(bon allez. Trop sympa le mec, mais je vous met l'origin Story de Valère aussi. Deux chapitres pour le prix d'un!)
Je me souviens, oui.
J'ai mal. Encore.
Mon corps me semble gorgé de lave en fusion, qui parcourt mes artères, s'infiltre dans chacune des fibres de mes muscles. Façonne mes os, les assemble. Les réassemble.
Enfermé dans la chair, je ne peux que subir. Mes sens ne sont que bouillie, gelée acide, perdus dans l'océan de douleur que je suis au-dedans de l'horizon d'une peau que je peux à peine sentir.
Je n'ai pas à me demander pourquoi, je ne peux qu'attendre.
Je ne sais pas si je suis en vie, je ne sais pas ce que c'est que vivre, mais je sais que je préfèrerais ne pas exister. C'est trop dur, trop violent. Des ongles d'acier qui arrachent les moellons de mon être et me reforment de l'intérieur.
Je voudrais sortir, je voudrais...
Petit à petit, je perçois l'extérieur. C'est ténu. Presque imperceptible à travers le fracas interne du chantier de ma carcasse. Mais...
Il me semble entendre des voix. Je ne sais pas ce qu'elles disent.
Je sais qu'elles sont là, autour de moi, penchées sur moi. Comme une longue mélopée qui se déroule là au-dessus de mon carnage interne.
Des gens? Oui... Qui? Comment le saurais-je...
Je ne sais pas... Comment? Comment suis-je venu ici? Comment? Qui?
Ces questions, d'abord dérisoires, gagnent en importance à mesure que mes sens s'alignent et que le chaos de ma fournaise s'apaise.
Je n'ai aucune idée ni de qui je suis, ni d'où je me trouve... Car je suis bien quelque part, n'est-ce pas? Je suis bien... Quelqu'un?
Au prix d'un effort mobilisant tout ce que je pense avoir gagné de force, et mû par l'instinct, j'arrive faiblement à ouvrir mes paupières.
Papillonner quelques secondes des yeux qui ne peuvent soutenir l'afflux violent de lumière sur ma cornée fragile.
Je les ai vus. Ces quelques silhouettes, penchées autour de mon corps. Diffuses. Indistinctes.
J'entends leurs paroles, leurs mots rapides, qui ne font aucun sens encore à mes oreilles.
Mais c'était trop. Bien trop.
Je sombre à nouveau, avalé par une miséricordieuse inconscience.
J'ai la vague perception qu'on enfonce dans ma gorge quelque chose. Liquide? Je ne sais pas. C'est brûlant, ça attaque mes entailles, ça se fraye un chemin au creux de mon organisme. Je voudrais tousser, je voudrais hurler, repousser cette intrusion, mais je n'en ai pas la force.
Une nouvelle vague de douleur. Dans mes extrémités, dans ma bouche. C'est comme mourir. Mourir encore. Non... Je ne suis pas mort. Puisque je souffre, je suis en vie...
Je voudrais ne plus l'être...
Quand je reviens à moi, tout est beaucoup plus net. Beaucoup plus vif. Cassant.
Je perçois sous moi la pierre froide sur laquelle je dois être allongé, et... Il m'a semblé entendre des cris, des hurlements. Mais il n'y a plus que du silence qui me parvient.
Et une odeur... Une odeur que je ne connais pas. Une odeur... Qui me donne faim.
Il me faut du temps pour arriver à me mouvoir.
Que cela soit quelques minutes, ou bien des dizaines d'heures, je n'en ai pas conscience. Mais c'est cette faim, toujours plus pressante, qui me pousse à enfin bouger.
Je sais seulement que mes mains touchent la pierre et que mes yeux s'ouvrent difficilement.
Un plafond de roches grossièrement taillé.
C'est la première chose que je vois de ce nouveau monde qui est maintenant le mien.
Sur les reliefs bruts de la pierre dansent ce que je devine être des flammes.Se redresser est une autre histoire. Mes membres engourdis supplient mais je dois les plier à ma volonté.
Et quand je me mets assis, sur cet espèce d'autel sur lequel mon corps reposait... J'ai un haut le cœur.
Du sang. Partout.
L'espèce de grotte au centre de laquelle trône l'autel de marbre parfaitement rectangulaire où je repose est un vrai charnier. La couleur rouge-brun de fluides en train de coaguler tapisse les murs, le sol, mon perchoir, et même moi. Surtout moi.
Je suis recouvert de sang.
Inutile de se demander sa provenance.
Le monceau de cadavres en toges noires qui gisent éventrés tout autour de mon autel est assez clair. C'est... Une exécution. Un carnage sans nom de corps éparpillés, égorgés, démembrés, comme par une bête sauvage qui se serait frayé un chemin à coup de crocs et de griffes à travers les occupants du lieu.
Je reste interdit.
Sans oser même cligner des yeux.
Un bruit. Tout proche. Je sursaute.
Avant de me reculer précipitamment, manquant de tomber de mon perchoir.
Une des personnes en toge n'était pas morte. Une femme.
Elle s'est traînée vers moi, tant bien que mal, plaquant une de ses mains sanglantes sur mon autel. L'autre tenant la plaie de sa poitrine. Béante. Crachant un liquide sombre qui me tord les entrailles.
"Va... Val..."
Elle essaie de parler. Tends sa paume souillée vers moi. J'hésite. Puis me précipite pour l'attraper. Elle serre mes doigts dans sa poigne de mourante.
"Quoi? Comment je peux vous aider?" Je demande, sans savoir même si je pourrais m'aider moi-même.
"Va... Valère..." Articule-t-elle péniblement.
"Valère?" Je ne comprends pas. "Qui? Qu'est-ce que..."
Mais elle tape sur ma poitrine, y laissant de nouvelles traces ensanglantées.
"Valère," répète-t-elle. "Cours. Valère... Tu... En danger... Tu..."
Et comme ça, elle est morte. Sa tête tombant lourdement sur le marbre. Ses yeux fixant à jamais le vide, libérée de son agonie.
Mais elle m'aura au moins donné mon nom.
Valère...
C'est... Moi... Je peux faire avec.
Et je contemple ce cadavre frais, avec un mélange de fascination. Et de répulsion.
Parce que j'ai compris d'où me venait la faim qui tord mes entrailles depuis mon réveil.
C'est le sang. Ce sang si tentant qui m'attire, qui m'appelle, qui...
Je me recule, terrifié de moi-même, alors que je réalise que je suis penché sur le cadavre de cette pauvre femme, et que j'ai ouvert la bouche pour...
Pour quoi, en fait?
Qu'est-ce que j'allais faire?
Je fouille à toute force dans mes souvenirs, essayant de me rappeler qui je suis, ce que je fais là, comment je suis arrivé dans cette grotte, qui sont ces gens, mais rien.
Un néant absolu.
Cela devrait me terrifier.
Je n'ai pas le temps d'être terrifié.
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MOTHIKA - Âmes-Soeurs Nocturnes (BoyxBoy)
Vampire(TW : contenu adulte, smut, bl.) Valère est un jeune vampire qui aime autant sa vie de débauche qu'il déteste ses congénères. Il se tient très loin des autres Vampires et du tribunal Nocturne, et préfère picoler avec son meilleur copain Lycan, et L...