29. Lettre maudite

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Aurora Lombardi


Avez-vous déjà ressentie un vide si intense qu'il vous transperce la boîte crânienne au point de vous faire sombrer dans un trou noir auquel plus rien n'a d'importance à vos yeux ?

C'est exactement ce que je ressens quand le regard de Alice se pose sur moi. Le vide. Il a remplacé cette douceur maternelle qui émanait d'elle. Il n'y a plus que du dégoût et de la colère.

Tout ce que je mérite finalement.

Mon propre appartement est devenue une seule et unique même pièce où les péchés doivent expiés.

Nous sommes chacun éloignés, par peur de nous brûler lorsque certaines vérités vont être dévoilées. Et pourtant nous savons que toutes vérités n'est pas bonne à dire.

Alice est assise, les coudes posés sur mon îlot central. Elle me dévisage comme si je n'étais qu'un fantôme parmi tant d'autre.

Juan, est à ses côtés, sa main caresse tendrement le bras de la jeune blonde au coeur écorché.

Je suis en face d'elle, assise sur mon fauteuil à la couleur corbeau, contrairement au sien mon regard est porté sur le cadre complément détruit de mon père et moi. Je trace à l'aide de mes doigts la ligne fine de verre brisé.

Brisé comme toi.

Alessandro est encore devant la porte, les bras croisés, le regard ferme. Il nous dévisage un par un et dès que nos yeux se connectent, il ne dévie pas le regard, il ne le dévie plus.

Un message passe entre cette connexion aussi fragile que nécessaire. Il m'a tout expliqué, de la relation d'amitié naissante d'Angelo et Alice à l'ambiance plus que morose dans le groupe.

— On va continuer à se regarder dans le blanc des yeux encore longtemps ?

La voix d'Alice interrompre notre échange visuel, Alessandro se racle la gorge avant de s'avancer vers l'îlot centrale, il tire une chaise vers lui dans un crissement désagréable puis s'assoit. Son visage se tourne vers moi et m'indique de la tête la chaise d'à côté.

C'est l'heure de la confrontation.

Je me lève, titubant presque à l'idée d'affronter cette conversation. Je me laisse mollement tomber sur la chaise haute, et rassemble mes cheveux en un chignon désordonné. Ma bouche est sèche, je porte mes doigts à mes lèvres pour y ronger le reste de peau autour de mes ongles.

Je n'ai pas envie d'avoir cette conversation, je n'ai pas envie de briser des liens, je n'ai pas envie de perdre les deux seuls personnes qui m'ont fait confiance.

Et pourtant, je sens la pulpe d'un pouce tracer des lignes imaginaire sur le bas de mon dos, m'apportant un certain réconfort. Il arrive à lire en moi, plus que n'importe qui. Intérieurement, je le remercie.

— J'ai mise en scène ma propre mort pour ne pas que ma mère me retrouve. Malgré ça, elle a quand même réussi par le biais de taupe au sein de la NISA. Nous ne sommes plus en sécurité là-bas. Déclaré-je en soupirant. J'ai dû à travers des missions lui renseigner des informations, effacer des preuves.. pour ne pas qu'elle puisse vous approcher.

— On aurait pu se défendre, tu ne nous fais pas confiance à ce point ?

Le ton brisé de Alice me fait relever la tête, ses yeux sont partiellement mouillés.

— Ce n'est pas une question de confiance. Comme le dit Aurora, sa mère a des sbires au sein de la NISA, l'agence la plus sécurisée d'Hawaï. Tout le monde peut devenir notre ennemi à l'heure actuelle. C'est elle qui est derrière le kidnapping de Safiya, et celui de Aurora. Nous devons faire attention à nos fréquentations. Intervient Alessandro en fixant Juan.

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