Chapitre 11

14 8 25
                                    

Diamond

Je me réveille en sursaut, le cœur battant la chamade. La lumière crue du matin me blesse les yeux, mais ce n'est rien comparé à la douleur qui envahit chaque centimètre de mon corps. Plus de 24 heures sans sérum, et les effets du manque sont encore plus terribles que ce que j'avais imaginé.

Mon corps tremble comme une feuille, et je sens une sueur froide dégouliner le long de ma colonne vertébrale. Mes mains sont moites, et un frisson glacial me parcourt. Chaque mouvement est un effort, chaque respiration une épreuve. Ma peau est hypersensible, chaque frottement de mes vêtements contre elle est un supplice.

Je me redresse difficilement, les vertiges me forçant à m'appuyer contre le mur pour ne pas tomber. La nausée monte en moi, et je lutte pour ne pas vomir. Mes pensées sont floues, embrouillées, et il m'est difficile de me concentrer sur quoi que ce soit. Un brouillard mental épais s'est installé dans ma tête, rendant chaque réflexion laborieuse.

Je prends une grande inspiration et tente de me calmer. Il faut que je tienne bon. Mon père va recevoir la lettre, il va réagir, et tout cela ne sera plus qu'un mauvais souvenir. Mais en attendant, il faut que je trouve un moyen de survivre à cette journée. Dormir? Je me blottis sous les draps. J'ai chaud, j'ai froid. Puis le noir.

Je me réveille encore plus vaseuse aux coups donnés à la porte de la chambre. Quelle heure peut-il être ? La pendule au mur annonce 18 heure ? En l'absence de toute réponse de ma part, Morgan entre dans sa chambre. En me voyant son expression passe de l'indifférence à une pointe de préoccupation.

— Ça ne va pas, hein ? demande-t-il doucement.

Je hoche la tête, incapable de parler sans que ma voix ne tremble.

— Écoute, dit-il après un moment de silence en s'asseyant sur le lit. Je sais que c'est dur, mais tu dois trouver un moyen de t'occuper l'esprit.

J'enfonce ma tête un peu plus dans l'oreiller. Il tire sur le drap révélant mon corps fragile à la lumière de la journée déjà bien passé.

— Laisse-moi tranquille, tout ça, c'est ta faute !

Il ne dit rien, mais je sens toujours sa présence.

— Va-t'en.

Et il obéit.

Je ne sais pas quelle heure il est, la seconde fois que Morgan pénètre dans la chambre. Je sais juste que mon traitre d'estomac se met à gargouiller, me demasquant moi et mon appétit grandissant.

— Sort de sous ces draps Diamond et je te promets un bon repas.

— Du homard ? Je me risque sachant très bien qu'il n'aurait jamais ce genre de met à son menu.

— Non, mais je peux te proposer une pizza, un film et même si tu es sage, je pourrais faire péter du popcorn pour l'occasion ?

Je lève un sourcil, surprise par tant d'attention.

— Qu'est-ce que tu veux regarder ? murmurai-je.

— Pourquoi pas un peu de romance, répond-il avec un sourire. Enfin pour toi ça relève plus de la science-fiction, au moins ça te changera pas tellement des sabres laser et des explosions, si tu vois ce que je veux dire.

Il rigole seul à sa blague, pour ma part, je hausse les épaules en guise de réponse. Pourquoi pas ? Je n'ai rien à perdre, et cela pourrait peut-être m'aider à oublier un peu ma souffrance.
Nous nous installons dans le salon, et Morgan met le film en route. "Le temps d'un automne". Une histoire d'amour apparemment banale.

Morgan s'installe à côté de moi, me tendant un plaid. Je l'accepte avec reconnaissance, m'enroulant dedans pour tenter de calmer mes tremblements. Il est attentif, veillant à mon confort sans être envahissant. Pour la première fois depuis le début de ce cauchemar, je ressens une certaine chaleur humaine.

— Merci, dis-je doucement. Pour le film et pour... tout le reste. Sauf de m'avoir kidnappé bien entendu.

Il hoche la tête, un sourire timide aux lèvres.

— De rien. On est dans le même bateau, après tout. C'est le Titanic ici.
Sauf que lui, il a choisi d'embarquer dans ce bateau. Moi pas. Le film se lance et éclair l'obscurité de la pièce.

Je tourne légèrement la tête pour l'observer, et sans le sérum, c'est comme si je le voyais pour la première fois. Il se tient sagement à l'autre bout du canapé. Morgan est grand, avec des épaules larges et une silhouette athlétique. Ses cheveux bruns tombent en mèches désordonnées sur son front, et ses yeux verts, profonds et perçants, captent la lumière d'une manière fascinante. Il me fait penser à l'acteur du film que nous regardons, une sorte de charme brut et intense.

— Si tu ne pleures pas à la fin de ce film, je te considèrerais définitivement comme sans cœur, je te préviens !

— Tu sais très bien que je ne peux pas être émue par l'amour.

Et pourtant le film m'emporte. Je crois qu'il avait raison, c'est exactement ce dont j'avais besoin : un peu de science-fiction pour me faire quoi ? Rêver ? Espérer ?

Pour la première fois depuis longtemps, ma mère me manque. Ses bras réconfortants, ses mots doux. J'ai toujours pensé que je pouvais tout affronter seule, mais sans le sérum, sans cette barrière émotionnelle, je réalise à quel point j'ai besoin des autres. Je me blottis un peu plus sous le plaid, sentant la chaleur de Morgan à côté de moi. De son corps, mais aussi de son regard.

À l'écran, Jamie explique à Landon :
— 42, apprécier quelqu'un de peu sympathique. C'est une liste de choses à faire et accepter pour évoluer.
— Quoi ? Du style, changer de personnalité ? Se moque Landon.
— Du genre passer un an à faire du bénévolat, faire une découverte médicale...
— Très ambitieux, la coupe-t-il encore.
— Être à deux endroits à la fois, avoir un tatouage.
— C'est quoi le numéro 1 ?
— Je te l'aurais bien dit, mais après, je devrais te tuer.

La pièce rétrécie. Je ne sais pas si c'est lui ou moi, mais nos corps glissent l'un vers l'autre sur ce canapé ridicule. Ma tête me fait terriblement, je ne peux plus retenir les spasmes qui menacent de me faire exploser. Je sens sa main caresser ma joue. Je n'ai pas la force pour une réplique sanglante. Ni la force de le repousser. Au contraire, j'aimerais qu'il me prenne dans ses bras et me dise que tout ira bien. Oublier un instant que tout ça est sa faute.
— Tu pleures ?

J'entends la surprise dans sa voix. Je touche ma joue comme si j'avais besoin de le sentir pour le croire moi-même, alors que je sais pertinemment ce qu'il en est.
Le sérum ne fait plus effet.

Dans un couinement, soudain, je deviens pathétique.

Love DystopieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant