Chapitre 3: Qui va là ?

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Chapitre 3 : Qui va là ?

Une petite femme, bien en chair, grosse* de plusieurs mois me sembla-t-il, descendait du carrosse, la reine! Blonde elle aussi, les joues rouges, le teint diaphane, la mâchoire un peu lourde, elle débordait de pierres précieuses mais cela n'avait pas le même effet que sur la grande dame en rouge... Sur la reine Marie-Thérèse cela était du plus mauvais effet, on aurait dit qu'elle croulait sous le poids de toutes ces pierreries, et ces perles... Elle était étonnamment petite! Plus petite que moi ! Et se dandinait en marchant sans doute à cause de ses hauts talons.

Elle était suivie d'un garçon, blond lui aussi, il ne devait pas avoir plus de 8 ou 9 ans. Le dauphin*! Le futur Roi de France!

-Voyez comment la Montespan** se pavane! gloussa la femme qui se trouvait près de moi.

-Et elle ose arborer les couleurs du roi! s'offusqua sa voisine en agitant son éventail.

-La Vallière*** est en bien piteux état... Son temps de gloire est passé!

-Voyez cette parure de rubis que la Montespan porte! Un cadeau du roi sans nul doute!

La parure de rubis! La dame en rouge n'était donc autre que la Marquise de Montespan! Ce nom me disait vaguement quelque chose mais je ne pouvais me rappeler exactement de qui il s'agissait... Le roi descendit le grand escalier et invita sa suite et tous les invités à venir admirer le bassin du Dragon.

-Monsieur le Nôtre fait des merveilles Sire! le complimenta la marquise de Montespan tout en admirant le magnifique bassin autour duquel toute la cour se pressait.

-Nous sommes heureux que cela vous plaise Madame, rétorqua le Roi d'une voix lente, puissante et majestueuse.

A ces mots, un jet d'eau immense s'éleva au dessus du bassin pour atteindre le ciel. La cour poussa un "Oh!" D'admiration. Quelle merveille! Je n'avais jamais vu une chose aussi spectaculaire! Absorbée dans l'admiration de ce spectacle sans égal, je ne vis pas une demoiselle en robe de soie verte s'approcher de moi. Je sentis un vif pincement à l'épaule et sortis de ma rêverie. Je me retournai brutalement.

-Aie!!!

-Tu es là pintade! s'écria la demoiselle aux abondantes boucles blondes et à la robe vert amande.

Heureusement que le bruit que faisaient les courtisans était tel qu'il était impossible d'écouter notre conversation qui utilisait des mots peu convenables pour des demoiselles de grande famille. Marie-Elsa de Bréhémont était aussi douée pour la discrétion que moi pour l'obéissance!

-Ah! Tu es là! Voilà une heure que je te cherche!

Je continuai tout bas :

-As-tu vu ces bosquets en construction, nous pourrions jouer un magnifique cache-cache! Je pense que personne ne nous en voudrait...

-Personne ne s'en rendrait compte surtout, murmura Elsa qui était enthousiaste à l'idée de fausser compagnie à toute cette honorable mais fort ennuyeuse assistance.

-Mère s'en rendra compte! s'énerva Adrien qui écoutait.

-Monsieur a peur de la nuit? plaisanta Elsa.

Cette remarque le fit pouffer de rire. J'étais bien placée pour savoir qu'Elsa avait une peur incontrôlable de l'obscurité car elle se sentait seule et Adrien y voyait des créatures terrifiantes... Ils étaient bien pathétiques tous les deux! Mais cette remarque bien qu'assez stupide venant de la part d'Elsa suffit à émoustiller l'orgueil de mon vaniteux frère si bien que cinq minutes plus tard nous étions hors de la vue des courtisans entre les arbres de l'immense parc de Versailles.

L'échiquier de VersaillesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant