Des Doutes sous la Pluie
Le ciel gris de Londres menaçait de pleurer, la pluie suspendue dans l'air lourd. Sherlock et John marchaient côte à côte, le silence entre eux n'étant troublé que par le bruit de leurs pas sur le trottoir mouillé. L'air était frais, presque mordant, mais aucun des deux hommes n'y prêtait vraiment attention. L'esprit de Sherlock tournait à plein régime, passant en revue les événements récents, les conversations, les regards échangés. Il savait que John avait des pensées... des suppositions qu'il trouvait à la fois intrigantes et légèrement exaspérantes.
John, de son côté, tentait d'aborder un sujet délicat sans provoquer une réaction trop défensive de la part de Sherlock. Il connaissait bien son ami, suffisamment pour savoir que le sujet qu'il avait en tête pouvait entraîner une discussion houleuse.
Après quelques minutes de marche en silence, John se décida à rompre la glace.
— Alors, tu comptes me dire ce qui se passe vraiment avec Émilie, ou je dois continuer à deviner ?Sherlock esquissa un sourire en coin sans tourner la tête vers John.
— Je ne vois pas de quoi tu parles.John roula des yeux.
— Oh, ne joue pas à ça avec moi, Sherlock. Tu sais exactement de quoi je parle. Tu as passé la nuit chez elle, tu l'évites depuis et, plus que tout, tu sembles plus... distrait que d'habitude.Sherlock ralentit légèrement le pas, les mains enfoncées dans les poches de son manteau. Il ne répondit pas immédiatement, pesant ses mots.
— Je réfléchissais.John soupira.
— Je sais que tu réfléchis. Tu fais ça tout le temps. Mais à quoi exactement, Sherlock ?Sherlock s'arrêta net, se tournant enfin pour faire face à John. Son regard était dur, mais une certaine confusion transparaissait dans ses yeux bleus perçants.
— Tu penses que je suis amoureux d'Émilie, n'est-ce pas ?John haussa les sourcils, pris par surprise par la franchise soudaine de son ami.
— Et bien... oui, je me suis posé la question. Il se passe quelque chose entre vous, c'est évident. Mais je n'ai jamais dit que tu étais amoureux.Sherlock plissa les yeux, comme s'il analysait chaque mot, chaque intonation.
— C'est ce que tu penses pourtant. Que je pourrais être amoureux.John croisa les bras, prenant un ton plus sérieux.
— Sherlock, ce n'est pas un crime de ressentir quelque chose pour quelqu'un. Tu es humain, même si tu as tendance à l'oublier. Si Émilie te fait ressentir quelque chose...Sherlock leva une main pour l'interrompre, une lueur d'agacement dans les yeux.
— Ressentir. Tu parles de sentiments, John. Des sentiments que je ne sais même pas si je ressens. Tout ce que je sais, c'est qu'elle est intéressante, stimulante. C'est une énigme. Mais est-ce de l'amour ? Je n'en sais rien.John le regarda, un peu déconcerté par l'honnêteté rare de Sherlock sur ce sujet.
— Sherlock... ce n'est pas toujours une question de logique ou d'analyse. Parfois, les choses ne sont pas si simples. Tu peux aimer quelqu'un sans même t'en rendre compte.Sherlock détourna les yeux, fixant un point imaginaire au loin, les traits crispés. Il était évident que cette discussion le mettait mal à l'aise, mais il savait que John avait raison d'en parler.
— Ce que tu dis n'a pas de sens. Si je ne m'en rends pas compte, alors ce n'est pas de l'amour. L'amour est une faiblesse.John secoua la tête, un sourire triste sur les lèvres.
— L'amour n'est pas une faiblesse, Sherlock. Pas toujours. Parfois, c'est ce qui nous rend plus forts, ce qui nous pousse à faire des choses incroyables. Tu ne peux pas toujours tout contrôler.Sherlock se mit à marcher à nouveau, les mains serrées dans ses poches, tentant de contenir l'agitation intérieure qu'il ressentait.
— Je contrôle tout, John. Je dois le faire. Sinon, je deviens vulnérable, et cela ne me mène qu'à la destruction.John le rattrapa en quelques pas, posant une main sur l'épaule de son ami.
— Sherlock, tu ne peux pas vivre ta vie entière en fuyant les émotions, en fuyant les gens. Émilie... elle semble différente, spéciale. Tu ne peux pas simplement l'analyser et la ranger dans une boîte comme une simple énigme à résoudre.Sherlock se tourna brusquement vers John, le regard presque féroce.
— C'est exactement ce que je fais, John. Parce que si je ne le fais pas, je perds mon objectivité.John ne se laissa pas impressionner, soutenant le regard de Sherlock avec une détermination égale.
— Peut-être que perdre un peu d'objectivité de temps en temps n'est pas la fin du monde. Peut-être que ce que tu vois comme une faiblesse pourrait être une force, quelque chose qui te rendrait plus humain.Sherlock resta silencieux, son esprit tournant à toute vitesse. Il savait que John avait raison, d'une certaine manière, mais admettre cela signifiait admettre sa propre vulnérabilité, ce qui était inacceptable pour lui. Et pourtant... l'idée d'Émilie, cette femme fascinante et énigmatique, persistait, s'insinuant dans ses pensées comme une énigme qu'il ne pouvait pas résoudre par de simples déductions logiques.
Après un moment, il soupira, laissant retomber ses épaules.
— Peut-être.John sourit, satisfait de cette petite victoire.
— Tu vois, ce n'était pas si difficile à admettre, non ?Sherlock esquissa un sourire en coin, malgré lui.
— Ne t'y habitue pas, John. Je n'ai pas l'intention de perdre de vue qui je suis.— Personne ne te demande de changer qui tu es, Sherlock. Mais ouvrir un peu ton cœur, ce n'est pas un crime. Et puis, qui sait, peut-être qu'Émilie pourrait te surprendre de manière que tu n'avais pas anticipée.
Sherlock hocha la tête, la pensée d'Émilie flottant encore dans son esprit. John avait réussi à faire naître une petite étincelle de doute, une question qu'il n'avait pas encore osé poser à lui-même : et si ce qu'il ressentait pour Émilie allait au-delà de la simple fascination intellectuelle ? Il n'avait pas encore la réponse, mais il savait que ce mystère-là serait plus difficile à résoudre que n'importe quelle autre énigme qu'il avait affrontée jusqu'à présent.
Les deux hommes continuèrent leur promenade, le silence retombant entre eux, mais cette fois plus apaisé. Sherlock, toujours aussi insaisissable, restait plongé dans ses pensées, mais il savait maintenant que quelque chose avait changé. Peut-être pas de manière spectaculaire, mais suffisamment pour qu'il commence à se poser les bonnes questions.
Et pendant ce temps, quelque part dans l'ombre de ses pensées, l'image d'Émilie continuait de se dessiner, plus nette, plus intrigante, et peut-être un peu plus dangereuse pour l'équilibre qu'il avait si soigneusement construit autour de lui.
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Une colocataire improbable
ФанфикDans les ruelles sombres de Londres, où chaque ombre cache un secret, Sherlock Holmes se trouve face à un ennemi à la hauteur de son intellect : le redoutable Moriarty. Alors que les complots se multiplient et que les preuves se retournent contre lu...