𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐕

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Après avoir quitté le collège, Colm se sentit à la fois soulagé et nerveux. L'inscription avait été une étape nécessaire, mais il savait que le véritable défi commencerait avec la rentrée. Son esprit tournait en rond alors qu'il rentrait chez lui. Addison était occupée à déballer des cartons, ce qui offrait à Colm une parfaite occasion de s'évader et de découvrir un peu plus ce petit village qui allait désormais être le sien.

Une fois dans sa chambre, il se changea rapidement et enfila ses baskets. L'odeur de la terre humide et la fraîcheur de l'air de montagne l'attiraient. Colm avait besoin d'espace pour réfléchir et s'immerger dans ce nouvel environnement. Il sortit de la maison et se dirigea vers le centre du village.

En marchant, il observa les maisons colorées aux volets en bois, les jardins fleuris et les petites ruelles pavées. Les gens qu'il croisait lui lançaient des sourires amicaux, mais lui se contentait de hocher la tête, trop préoccupé par ses propres pensées. Le village semblait avoir un rythme qui lui était étranger, mais il l'écoutait attentivement, essayant d'en mémoriser les sons et les odeurs.

Il atteignit finalement une petite place centrale, où un chêne majestueux offrait une ombre fraîche. Ses branches larges et feuillues formaient un immense parasol naturel. Son tronc, épais et noueux, témoignait des siècles passés, avec des fissures et des cicatrices qui racontaient l'histoire de ce lieu. Au milieu de la place, un banc en bois l'attirait, et il décida de s'y asseoir un moment. Il ferma les paupières, profitant de la douceur du vent sur son visage. Il appréciait fortement ce calme qui l'entourait. Lorsqu'il rouvrit les yeux, il remarqua une silhouette familière. C'était elle, la fillette qu'il avait aperçu la veille dans la rue de leur nouvelle maison.

Elle était assise sous le grand chêne à une distance raisonnable, les jambes croisées, plongée dans un livre aux pages jaunies. Sa chevelure ébène ondulait autour de son visage, et elle semblait si absorbée par sa lecture qu'elle n'avait pas remarqué la présence de Colm. Son cœur s'accéléra, partagé entre l'envie d'aller lui parler et la peur de rejouer la même scène maladroite qu'il avait vécu auparavant.

Finalement, après quelques instants de réflexion, il prit une profonde inspiration et se leva. Il se dirigea vers l'arbre, son cœur battant la chamade.

« Euh, salut... » dit-il, d'une voix timide.

La fillette leva les yeux, surprise. Elle était d'une beauté étrange, avec des traits délicats qui lui donnaient l'air d'une petite fée. Ses grands yeux verts plongèrent dans les siens et il se sentit comme hypnotisé.

« Bonjour, » répondit-elle, un peu hésitante, son regard fuyant.

Colm sentit un mélange de timidité et d'excitation. Il s'assit à côté d'elle, gardant une distance respectueuse.

« Je m'appelle Colm. Je viens d'emménager ici avec ma mère.

— Je sais, répondit-elle en détournant le regard, semblant un peu mal à l'aise.

— Tu sais ? »

Elle haussait légèrement les épaules, et une lueur de curiosité passa dans ses yeux.

« Les gens parlent, puis je vous ai vu.

— Pourquoi tu t'es enfuie hier ? lui demanda-t-il soudain.

— Je n'ai pas l'habitude qu'on me parle, avoua-t-elle.

— Pourquoi ?

— Personne ne me parle jamais. Les gens ne s'intéressent pas à moi. »

Ses mots étaient chargés d'une tristesse qu'il pouvait sentir. Colm, touché par sa confession, se pencha un peu plus près.

« Ça doit être difficile de se sentir isolée. »

La jeune fille ne répondit pas. Il se gratta la tête, se demandant ce qu'il pourrait dire pour briser la glace.

« Tu lis quoi ? » demanda-t-il finalement, désignant le livre qu'elle tenait.

Elle le leva lentement, comme si elle hésitait à en parler.

« C'est juste un roman. Rien d'important.

— Ça a l'air intéressant, insista Colm, essayant de faire surgir un semblant de conversation. J'adore lire aussi. »

Elle lui lança un regard, ses yeux pétillants d'une timidité palpable.

« Vraiment ?

— Oui, c'est une de mes passions.

Un silence s'installa, puis, Colm continua :

« J'aimerais bien te connaître. »

La fillette, un peu surprise par son insistance, détourna le regard vers son livre.

« Pourquoi voudrais-tu me connaître ? Je ne suis pas très intéressante.

— Je ne sais pas encore si tu es intéressante ou non, mais je veux apprendre à te connaître, répondit-il avec sincérité. Parfois, il suffit de discuter un peu pour découvrir des choses surprenantes. Et puis, je suis nouveau ici, alors j'ai besoin de me faire des amis. »

Elle le regarda longuement, comme si elle pesait ses mots.

« Vraiment ? Tu veux être mon ami ?

— Oui, je pense que ce serait bien. Tout le monde a besoin d'un ami, n'est-ce pas ? »

Elle sembla réfléchir un instant, puis finit par murmurer, presque timidement :

« D'accord...

— Comment tu t'appelles ?

— Josie. »

Le simple fait d'entendre son prénom fit naître un sourire sur le visage de Colm.

« C'est un joli prénom, Josie. »

Les joues de la fillette prirent une teinte rosée, et une étincelle de confiance se glissa dans son regard.

« Merci, Colm. Mais... je ne suis pas comme les autres. Je préfère les livres à la plupart des gens.

— Les livres sont géniaux ! s'exclama-t-il. Ils nous emmènent dans des mondes différents. Quel est ton livre préféré ? »

Josie, visiblement encouragée par l'intérêt qu'il lui portait, commença à lui parler de son livre. Elle expliqua comment l'histoire parlait d'une aventure fantastique dans un royaume lointain, peuplé de créatures étranges et de héros courageux.

Alors qu'ils parlaient, Colm ressentait un mélange d'étonnement et d'admiration face à la fillette. En la voyant si absorbée par son livre, il avait d'abord éprouvé une certaine curiosité, mais au fil de leur conversation, cette curiosité s'était transformée en un profond intérêt. Il était fasciné par la passion qui illuminait son regard lorsqu'elle parlait des aventures de ses héros fictifs. Cette passion, si différente de son propre tempérament ardent et intrépide, lui semblait presque magique.

Il se sentait également protecteur envers elle, désireux de l'encourager à partager davantage ses pensées et de ses rêves. Dans un monde où elle semblait souvent se tenir à l'écart, il voulait être celui qui l'incitait à s'ouvrir. Ses manières réservées, loin de le rebuter, l'attiraient davantage, éveillant en lui un instinct de camaraderie.

Puis, il ressentait une douce excitation, une nouvelle forme de connexion qui germait en lui. L'idée de se retrouver avec Josie, de plonger ensemble dans des mondes imaginaires, le remplissait d'une joie anticipatoire. Il avait l'impression que leur rencontre marquait le début d'une aventure à part entière, une aventure qui ne se limitait pas à des dragons et des royaumes, mais qui s'étendait à leur propre amitié en devenir. Pour la première fois, il se sentait prêt à explorer les profondeurs de cette relation, à découvrir ce que pourrait être l'amitié avec quelqu'un d'aussi unique que Josie.

JosieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant