22 - Théo

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Marc.

Putain de tous les moments où il aurait pu se pointer de nouveau, c'est celui-ci qu'il choisit ? Avec cette phrase ? Son « joyeux anniversaire » me fait ouvrir la bouche. Comment peut-il être aussi con ?

Le silence revient dans le magasin, Marc se gratte la tête et Anna lâche ma main pour l'agripper au bord de la caisse devant elle. De mon côté, mon cœur souffre à m'en couper le souffle par intermittence. Je suis en plein cauchemar.

— Tu m'as manqué, t'imagines pas, murmure-t-il à Anna.

Son allure générale fait peine à voir. Il est amaigri, plus blanc qu'à la normale et ce sourire gêné qu'il affiche me donne des envies de meurtres. Anna, elle, reste statique.

Je recule doucement, non, en fait je prends la fuite parce qu'assister à leurs retrouvailles est tout bonnement au-dessus de mes forces. Je bute dans le tabouret et le repousse avant de filer en direction de l'arrière-boutique. Marc passe derrière la caisse quand je m'enfonce dans l'obscurité.

J'ouvre mécaniquement mon casier où j'attrape ma veste. Qu'est-ce que je fais ? Je me casse, on dirait. Je n'ai rien à foutre là. Depuis le début.

J'entends un écho mat, il a lâché son sac.

— Anna, mon amour...

Bruits de frottement. Il la prend dans ses bras et moi, une main crispée sur la porte en fer du meuble, je baisse la tête en soufflant pour tenter d'endiguer la violence de cet instant. Elle va le laisser revenir, comme ça en silence ? Je serre les dents en grimaçant pour fermer mes yeux le plus possible quand je perçois le son spécifique d'un baiser. Comment peut-elle encore accepter qu'il...

— Ne me touche pas ! hurle-t-elle si brusquement que je sursaute.

— Anna, je suis désolé, je...

— Je veux même pas le savoir ! C'est terminé Marc !

— Non, attends Anna ! Excuse-moi je te jure que j'ai pas eu le ch...

— Lâche-moi, putain ! coupe-t-elle en se débattant avec force.

Je n'ose pas bouger, mais quand je vois un truc voler jusque devant l'ouverture où je me planque, je reviens sur mes pas.

— Arrête, Anna pose ce truc ! Aie, mais arrête !

— M'approche pas, Marc !

Je ne devrais pas, mais je trouve une minuscule satisfaction dans les mots qu'elle hurle. Je n'ai pas le temps de m'insulter que Marc se matérialise dans mon champ de vision en se protégeant maladroitement. Malgré sa position défensive, le poing d'Anna tenant le téléphone ne loupe pas sa cible et elle lui écrase sur le nez. Il titube et percute l'endroit où traine tout son bordel que j'ai fait tomber tout à l'heure. Anna avance, il recule, il s'excuse, elle le traite de tous les noms en pleurant et lui assène d'autres chocs avec le combiné que j'étais en train de lui rendre quand il est arrivé.

Il ne se défend pas, il s'excuse encore et finit en boule à se cacher derrière ses avant-bras. La scène n'a démarré que depuis une dizaine de secondes, mais Anna y met tant de rage et de coups que je quitte les casiers pour aller aider ce con. Ce gentil con.

En quelques pas je suis sur elle, je l'attrape en enroulant mes bras autour d'elle. Bloquant les siens contre sa poitrine.

— C'est terminé tes conneries ! T'es qu'une merde, Marc ! On est blindés de dettes et t'as rien dit ! T'es parti en me laissant ! Je te hais !

Il s'excuse en pleurant, recroquevillé contre le meuble. Anna se démène comme une enragée pour que je la libère, j'arrive à la soulever et l'éloigner de lui. Je l'oblige à entrer dans la réserve. Je ne la repose au sol que plusieurs mètres plus après. Dans mon dos, Marc ne semble pas avoir bougé.

Le Rêve d'un Autre (Bêta lecture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant