Chapitre 4 : Julien

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Je n’arrivais pas à réaliser ce qu’il s'était passé, en quelques instants notre journée s'est transformée en  cauchemar. Anna avait proposé d'attribuer des tâches pour ne pas être débordée. C'était une très bonne idée sauf quand, comme moi, tu dois t’occuper de ramasser les cadavres de nos amis, histoire de ne pas attraper de grave bactéries. Je n’avais jamais vu de cadavre avant, sauf celui de mon grand-père avant son incinération, mais ce n’était pas pareil. J’étais accompagné de Mike et de Raphaël. On avait pour mission de les amener dans une salle de classe pas trop dévastée située à l’autre bout du bâtiment.
Mais au moment de repêcher les corps noyaient, je fus pris de hauts de cœur, je n’arrivais plus à respirer correctement, je sentis dans ma bouche un goût nauséabond. C’en était trop, je le voyais bien, Mike et Raphaël aussi n'étaient pas bien, mais je n’avais pas le même courage qu’eux. Comment rester intransigible dans cette situation ?
Je partis en courant, désolé les garçons, mais vous allez devoir continuer sans moi. Je me rapprochais des toilettes quand je butais sur un cadavre et m'aplatit au sol. Je sais que je n’aurai pas dû, mais je regardais à qui était ce corps.
Mes yeux se mouillèrent, c’était Léo,
un ami que je connaissais depuis si longtemps. Il avait la bouche remplie de sang, un bout de métal avait traversé sa jambe, il avait dû affreusement souffrir. J’avais eu de la chance de survivre.Mais je sentais quand même une pointe de culpabilité monter en moi. Pourquoi moi et pas un autre ? Mon cœur s’accéléra, je crois que je faisais une crise d'angoisse. Je mis mes mains sur ma bouche pour m'empêcher de crier.

Je me releva et repartit dans ma course ne pouvant pas enlever de mon esprit l’image du corps de mon ami. Je tombais à genoux près d’un rocher et vomi, agité de spasmes. Je frissonnais de tout mon corps. J’avais l’impression que mes nausées ne s'arrêteraient jamais. Je devais prendre sur moi-même où je ne survivrais pas longtemps. Il fallait m'occuper l’esprit, mais cette image, toujours la même, me revenait en tête. J’avais les yeux rougis tellement, j’avais pleuré et la bouche en sang tant je m’étais mordu les lèvres.

Raphaël accouru vers moi, de l’eau à la main, qu’il me donna, et que je bu d’un trait. Il me montra un endroit pour me reposer tranquillement. Mais je ne voulais pas les laisser se débrouiller tout seul pourtant, je n’avais qu’une envie : me poser pour reprendre mon souffle.
Je m’assis au pied du seul arbre encore sur son tronc et m'assoupis. Étonnamment, je ne repensais pas au
corps meurtris de Léo, à mon grand soulagement.

LA PLUME BLEUEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant