Chapitre 3 : Un tarot nocturne

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"-Clélia !

-Oui ?

-On va manger. Tu peux descendre s'il te plaît ?"

Clélia eut un soupir d'exaspération. Elle tira une dernière latte et écrasa sa cigarette sur un petit bout de carton qu'elle avait trouvé au fond de son armoire et qui lui servait de cendrier improvisé. Elle prit un chewing gum, arrangea ses cheveux et descendit rapidement rejoindre sa tante.

Ca sentait bon dans le salon de Sibylle Atkins. La voyante avait préparé une soupe aux légumes et des pommes de terre sautées avec un peu de salade. Elle leva la tête quand elle vit Clélia arriver, et sourit.

"-Tu peux mettre la table, s'il te plaît ? Les assiettes sont dans le petit buffet à côté de la cheminée."

Clélia se dirigea vers le meuble de marbre. Elle l'ouvrit et en sortit des assiettes en porcelaine à bordure dorée. Les couverts étaient en argent massif et les verres en cristal. Clélia se demandait pourquoi sa tante possédait autant d'objets de valeur. En tant que voyante dans un petit village abandonné au milieu de nulle part, elle ne devait pas avoir des revenus très élevés. Pourtant, elle était mieux logée que sa mère, qui se tuait au travail 365 jours par an et qui ne possédait qu'un petit trois pièces dans le quinzième arrondissement parisien. Injustice de la vie, pensa-t-elle. A moins qu'en plus d'être voyante, sa tante ne pratique la magie ?

Clélia mit la table et s'assit. Sibylle lui servit de la soupe fumante. Clélia n'aimait pas beaucoup la soupe. Elle en avait bu à chaque visite à l'hôpital, et s'étant difficilement remise de ses overdoses de cocaïne, elle ne pouvait toujours pas se résoudre à sortir de son overdose de potage. Pourtant, le plat cuisiné par Sibylle sentait tellement bon, et elle mourait de faim. Elle porta donc l'assiette à sa bouche et but. C'était délicieux.

Sibylle la regarda manger sans toucher à sa propre assiette. Clélia leva les yeux, étonnée :

"-Tu ne manges pas ?

-Si, ne t'en fais pas. Ca me fait plaisir que tu aimes. Je suis loin de cuisiner les hamburgers et autres pizzas que les jeunes de ton âge apprécient. A vrai dire, je suis végane. Tu sais ce que c'est ?

-Euh... non.

-C'est le fait de ne consommer aucun aliment issu de la production animale. Ou de porter un vêtement d'origine animale, comme la laine ou la fourrure. Je ne pourrais pas me résoudre à manger un compagnon de Nostra, hein, mon beau ?"

Nostradamus grogna. Lui aussi avait faim. Il regardait sa maîtresse avec des grands yeux suppliants, qui finit par avoir pitié de lui. Elle se leva, prit des croquettes dans le buffet et remplit la litière du chien.

"-Tiens, voilà pour toi, gros glouton. Régale-toi. Alors, Clélia, dit-elle tout en se rasseyant et en commençant à manger, parle-moi un peu de toi. Comment ça se passait les cours ?

-Mal. Enfin, c'était intéressant, se reprit-elle. Mais je n'étais pas très... investie.

-C'est ce que j'ai cru comprendre, rigola Sibylle. Et tes amis ?

-J'en ai pas.

-On a tous un ami quelque part. On ne s'en rend pas forcément compte, mais il existe toujours quelqu'un prêt à mettre sa vie en péril pour sauver la nôtre. Mais généralement, on ne pense jamais à cette personne en particulier.

-Je ne pense pas qu'il existe quelqu'un prêt à crever à ma place, répliqua Clélia en regardant son assiette.

-Je suis sûre que si. Je pense que tu te sous-estimes beaucoup, Clélia."

Le Cercle des Douze DisciplesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant