Malkia

8

Je courais sous ma forme de louve, emportée par une rage inextinguible. La frustration coulait de chacun de mes pores, m'entraînant dans une course effrénée. Autour de moi, il n'y avait rien, aucun arbre, aucune feuille, juste un vaste terrain sablé. Le sable était froid sous mes pattes, la nuit enveloppant tout de son obscurité, et le vent glacé fouettait mon pelage.

Devant moi, une ombre filait à toute vitesse. C'était un loup immense, d'une couleur brune foncée tirant légèrement sur le roux. Mais ce qui me troublait le plus, c'était son apparence éthérée, comme s'il était fait de fumée. Je ne pouvais pas distinguer parfaitement son corps, mais ses yeux, d'un rouge sanglant, brillaient dans l'obscurité, terrifiants et hypnotiques, comme des braises ardentes dans la nuit.

Je m'approchais de lui, sentant l'adrénaline pulser dans mes veines. J'y étais presque. Si je me lançais, je parviendrais à l'attraper avec mes dents et à le ralentir. C'est ce que je fis, mais je me sentis tout de suite bête. Il échappa à mon étreinte, disparaissant comme la fumée qu'il était, se fondant dans l'obscurité, comme s'il n'avait jamais existé.

Je m'arrêtai, le souffle court, une grande tristesse m'envahissant. Mon âme sœur...

Je me réveillai en sursaut, le cœur battant, les images vives du loup immense encore ancrées dans mon esprit. C'était depuis avant-hier que ce rêve hantait mes nuits et mes jours , l'angoisse persistait, comme un écho lointain. Je clignai des yeux, essayant de chasser les ombres de mon rêve, mais elles restaient, comme un voile léger sur ma conscience.

En me redressant lentement, je réalisai que j'étais allongée près d'une magnifique chute d'eau dans la forêt, le murmure apaisant de l'eau me ramenant à la réalité. J'avais été emportée par le sommeil sous ma forme de louve, bercée par le bruit des flots. Je venais de chasser un bon lapin, ou plutôt, c'était Kia. Elle avait insisté pour manger une dernière fois un animal se trouvant sur notre territoire, comme si cela pouvait combler un vide. Sa détermination m'avait touchée.

Très tôt, nous avions quitté la maison, l'aube à peine levée. Il était maintenant à peu près 8 heures, si je me fiais à la lumière du soleil qui commençait à éclairer vivement mon jardin secret. Les rayons dorés filtraient à travers les feuillages, créant des éclats de lumière dansants sur l'eau. Je me laissais envelopper par cette ambiance, mais une partie de moi restait troublée par ce rêve récurrent. Je savais que quelque chose d'important m'échappait...

Je devais déjà partir pour la meute sanglante, et j'avoue que je ne le voulais pas du tout. Une angoisse sourde me nouait l'estomac à l'idée de quitter ce lieu, de laisser derrière moi la paix de la forêt et ceux que j'aimais. Je me levai, étirai mon corps engourdi, laissant le doux murmure de l'eau derrière moi, puis je pris la route en direction de la maison.

Chaque pas me semblait pesant, comme si le sol lui-même résistait à mon départ. Je savais que je devais dire au revoir à ma famille, mais surtout à mes triplés adorés. L'idée de les laisser, même pour un temps, me serrait le cœur. Ils étaient ma lumière, mon ancre dans ce monde si changeant.

En approchant de la maison, les souvenirs affluèrent. Leurs rires, leurs jeux, les moments de tendresse partagés. Je devais leur dire que je les aimais, que je n'oublierais jamais nos instants ensemble. Je pris une profonde inspiration, me préparant à affronter l'adieu, sachant que chaque mot compterait dans ce moment précieux.

❄❄❄ ❄❄❄

En approchant de la maison, une chaleur réconfortante m'envahit. Je poussai la porte et fus accueillie par une douce odeur de cuisine, mêlée aux éclats de rire qui résonnaient dans le salon. Un sourire se dessina sur mes lèvres, mais au fond, une mélancolie persistait.

Je montai rapidement à ma chambre, impatiente de me transformer en humaine. Une fois à l'intérieur, je fermai les yeux, laissant la magie opérer. Mon corps se transforma, la fourrure se mua en peau, et mes pattes en mains. Je me regardai dans le miroir, ajustant ma chevelure ébouriffée.

Je fouillai dans mon armoire et choisit une robe légère, d'un bleu profond qui rappelait la mer, et une paire de bottes confortables. En un clin d'œil, je me redressai, prête à rejoindre ma famille.

Les rires devenaient de plus en plus forts, résonnant comme une mélodie familière. J'ouvris la porte et descendis les escaliers, chaque pas me rapprochant de cette chaleur humaine si précieuse. En entrant dans le salon, je découvris Kaida, Kieran et Kaël, tous réunis autour de la table, les visages illuminés de joie.

« Regardez qui est de retour ! » s'écria Kaida, ses yeux pétillants de malice. Kieran se leva, un large sourire aux lèvres, tandis que Kaël, toujours le plus espiègle, se leva pour me faire une révérence exagérée.

« Je parie que tu as ramené des histoires incroyables ! » lança Kieran, s'approchant avec un enthousiasme contagieux.

Je me joignis à eux, le cœur léger, emportée par l'énergie de ma famille. Les éclats de rire et les taquineries réchauffaient l'atmosphère, et pour un moment, tout semblait parfait.

« Alors, qu'est-ce que tu nous racontes ? » demanda Jayden, mon père, en se tournant vers moi avec un sourire chaleureux. Il était assis à la tête de la table, un regard fier sur son visage. Sa présence rassurante me donnait toujours l'impression que tout irait bien.

« Oui, raconte-nous ! » insista Odessa, ma mère, en essuyant ses mains sur un torchon. Elle avait ce don de rendre chaque instant spécial, et sa voix douce me donnait envie de partager tout ce que j'avais vécu.

Je pris une profonde inspiration. « Eh bien, ce matin, j'ai eu une aventure incroyable dans la forêt ! » commençai-je, mes mots se mêlant à leurs rires.

Kaida, Kieran et Kaël se penchaient en avant, captivés, leurs yeux brillants d'excitation.

« Quoi ? Quoi ? Raconte ! » s'exclama Kaël, tout excité.

« J'ai croisé Margot, la fée ! » dis-je, feignant un air mystérieux. « Elle était douce et gentille, avec des ailes scintillantes qui brillaient au soleil. »

« Une fée ? Vraiment ? » demanda Kaida, les yeux écarquillés. « Qu'est-ce qu'elle a dit ? »

« Elle m'a dit qu'elle cherchait de l'aide pour rassembler des fleurs magiques dans la forêt, » continuai-je, prenant un ton enjoué. « Ces fleurs rendent les animaux heureux ! Alors, j'ai décidé de l'aider. »

Kieran se mit à sourire. « Et alors, qu'est-ce que vous avez fait ? »

« Eh bien, nous avons passé la matinée à chercher des fleurs de toutes les couleurs. Margot utilisait sa magie pour les faire pousser plus vite. C'était incroyable de voir comment elles poussaient sous ses doigts ! » racontai-je, mon enthousiasme grandissant.

« Wow, ça a l'air trop bien ! » s'écria Kaël. « Et qu'avez-vous fait avec les fleurs ? »

« Après les avoir ramassées, Margot m'a montré comment les préparer pour faire un élixir de joie ! » dis-je, les yeux pétillants. « Elle m'a donné un peu de cet élixir, et j'ai pu le goûter. C'était sucré et pétillant, comme un bonbon qui fait rire ! »

« Et ça a marché ? » demanda Kaida, impatiente.

« Oh oui ! Dès que j'ai pris une gorgée, j'ai commencé à rire sans raison. C'était tellement amusant que même les oiseaux ont commencé à chanter plus fort autour de nous ! » dis-je en riant.

Jayden et Odessa échangèrent un regard complice, amusés par mon récit. « Tu vois, les aventures n'ont pas besoin d'être effrayantes pour être mémorables, » dit Jayden avec un sourire.

Odessa hocha la tête. « Et c'est merveilleux de voir à quel point tu es capable de créer de la magie autour de toi, même sans fées, » ajouta-t-elle.

Les triplés éclatèrent de rire, et Kaelan, avec son esprit d'aventurier, proposa : « Peut-être qu'on pourrait chercher notre propre fée dans la forêt ! »

« Oui, et on pourrait faire notre propre élixir de joie ! » ajouta Kieran, tout excité.

Je souris, emportée par leur enthousiasme. Je savais que, même sans des fées, chaque jour pouvait être une aventure incroyable avec ma famille. Les triplés, avec leurs sourires innocents et leurs éclats de rire, étaient la lumière qui illuminait mes pensées.