Chapitre 17 : Le tribunal

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(je vais me calmer sur les chapitres en doubles sinon je manquerai de publications d'avance...)
(mais bon en attendant, ça continue, joie et alléresse) 


 L'avantage, avec mon espèce, c'est que quoi qu'il se passe, on est jamais surpris tellement les idées préconçues à notre sujet ont raison et qu'on est des abrutis prévisibles.
Comme le fait d'organiser une réunion ultra importante et capitale pour le devenir des clans du pays dans une saloperie de parking souterrain vide.
Tout y est.
Les grosses berlines, le plafond écaillé, les néons qui cliquettent, l'ambiance verte de fond de piscine dans un film d'horreur de série Z. L'angoisse.
Et les grosses berlines des chefs qui se garent à quelques mètres de la masse figée des centaines de Nocturnes semblant tout droit sortir de séries télés mal produites ou de la pire rave partie de gothiques d'il y a quarante ans.

Mais même si la purée de clichés sur tartine de poncifs s'accumule, à partir du moment où la portière du véhicule de Seraph se ferme derrière nous et que la foule nous fixe, attendant qu'on vienne participer à cette charmante fête d'anniversaire de la mort du fun, je me sens pas particulièrement à l'aise. Genre. J'ai même plutôt envie de m'arracher les ongles avec une ponceuse, ça serait moins inconfortable que de se trouver dans ce lieu où j'ai rien à foutre.
Et habillé comme un pingouin en plus.
Une chemise trop étroite, noire, un pantalon sur mesure... J'ai même droit à de nouvelles chaussures. Et Seraph m'a enlevé ma casquette pour me faire un chignon et cacher le désastre de mes boucles décolorées... J'ai pas aimé, mais il s'en tape complètement.
Désagréable sensation d'être le gamin qu'on traîne devant la famille en trophée... Je sais pas si ça m'est un jour arrivé dans ma vie humaine, mais j'en aurais fait des cauchemars et une thérapie, c'est sûr... Au moins ça me distrait de la douleur de la soulmark... Qui semble se calmer un peu, d'ailleurs.

"Un problème?" Me demande mon Créateur. Tiré à quatre épingles dans son espèce de costume renforcé (qui sert plus à impressionner la galerie qu'à le protéger, j'en suis sûr), lui il a pas l'air ridicule. Pas plus que Huntress, avec sa robe de couturier et sa voilette sur la face. Ni de ses mignons à la tronche de premiers de la classe habillés par papa pour la remise des diplômes du plus gros lèche-cul.
"C'est tellement... vampire, ce genre de décors..." Je me contente de répondre, histoire d'éluder mes remarques pleines de sel.
"Effectivement..." Seraph plisse ses yeux, détaillant le triste décor et la masse qui nous attend avec anxiété. "L'espèce est décadente. Il va falloir changer cela. Je déteste nous voir nous vautrer dans de tels... marais indignes. Alors que notre place est clairement au sommet du monde. Suis-moi."
Je me retiens de rouler des yeux. C'est pas ce que je voulais dire, mais il a autant d'humour qu'un vaisselier de chez mamie Germaine, je vais pas insister.

Encadrés de la bande de garde-chiourmes dont il aime s'entourer, on avance vers la foule. Qui s'écarte prudemment sur notre passage. Tu parles d'une procession macabre.
C'est la première fois que je vois tant de Nocturnes. Tout le monde est là. Les Chiropteras et leur look de victorien en cosplay, les Nosfers qui ressemblent à des croque morts dans leurs vêtements de fonction et qui puent comme s'ils avaient passé trois siècles dans leurs cercueils, les Moonsies qui veulent vraiment beaucoup trop avoir l'air de méchants de film d'action, et les grands cuirs longs des Crows qui sont réunis autour de ce qu'il reste de leur commandement. C'est à dire... Pas grand chose.
L'ancien compagnon de la Chef décédée a l'air vraiment mal en point... Il lui survivra pas, pauvre gars... Quel intérêt de se lier pour l'éternité pour finir comme ça?

 Heureusement, pour relever le niveau, les goules ont un aspect plus sympas d'ados un peu grunge, même quand ils ont une gueule à avoir la cinquantaine en années humaines. Les harpies ressemblent juste à des nanas normales (juste trois fois divorcées avec leurs maris morts de manière mystérieuse et ayant empoché le pactole en soudoyant les flics, mais bon...). Et on voit même quelques banshees que j'approcherais pas plus près tellement elles me foutent la pétoche. Cinq ou six wendigos dans le fond, avec leurs cornes tellement incroyables. Une dizaine de skinwalkers, indiscernables des humains normaux exceptés leurs yeux absolument gris et cadavériques...
Puis les lycans, enfin. Les Reds, leur allure de gang de merde, là. Et les Fullmoons!

Je veux me précipiter sur Bones qui nous regarde passer avec appréhension, Seraph me retient par le bras sans même regarder où je veux aller. Je commence à en avoir plein le derche... Mais ici, entouré de ces gens? Je vais faire d'esclandre...
Je ne peux rien faire alors que mon ami me demande par geste pourquoi je ne l'ai pas appelé. J'essaie de lui répondre que je n'ai plus de batterie, mais je suis entraîné vers la table trônant au fond du parking, derrière laquelle s'alignent tous les chefs de clan.

Bones nous y rejoint, m'observant du coin de l'œil.
Ça me fait tellement chier de ne pas pouvoir lui parler. Le rassurer un peu... M'excuser comme le tocard que je suis de le laisser sans nouvelles... Demander comment va Lula...
Mais c'est pas le moment de faire ça. La tension dans l'air est... dégueulasse. L'air empeste la peur et l'inconfort.
Tous ces sentiments sont évidemment dirigés vers Seraph.
Personne ne semble vouloir l'approcher. Lui et ses mignons créent une sorte de cercle de respect et de crainte auteur d'eux qui me donne encore plus envie de me barrer par le premier interstice disponible.

MOTHIKA - Âmes-Soeurs Nocturnes (BoyxBoy)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant