Chapitre 27 : Adrien

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Nous étions dans l'obligation de partir, même si c'était à contrecœur... Les stocks de vivres s'amenuisaient à un tel point que d'ici quelques jours, il ne resterait rien. Pour l'eau potable, cela devenait compliqué même avec le filtreur créé par Hugo, car la mer était à présent polluée par des milliards de bactéries dont nous ne connaissons pas les faits.

 Des milliers de cadavres en décomposition submergés par l'eau salée qui était maintenant plus ocre que bleue, et il me semble que, part cette cause, toute vie marine ou même terrestre avait disparu. Il ne restait que quelques volatiles de passage, survolant de temps à autre notre ciel grisâtre. Nous disions " les oiseaux ça à toujours existé, toutes les espèces disparaissent, mais pas eux. Exactement comme l'espoir..."

J'avais bien conscience qu'en partant, nous prenions de gros risques, que nous allions sûrement mourir en chemin, mais maintenant cela m'était égal. Je n'avais plus rien à perdre ni à gagner. Après réflexion, la mort était sûrement plus douce que tout notre vécu. Évidemment, j'avais peur, pas de ce qui pourrait nous arriver, mais de ce qui ne pouvait arriver...

Miriam parlée de revoir nos amis une fois là-bas, de les retrouver plein d'entrains, qu'ils n'auraient pas changé, que l'on recommencerait à rire de bon cœur, que la joie réapparaîtrait parmi nous, comme si elle n'avait jamais déserté nos vies...

 Elle exprimait son sourire avec tant d'excitation que je n'osais pas lui dire que nous les reverrons sûrement jamais, car la maladie les aurait déjà emportés loin de notre monde, et que nous non plus, nous ne tarderons pas à les rejoindre, si nous ne sommes pas morts avant destination.

Je la vis d'ailleurs revenir, les bras remplis de bazar, une couverture qu'elle portait sur son dos, six bouteilles d'eau qu'elle soulevait lourdement dans une main, et dans l'autre, quelques restes de nourritures qui avait été partager de façon équitable. Elle avançait vers moi, doucement, prenant le plus grand soin de ne rien faire tomber. 

Quant à moi et les autres, nous venions de terminer l'installation de notre radeau, qui nous transportera, loin d'ici. Tout le monde était là, y compris Cursy, cette étrange gamine aux yeux de diamants bleu pâle... Il ne faisait pas encore jour, car je tenais à ce que l'on lève l'ancre dès l'aube...

C'était maintenant le moment crucial, celui des adieux...

-J'espère vraiment vous revoir dès que tout ce carnage sera terminé... Dit silencieusement Miriam.

-Je suis convaincu que l'on se retrouvera, même si c'est dans longtemps, et quand ce jour arrivera, on fera une grande fête de retrouvailles ! Avec de la bonne bouffe à volonté, de la musique, de la chaleur et beaucoup de blagues auxquelles nous ririons aux éclats ! Déclara Léa,

-Oui, et nous nous endormirons paisiblement sans avoir peur du lendemain ! s'exprima Livia.

Mes yeux vacillaient de droite à gauche pour suivre la conversation et les projets qui se disaient. j'avais bien conscience que malheureusement, on ne les reverrait pas, mais je souris vaguement pour acquiescer leurs propos.

J'avais très envie de pleurer, mais je préférais partir la tête haute et le visage fier ; c'est ce que je fis. Délicatement, je poussai du pied le bord pour propulser le radeau vers le large. Miriam leur fit un grand signe de la main, un dernier "au revoir". Eux de leur côté, nous regardaient nous échapper vers l'horizon futile.

Je me retourna vers eux, me rappelant de la toute première fois que j'avais vu au loin cet havre sur, qui m'avait sauvé. Là-bas, j'avais appris à rire malgré la douleur, à aimer même sans réel attachement, et à me satisfaire de la moindre chose...

Je rassembla alors mon courage, et cria de toutes mes forces cette dernière phrase qui résonna des kilomètre à la ronde :

-On se retrouve là-haut !!

Puis je pivota vers l'avant de notre radeau fait en quelques morceaux de bois, car c'était par là que se trouvait l'avenir qui s'ouvrait à nous. Je m'assis en tailleur, juste à côté de Miriam, et ensemble nous admirons une mer écarlate sous un lever de soleil qui s'expose devant nos deux personnes, lié par tout ce que l'on avait traversé...

Je la regarda comme on regarde quelque chose de précieux que l'on veut toujours avoir près de soi, mais je l'admirais surtout comme si c'était la dernière... Elle s'aperçut que je la contemplais sous les mille feux de l'aube, ainsi, elle se mit à rire, un rire vrai, un rire pur et innocent. Alors, tout bêtement, je me dis : "rien n'est plus beau qu'un sourire qui a su combattre des larmes".

LA PLUME BLEUEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant