Chapitre 7

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Bien que l'envie n'y était pas, j'avais continué le tournage. Mes distances prises avec les acteurs, je me sentais quelque peu à l'écart, mais ce n'était rien. Il ne restait plus qu'une prise et après c'était fini. J'en avais terminé de ces sourires hypocrites, de ces messes basses dès que j'entrais quelque part.

Je ne savais toujours pas si mes collègues pensaient réellement ce qu'ils m'avaient dit, mais je préférai m'éloigner d'eux. J'en avais marre de me justifier pour un rien. Alors je faisais comme je l'avais fait pendant un an, à savoir m'isoler. Ils l'avaient rapidement compris et n'ont pas cherché à venir s'excuser. Je ne pouvais pas dire ce qui me chagrinait le plus. Qu'ils ne soient pas venus me voir ou que leurs regards remplis de pitié ne me quittent.

Je ne savais pas, j'avais juste besoin de question qui me comprenne. C'était tout ce que je voulais.

Cela faisait trois semaines que je n'avais pas vu ni entendu parler d'Olivia. Peu importe, c'était même une bonne chose. La savoir loin de moi était une bonne chose. Même si sa présence me manquait.

— Coupé !

Tout le monde applaudit, moi je soufflai. Enfin. Plus personne derrière mon dos, plus de ces "gentils" collègues.

Je me précipitai dans ma loge et, à peine la porte passée, je vis une enveloppe déposée sur la coiffeuse.

Surprise, je m'empressai de refermer la porte derrière moi et de m'en saisir.

"À la grande Klara Simons"

Je souris en devinant la personne qui me l'avait écrite.

"Enfin libérée ! Pour fêter ça, je t'invite à la maison. Tu connais l'adresse. À ce soir."

L'idée de la lettre était bien trouvée, elle gagnait un point. Et savoir qu'elle pensait à moi me remplit d'une joie immense. Je ne perdais pas une seconde pour me diriger chez elle, comme si je n'avais pas encore compris que c'était une mauvaise idée. Et pas que pour moi. Pour elle aussi. Si par malheur nous étions surprises ensemble, son image de célébrité parfaite prendrait un coup. Depuis des semaines maintenant, les médias ne cessaient de rabâcher les mêmes photos et vidéos de nos soi-disants accrochages pour alimenter la haine à mon égard. Tout le monde prenait la défense d'Olivia, bien évidemment. Mais d'un côté, ça ne me dérangeait pas. Moi, j'en avais l'habitude. Elle, non.

Arrivée sur le pas de la porte, celle-ci s'ouvrit avant même que je ne sonne. Je ne l'avais encore jamais vue avec une tenue aussi décontractée, un simple t-shirt et un short. Et je pense que c'était comme ça que je la préférais.

— T'étais si pressée de me voir ? lançai-je en l'étreignant amicalement.

— Tu peux même pas savoir.

— Olivia Meyer et Klara Simons qui dînent ensemble, ça ferait les gros titres.

— Tu m'étonnes, dit-elle en m'attrapant par le bras pour m'entraîner à l'intérieur. Dans ce cas, faut pas qu'on nous voit.

En retirant mon manteau, je remarquai que la table était déjà dressée et je m'en étonnai.

— Tu as préparé quelque chose ?

— J'ai essayé, dit-elle en m'invitant à prendre place. T'as pas intérêt à critiquer.

Je levai les mains en signe d'innocence.

— C'est pas mon genre.

Le coin des lèvres redressé, elle prit place à mes côtés. Nous commencions alors à parler de tout et de rien, de la fin de ce foutu tournage qui m'en a fait baver, de cette tournée qu'elle venait d'achever. Nous étions enfin toutes les deux libérées de nos charges respectives, même si elle prenait bien plus de plaisir que moi à les exercer.

Se levant pour se diriger vers la cuisine, elle revint quelques secondes plus tard avec nos deux assiettes. Des pâtes bolognaises. Elle n'avait pas pris de risques, mais je me retins de lui faire remarquer de peur qu'elle me les balance au visage.

Telles de grandes amies, nous continuons notre conversation mais quelque chose me dérangeait. Je n'arrivai pas à me concentrer sur ses paroles tant le goût de cramé présent dans ma bouche était difficile à masquer.

Finalement, je pris mon courage à deux mains.

— Olivia... Tu me promets que tu t'énerves pas ?

— Jamais de la vie. Dis moi.

— T'es peut-être une grande chanteuse, mais t'es une piètre cuisinière.

— Je te demande pardon ?

Elle se releva, faussement vexée, en plaçant ses mains sur sa tête. Elle me retira mon assiette pour la déposer dans l'évier. Je la remerciais intérieurement de mettre fin à ce calvaire et me levai à mon tour pour l'aider à débarrasser.

— C'était abject, rajoutai-je.

— Fais attention à ce que tu dis, dit-elle en se rapprochant de moi.

J'étais appuyée sur le plan de travail, le sourire aux lèvres de la voir pester de la sorte.

— La prochaine fois, c'est chez moi.

— Je parie que t'es pas mieux que moi.

Elle laissa tomber son allure de peste pour laisser place à son fameux rictus, tandis qu'elle s'approcha de plus en plus de moi.

— Impossible... C'est impossible de faire pire.

Mes piques l'atteignirent comme je le souhaitais, la brusquant dans son égo.

— Alors j'ai hâte de voir.

Elle était désormais si proche de moi que je devinai qu'il n'était plus ici question de critique culinaire. Je pouvais apercevoir les moindres détails de son visage, j'étais privilégiée, j'avais cette chance unique de le faire. Pour rien au monde je n'aurais mis fin à ce moment.

Quand je relevai légèrement la tête pour lire dans ses yeux, je me raidis sur place. Elle m'observait comme je le faisais, avec une douceur qui m'était encore étrangère. Et soudain, une envie folle me prit. L'envie qu'elle m'embrasse.

Fort heureusement, cette envie ne me prit qu'une demi-seconde, jusqu'à ce que je réalise qui elle était et qui j'étais. De telles pensées ne devaient pas traverser mon esprit.

Je pris finalement mes distances et, sans trop vouloir la brusquer, je me dirigeai vers la table pour débarrasser le peu qu'il restait. Je sentais son regard interrogateur posé sur moi mais je n'osais l'affronter. Si Olivia comprenait ce à quoi je venais de penser, je savais qu'elle pouvait me briser ma carrière déjà émiettée.

— Ça va ?

— J'ai du mal à digérer les pâtes.

J'entendais son rire dans mon dos et criait intérieurement de joie, elle n'avait visiblement pas remarqué mon malaise. Et c'était mieux comme ça.

— Je vais rentrer, il va me falloir plusieurs jours pour m'en remettre.

— T'as intérêt à me préparer un plat de chef étoilé, sinon tu vas m'entendre.

— Promis.

L'amour, malgré toutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant