Cette période a finalement été la plus compliquée pour moi. Je devais me rendre à l'évidence : il est parti pour toujours. Il y avait un silence en moi, un vide et peu importe ce que je pouvais faire, rien ne le comblait. On se rend compte, après tout ce chaos, de l'absence réelle du défunt. Toutes ces vagues nous maintenaient à la surface, il fallait aller vite, il fallait assurer et maintenant qu'est-ce que je devais faire ? Ma vie n'avait pas de sens en réalité. Il fallait que je trouve des moyens de combler ce manque.
Certaines personnes vont trouver refuge dans la drogue, les jeux d'argent, l'alcool. Moi j'ai trouvé refuge dans la nourriture. Je n'en ai jamais parlé à personne même mon entourage n'est pas au courant de tout ce que je vais vous confier ici. J'ai eu un réel problème avec la bouffe. Alors je ne suis pas devenue anorexique mais je pense avoir fait une forme de boulimie... Je ne faisais que manger.
Je rappelle le contexte : covid donc interdiction de sortir. Je suis H24 seule à l'appartement. Antoine travaille en entreprise où il ne fait quasiment pas de télétravail et moi je continue les cours en visioconférence. Je suis seule et je m'ennuie beaucoup. Je n'ai pas encore l'envie de me remettre complètement au travail, mes pensées sont trop envahies par toute cette douleur.
J'ai commencé à manger en grosses quantités alors que d'habitude j'ai plutôt un petit appétit. J'ai commencé à manger des choses grasses : de la sauce dans les plats, enchaînements des commandes de fast-food. Le plus dur c'est de s'avouer qu'on est en train de tomber dans un truc malsain et il faut s'en sortir mais pour le moment je veux juste manger. Au départ ça ne se voyait pas puis j'ai commencé à dévaliser régulièrement le frigo (sur tout le long de la journée). J'allais faire des courses pratiquement tous les jours pour qu'Antoine ne se rende pas compte de ce que je faisais. Je le cachais à tout le monde mais je me rendais compte de ce que je faisais. Mais impossible de m'arrêter. Manger me faisait du bien et me procurait du réconfort. Puis après j'ai commencé à commander mc do, une fois dans la semaine puis plusieurs fois jusqu'à ce que ce soit tous les jours. Les commandes étaient de plus en plus grosses. Antoine recevait parfois mes mails alors je m'étais fait une autre adresse électronique pour qu'il ne reçoive pas les notifications des commandes passées. Je ne mangeais même plus, je bouffais. Je devais combler ce vide en moi.
J'ai commencé à prendre beaucoup de poids, je mangeais comme un ogre et les crises d'angoisse n'aidaient pas à la perte de poids non plus. J'ai pris presque 20 kilos en l'espace de quelques mois. Malheureusement mon ex n'a rien vu (je ne lui en tiens pas rigueur) mais il a juste vu la prise de poids sans comprendre le vrai fond du problème. Puis les moqueries et les violences verbales ont commencé... Plus de papa, plus de confiance en soi, plus d'estime, plus envie de travailler, je suis seule. Claire est là, elle m'appelle très souvent et me fait sortir régulièrement de ce trou mais pareil je ne lui parle pas de tout ça. Dans le fond, j'ai si honte, je préfère me taire et m'enfermer dans ce nouveau réconfort qu'est la nourriture.
Le plus difficile dans tout ça, c'est que j'étais consciente que je comblais l'absence de mon père par l'alimentation mais je ne m'arrêtais pas. Un jour, je me suis même fait peur, j'étais devenue addict aux fast- food. Si je n'avais pas ma commande de la journée alors j'y pensais jusqu'au lendemain. Lorsque c'était le week- end, Antoine était avec moi tout le temps donc je ne pouvais pas manger, je ne pouvais pas commander et ça c'était le plus dur. J'avais envie qu'il se casse pour bouffer. Alors je passais souvent mes journées sur une série ou à dormir. Le temps passait plus vite comme ça. Au début de notre relation, on sortait beaucoup, on allait à droite à gauche, on faisait des balades, des brocantes, des diners dans nos familles respectives. Après ma prise de poids, je ne voulais plus sortir, je ne voulais plus voir les gens. Je ne supportais plus mon reflet dans le miroir et je ne voulais pas que les gens me voient comme ça. Je ne voulais pas qu'ils se rendent compte de mon secret. La honte. Déjà Antoine me faisait pas mal de réflexions je le supportais par amour mais je ne voulais pas que d'autres le fassent.
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PATUTE, à coeur ouvert
EspiritualFaire le deuil. C'est si complexe et en même temps on le vit tous et toutes. Faire le deuil du décès d'un proche, d'une relation, d'une version de soi-même. C'est au travers de cet ouvrage que je te partage mes doutes, mes questionnements, mes expér...
