Dans la pénombre, tout s'éclaire

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Après avoir donné ses dernières instructions sur les missions confiées à chacun de ses fidèles hommes de main, le Prince quitte son bureau en compagnie d'Etna. Ils se dirigent vers la cour du palais où un carrosse a été préparé pour les conduire à la prison royale, située à l'est de la ville. Arrivés au pied du carrosse, le Prince aide sa fiancée à monter et s'installe face à elle.

— Est-il vraiment nécessaire que vous alliez le rencontrer ? s'inquiète Tidure.

— J'ai besoin de réponses et lui seul peut nous les apporter.

— Je comprends mais je pourrais en charger un de mes hommes de main et vous transmettre les informations.

— Je pense qu'il sera plus enclin à se confesser à une faible femme. Imaginez avouer des crimes à un garde du Prince. Quel meilleur moyen de finir supplicié ?

— En effet, j'admets que cela puisse le réduire au mutisme. Mais je ne suis quand même pas rassuré de vous laisser seule avec cet énergumène. Je vous attendrai juste derrière la porte de la salle avec le gardien.

— Cela me rassurera également. Je vous en remercie.

Légèrement tremblante, Etna s'empare de la main de Tidure et prend une grande inspiration. Arrivés à destination, ils se laissent guider par un garde vers les souterrains où se trouve la cellule de monsieur Imur.
Au moment de se séparer, le Prince doute encore du bien-fondé de leur décision. Il délivre ses dernières recommandations à sa bien-aimée avant de la laisser pénétrer dans la salle proche du cachot de monsieur Imur où Tidure a demandé aux gardes d'organiser l'entrevue. Le lieu est sombre et l'odeur nauséabonde indispose temporairement Etna. Elle aperçoit dans un coin le jeune homme qui, quelques jours encore auparavant souhaitait causer sa perte, assis, enchainé tel un chien et vêtu de vêtements crasseux. Ses traits autrefois si attrayants sont tirés et fatigués.

Lorsqu'il découvre l'identité de sa visiteuse, Noitan s'exclame, ravi :

— Je me doutais bien que vous ne pourriez m'abandonner dans ce lieu.

— Je pense que vous vous méprenez sur mes intentions, répond sèchement Etna. Je préfère que les choses soient claires entre nous : je veux juste m'assurer que vous êtes responsable de la mort de mon père.

— Voyons Etna ! Comment pouvez-vous me penser responsable d'une telle ignominie ? Vous savez que je ne suis pas ce genre d'homme.

— Votre tentative d'enlèvement m'a donné une nouvelle image de vous et j'imagine sans peine que vous ayez pu commanditer le meurtre de celui que vous haïssiez tant.

— Avez-vous des preuves de ce que vous avancez ? Les ennemis de votre père ne doivent pas manquer.

— Vous resterez coincé ici que vous m'avouiez ou non votre forfait. Votre tentative d'enlèvement vous condamne déjà à demeurer pour de très longues années dans ce cachot. Lorsque vous en ressortirez, vous ne serez sûrement plus en état de marcher sans canne.

— Ne me racontez pas n'importe quoi ! Je n'ai même pas encore eu de procès.

— Je suis au regret de vous annoncer que son Altesse le Prince est intervenu auprès de sa Majesté le Roi pour obtenir une condamnation sans procès préalable. Prérogative royale, ajoute la jeune femme avec une pointe de sarcasme.

Noitan se lève, visiblement énervé. Il s'emporte :
— Je serai donc toujours victime de ceux qui abusent de leur pouvoir ?

— Vous parlez de notre Roi. Un peu de respect, je vous prie ! lui assène-t-elle, un sourire en coin.

Noitan se relève pour atteindre Etna mais se débat sans succès avec sa chaine qui tinte bruyamment.

— Vous jubilez ! Vous êtes aussi mauvaise que votre père, s'énerve le jeune homme.

Envers et contre tousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant