La première chose que j'avais faite après l'aveu de Livaï, une fois que j'avais eu le temps de m'asseoir et de tout rejouer dans mon esprit, était de dresser une liste.
Dans celle ci, tous les événements qui auraient dû me mettre la puce à l'oreille étaient inscrits. Et maintenant que je la revoyais, des années et des années après l'avoir rédigé, l'intensité de mes émotions sur le coup me frappaient de plein fouet. L'écriture intelligible et tremblante, les lettres gravées par l'ardeur de ma haine, les endroits où l'encre s'était répandu sous l'effet des larmes, et le papier. Le papier froissé et défroissé une dizaine de fois, ne ressemblant plus qu'à une relique d'un passé lointain.
Lointain et apparemment faux, car monsieur Livaï s'était apparemment joué de moi tout ce temps.
Quelques événements étaient rayés, inscrits sur le coup de l'émotion mais sans aucun lien réel avec la prétendue tromperie : L'attaque près de la librairie et le jour où il était revenu sanglant et blessé. Je désirais des explications pour toutes ces instances, mais mon envie de sortir Livaï de ma vie avait été trop forte pour que j'en quémande.
Puis d'autres étaient éparpillés à fur et à mesure que j'affrontais ma mémoire : sa visite tard dans la soirée, l'air coupable et hébété, ses voyages de plus en plus répétitifs, son affection grandissante, comme s'il essayait de se faire pardonner pour quelque chose que j'ignorais.
Bien que la liste et tous les objets me rappelant le brun avaient été rangés dans une boîte vouée à l'oubli, je n'avais jamais réussi à les jeter. Faut pas déconner non plus, le mec était riche et avait bon goût. Sauf que je ne les avais plus jamais ressorti. Jusqu'à aujourd'hui.
Car j'avais besoin de me souvenir de pourquoi je détestais Livaï. Je ne devais pas me laisser avoir, ni par ses excuses bidons ni par mes propres émotions qui avaient tendance à s'emporter près de lui.
Mais maintenant qu'il était sept heures et que ma journée au travail commençait, je regrettais sévèrement ma nuit passée à ruminer et plonger dans des souvenirs flous. Rien ne m'aida à bien me réveiller, ni les deux tasses de café, ni le trajet infernal, et encore moins les dossiers de la matinée.
-"Tu n'as pas très bonne mine." Commenta Clara en venant me détailler le programme du lendemain en fin de journée.
Ça, c'était sa version polie de "Tu as une tête de merde".
-"J'ai mal dormi." Me contentais-je de dire en étouffant un énième bâillement.
-"Tu as une réunion dans quarante cinq minutes avec les investisseurs du groupe Marley. Il faudra ensuite voir l'équipe média pour planifier la création du contenu de ce mois et repasser sur le liste des apparitions publiques. Il y'a d'ailleurs deux essayages prévus cette semaine; le premier demain pour le festival du film de Marrakech et la seconde le jeudi pour le gala de charité de la compagnie."
Ai-je crié intérieurement en repensant au fait que j'étais invitée à l'une des soirées les plus iconiques de l'année ? Oui, à m'en écorcher les cordes vocales, mais Clara ne semblait pas en avoir fini alors ma crise pouvait attendre.
-"Il te reste aussi à dix neuf heures la réunion avec la directrice financière et celui marketing pour l'étude de notre part de marché par rapport à la compétition. Ah oui, les actionnaires attendent le suivi du mois dernier alors il faudra que tu l'approuves. Et le producteur de l'émission veut recevoir en urgence le programme révisé pour le premier épisode, de préférence avant vingt heures ce soir. Il faut également discuter du prochain épisode du podcast avec Lois mais je te laisse planifier cela selon le créneau qui vous conviendra à vous deux."
Faudrait déjà qu'il me restant des créneaux libres bichette.
J'aimais beaucoup Clara, mais sur l'instant, j'espérais secrètement qu'elle s'en aille, m'annonçant implicitement que je n'avais rien d'autre de prévu. Mais car l'ironie est un art dont je suis particulièrement amatrice, elle me plongea encore plus dans le désarroi.
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100 Days 《Livaïxreader》
FanfictionTOME 2 DE "200 DAYS" Si la vie sentimentale de [t/p] est plus aride que le désert du Sahara, elle enchaîne les exploits professionnelles et est au printemps de sa carrière. Chargée de production dans une des sociétés dominantes du marché national et...