Chapitre 13 : Mike

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C'était une nuit sans étoiles, sans lune, à la faveur de l’hiver, car de grands nuages bordaient le ciel. C'est vrai qu’il fait un peu frais ces derniers jours. Autant vous dire que dans notre “dortoir”, si l’on peut appeler ça ainsi. C'est juste la pièce la plus sécurisée du bâtiment, car elle est principalement faite de fer. Il me semble qu'avant que cela ne devienne une chambre pour abriter des survivants, c'était le dojo, ce n’est pas très propre, mais on est plus à ça près.
Bref, là-dedans, il faisait très froid, si glacial que l’on était tous recroqueviller sur nous-même et coller les uns aux autres…
Ce qui était parfois légèrement embarrassant…
Il y avait à ma droite Livia, qui avait l’air glacé à cause de l’aération. Elle tremblotait comme une feuille, elle semblait si fragile, si délicate et toute sensible, qu’un moindre coup de vent
l’emporterait. Je la contemplais dormir…
Depuis quelque temps, je me sentais différent à ses côtés, plus léger et plus lourd à la fois, plus important et plus anodin en même temps. Mais le pire, c’est cette mélancolie permanente mélangée à de l’exaltation… Je suis
complètement perdu dans mes sentiments. Serais-je...? Je n'arrive pas à me l'avouer car je sais que quand je le ferais ce sera sans retour. Cette fille a tout chamboulé.
Sans s’en rendre compte, elle s'approcha un peu vers moi, pour finalement s’installer au creux de mes bras…
Heureusement que la nuit était bien sombre pour cacher le rouge pourpre de mes joues. Sa respiration me rassurait. Elle s'était blottie contre moi et j’aimais ça…
Elle commença à s’agiter, remua sous les vestes qui nous servaient de couettes, et poussa des petits cris d'effroi. Elle faisait sûrement un cauchemar. Devais-je la réveiller ? Je ne sais pas… C’est peut-être une mauvaise idée, si elle voyait qu’elle était contre moi, elle pourrait se douter de quelque chose, mais il ne faudrait surtout pas. Maintenant, elle pleurait… Bon, je vais lui chuchoter à l'oreille pour la tirer de son tourment :

-Livia, ne t'inquiète pas, ce n’est qu’un mauvais rêve, ça va passer…

Elle ouvrit grand les yeux, et à mon étonnement, ne réagit même pas. Elle garda les paupières écarquillées. Puis, comme de rien, se leva et me fit signe de la suivre. Je me haussa alors du tapis de gym qui nous servait de matelas et lui emboîta le pas.
Arrivée au centre de la cour déserte, elle cessa d’avancer :

-La lune est si belle, ce soir, n’est ce pas ?

-Comme tes yeux, ils ont des étoiles…

HO NON ! C’est sorti tout seul !
Alors elle s’approcha de moi et dit silencieusement :

-C’est parce qu’ils reflètent ton visage…

Un long silence s'installa entre nous… Puis elle avança d’un pied léger et prit ma main qu’elle posa délicatement sur ses épaules et posa sa tête entre le creux de mon épaule.
Un tourbillon de tendresse s’empara de moi et de mon cœur qui avait complètement chaviré sous son charme.
Je ferma alors doucement les yeux. Mes muscles se contractèrent lorsque son souffle était maintenant à quelques centimètres du mien. Ses lèvres s'apprêtèrent à toucher les miennes quand le sol vibra sous nos pieds. Elle recula d’un bond et tomba à terre. Une secousse ? Maintenant ? C’est une blague ! Le seul jour où j’avais assez de courage pour l’embrasser, super !
Pas le temps de m'apitoyer sur mon sort qu’un autre grand tremblement fit face… Je vis à l'horizon les vagues de l'océan se déchaîner, une tempête ! Elle se rapprochait, de plus en plus gigantesque.
Des tonneaux d’eau se projetant tout autour de nous. Les morceaux de terre tanguaient de droite à gauche. Des cris retentirent au loin. Mon cœur se serra. Prise de panique, Livia vint se cramponner à mon t-shirt.
La propulsion de l’eau nous collait comme des gifles aux visages, nos yeux fermés, nous luttions pour avancer, main dans la main, malgré la tempête dévastatrice qui essayait de nous
diviser. Nous rentrions dans notre dortoir qui faisait office de chambre forte, entièrement trempée. Les yeux de nos amis rivés sur nous tout en regardant dehors.
Je m'allongea sur mon matelas pour reprendre mon souffle quand tout à coup, je m'aperçus que je n’avais pas vu Julien en entrant dans la pièce. Je me releva brutalement, les yeux remplis d’effroi :

-Où est Julien ?!

À présent, tout le monde se regardait :

-Il m’avait dit qu’il voulait sortir pour s'aérer les idées… Chuchota Léa
d’une voix tremblante.

-Et mince ! Cria Hugo. Mike vient avec moi, on va le chercher !

Hoo non, pourquoi moi ? Je n'ai pas vraiment envie de ressortir dehors, pas maintenant, je suis sûr qu’il va bien... Ou pas...Bon d’accord, j’y vais, après tout, il aurait fait pareil pour moi. Hugo me fit un signe de tête tout en me disant :

-Accroche-toi ! Ça va secouer !

À peine la porte entrouverte, qu’une rafale de vent nous glacèrent le
visage.

-Es-tu vraiment sur Hugo ? Parce que si on y reste tous les deux…

- Oui, j’en suis certain. Ju’ est mon meilleur ami et je préfère prendre le risque plutôt que de le laisser mourir noyé ou frigorifié.

-D’acc... D’accord. Dis-je d'une toute petite voix.

Il réouvrit la porte et sortit, évidemment, je le suivis malgré moi…

LA PLUME BLEUEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant