Une colocataire improbable

Chapitre 22

Jeux d'esprits

L'atmosphère dans le salon du manoir était chargée, presque palpable. Irene Adler et Sherlock Holmes se faisaient face, deux esprits affûtés, chacun tentant de deviner les intentions de l'autre. Émilie, toujours en retrait, observait la scène avec une attention scrupuleuse, ses pensées s'activant à mesure que la tension entre les deux protagonistes s'intensifiait.

Irene sourit doucement, mais c'était un sourire froid, calculateur.
— Sherlock, vous vous présentez ici comme le chevalier blanc, le défenseur de la Couronne. Mais nous savons tous les deux que votre véritable motivation n'est pas de protéger un quelconque secret d'État. Ce qui vous attire, c'est le défi, l'énigme. Vous voulez me comprendre, n'est-ce pas ? Sa voix était comme un murmure séduisant, presque moqueur.

Sherlock ne se laissa pas prendre au piège de cette provocation. Son visage resta impassible, mais ses yeux brillaient d'une lueur particulière, celle de l'anticipation.
— Vous avez raison, Irene, je suis fasciné par l'énigme que vous représentez. Mais ne vous méprenez pas, cela ne signifie pas que je vais jouer selon vos règles.

Un éclat d'amusement traversa le regard d'Irene. Elle se tourna vers Émilie, qui était restée silencieuse jusqu'à présent.
— Et vous, Mademoiselle Dubois ? Vous êtes ici pour veiller à ce que Sherlock reste sur le droit chemin, ou bien êtes-vous une énigme supplémentaire qu'il lui faut résoudre ?

Émilie croisa les bras, le regard calme mais pénétrant.
— Mon rôle ici n'est pas de surveiller Sherlock, Miss Adler. Je suis ici pour comprendre les motifs qui animent les gens comme vous... et Moriarty.

Le nom de Moriarty jeta un froid dans la pièce. Irene ne réagit pas immédiatement, mais un léger tressaillement dans ses traits révéla qu'elle n'était pas complètement à l'aise avec la mention de ce nom.
— Moriarty... Il est le cauchemar de Sherlock, n'est-ce pas ? Mais pour vous, que représente-t-il, Mademoiselle Dubois ?

Émilie marqua une pause, comme si elle réfléchissait soigneusement à sa réponse.
— Moriarty est plus qu'un simple criminel. C'est un architecte du chaos, un homme qui utilise son intellect pour détruire ce que d'autres tentent de bâtir. Il manipule les âmes perdues, les transforme en armes. Vous, par exemple, Miss Adler, vous êtes peut-être l'une de ses créations. Une œuvre d'art dans son monde de destruction.

Sherlock tourna un regard curieux vers Émilie. Ce n'était pas souvent qu'il entendait quelqu'un d'autre articuler si clairement ce qu'il pensait. Mais cette fois, il sentait qu'il y avait quelque chose de plus, un lien personnel qu'il ne pouvait encore définir.

Irene sembla se raidir légèrement sous l'analyse impitoyable d'Émilie.
— Vous pensez donc que je ne suis qu'un pion dans son jeu ?

— Je pense que vous êtes bien plus qu'un simple pion, répliqua Émilie. Vous êtes une reine sur l'échiquier. Mais même les reines peuvent être sacrifiées si cela sert un objectif plus grand. La question est : êtes-vous prête à le découvrir par vous-même ?

Un silence tendu suivit cette déclaration, jusqu'à ce qu'Irene se tourne de nouveau vers Sherlock, ses traits s'adoucissant.
— Vous êtes entouré de gens fascinants, Sherlock. Mais le danger avec les esprits brillants, c'est qu'ils ne se contentent jamais de la surface des choses. Elle fit une pause, un sourire mystérieux sur les lèvres. Dites-moi, Sherlock... que voyez-vous quand vous me regardez ?

Sherlock, pour la première fois, sembla hésiter. Il n'était pas habitué à être mis sur la sellette, surtout par une personne qu'il considérait comme une adversaire. Il laissa ses yeux parcourir le visage d'Irene, cherchant les réponses cachées dans les plis subtils de son expression.
— Je vois une femme qui sait manipuler les perceptions des autres. Vous utilisez votre intelligence et votre charme comme des armes, mais vous êtes également consciente de vos faiblesses, que vous cachez habilement derrière un masque de confiance. Vous êtes quelqu'un qui n'hésitera pas à trahir pour survivre.