus dangereux.
Enrico n'hésiterait pas à perforer le crâne de celui ou celle qui l'a mal regardé. Avec sa cicatrice sur la partie gauche de son visage et son doigt en moins, les Italiens qui font affaires avec lui le craignent.
Quant à nous, on se méfie. Même s'il nous sollicite pour être fourni en armes depuis plusieurs années et qu'il n'y a jamais eu de conflits avec lui, on ne sait jamais ce qu'il peut se passer dans la tête de ce fou. Qu'il ne touche pas à un seul cheveu d'Alessio, sinon c'est moi qui vais lui trouer la cervelle.
La mission principale d'Alessio dans notre gang est de gérer les exportations d'armes en Italie. Originaire de ce pays, son nom de famille, Bernât, est connu grâce à son oncle décédé il y a dix ans. Ce dernier a été, et il reste encore aujourd'hui, le trafiquant italien le plus connu du pays. À ce jour, on parle encore de son meurtre qui a été d'une violence inouïe. Je ne veux même pas imaginer la douleur que l'on ressent quand on se fait arracher les yeux de leur orbite.
Je tends à Alessio son verre et m'installe à ses côtés, dans le canapé.
– Je remarque que tu n'as pas touché à la bouteille de scotch en mon absence, dit-il en prenant une gorgée de sa boisson.
– J'ai eu beaucoup de rendez-vous ces deux derniers jours avec mon père et les marocains pour les HK 416 qui arriveront la semaine prochaine. Je n'ai pas eu une minute à moi.
Mon père est à la tête de notre gang et m'a attribué le titre de bras droit lorsque j'ai soufflé ma dix-huitième bougie. Il m'a préparé à entrer dans ce monde en m'apprenant les vices, les stratégies de manipulations, à tirer avec une arme et à me battre pour être prêt à ma majorité. La confiance qu'il m'a accordée en me donnant ce titre m'a rendu fier. Depuis, nous assistons en binôme à chaque réunion. À deux, on est plus forts.
– Et puis, j'aurai très mal pris que tu fasses notre rituel du soir sans moi, enchaîne Alessio en adoptant une mine boudeuse qui me fait sourire.
– Tu as conscience que faire une partie de billard seul n'est pas possible ?

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Oxygène
RomansaDepuis sa naissance, Louisa subit les violences de son père, un mafieux en quête de pouvoir. Séquestrée dans sa maison située en Andalousie, elle garde espoir de pouvoir réaliser son rêve le plus cher : quitter cette vie misérable. Toutefois, Louis...