23 💎 Prisonnière de son esprit

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"La Nécromancie était une science abjecte. Une magie trop peu commune pour être étudiée. Controversée. Terrifiante. Et parfois même surprenante."

ELYA

Voilà plusieurs jours que j'étais coincée au palais du roi. Agnès et moi n'étions pas contraintes de pourrir dans les sous-sols comme tous ceux qu'Aude gardait pour en faire des esclaves mais nous n'avions guère l'opportunité de quitter la demeure. Aude se chargeait déjà de ramener son armée de morts. Sans compter que le virus qui infligeait à la Capitale de terribles drames empirait de jour en jour.

Elle avait tout calculé pour se retrouver ici, avec moi. Elle savait comment les choses allaient se dérouler avant même qu'elles n'arrivent.

Elle était le savoir. La puissance. La mélancolie.

Les Gardiens n'avaient que peu de chances face à elle.

— J'ai appelé ma poupée Pénélope, parce que je me souviens que maman avait un cheval qu'elle avait nommé comme ça. Est-ce que toi tu t'en souviens Elya ?

Ma soeur était assise en tailleur sur le lit poussiéreux de notre chambre. Cette même pièce dans laquelle nous vivions depuis trop longtemps déjà. Je ne supportais pas d'être enfermée et encore moins de savoir un tel monstre arpenter ces couloirs. Cependant, lorsque je regardais dehors, je n'y descellais que la mort.

Chaque jour qui passait, la cour se remplissait de soldats aux ordres de la Nécromancienne. Les rues de notre Capitale n'étaient plus que les vestiges du passé. Femmes et enfants avaient été éradiqués. Ne restaient plus que les plus vaillants, les plus forts et redoutables. Morts, puis revenus à la vie pour la servir. La guerre se profilait et j'étais impuissante.

Je m'étais résignée à mourir.
Mourir auprès de ma soeur, Agnès.
Jamais plus je ne comptais la quitter.

— Oui, je m'en souviens, soufflai-je en tenant entre mes doigts le rideau délavé.

— Parfois, maman me manque. Pas toi ?

— Tous les jours...

— Et tu crois qu'on pourra rentrer à Novendill maintenant que tu es revenue ?

Elle sauta du lit et trottina jusqu'à moi alors je refermai le rideau pour qu'elle ne puisse pas voir dehors.

— Tu as vu ? En plus, j'ai gardé ton collier !

Je m'accroupis près d'elle puis lui souris tout en passant quelques mèches de ses cheveux noirs derrière ses oreilles.

— Tu devras le garder encore très longtemps, d'accord ?

Elle hocha la tête en me dévoilant un sourire duquel une dent de lait lui manquait.

— Oui promis ! Tu viens ? On va jouer au chasseur et à la sorcière ?!

— Non, Agnès... je sais que tu as envie de jouer et explorer le château mais...

— Mais tu as peur de la dame en noir... marmonna-t-elle en s'asseyant au bord du lit.

Elle balança ses pieds dans le vide, l'air boudeuse. Elle coiffait les cheveux de sa poupée, la lèvre inférieure légèrement en avant. Je poussai un profond soupir puis me redressai. Je passai une main dans mes cheveux, le coeur serré.

Depuis que j'avais retrouvé Agnès, il n'y avait qu'elle qui m'importait et pourtant... je ne cessais de penser aux Gardiens.

À Ezekiel...

Je tirai légèrement le rideau, observant l'horizon plutôt que l'armée qui se préparait en contrebas.

— Où que vous soyez... j'espère que vous êtes sains et saufs, murmurai-je.

Les Derniers Gardiens : II - La Voie du SaphirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant