Chapitre 6 : Apocalypse.

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Tout ce que je redoutais s'était déjà produit : les Combattants avaient envahi le centre-ville dans sa totalité.

Le dos plaqué contre un mur, j'observais la patrouille de Combattants qui surveillaient l'entrée principale du Ministère.

Ces androïdes très modernes avaient été entièrement conçus pour garder notre cité, et par conséquent disposaient aussi de toutes les capacités requises pour massacrer sans pitié.

Certes ils avaient une apparence humaine avec leur peau synthétique mais je ne m'y trompais pas : leurs yeux, leurs gestes, et leurs voix étaient artificiels.

Ils imitaient les sentiments humains mais ne ressentaient rien.

Ni remord, ni tristesse, ni douleur.

C'est ce qui les rendait si dangereux.

Ils étaient armés de Lanceurs, comme moi. Mais portaient une armure en titane ou en acier.

Je n'avais aucune protection, contrairement à eux.

Je ne devais pas prendre de risques inutiles, il fallait faire preuve de ruse.

Je regardais mon fils qui plaquait ses mains sur sa bouche pour s'empêcher de faire le moindre bruit. Je cherchais désespérément une solution dans le fond de son regard, dans le bleu de ses yeux.

Ethan leva la tête vers moi et me décocha un sourire triomphateur.

-"Papa n'aime pas les journalistes. Il passe tout le temps par la porte de derrière." Déclara Ethan d'une voix fluette.

J'en restais sans voix. Je savais que mon fils, grâce à sa différence qui était aussi sa plus grande force, était plus intelligent que les autres enfants, mais chaque fois qu'il montrait sa vivacité d'esprit hors du commun, il me laissait muette de stupeur.

Nous nous faufilâmes le plus discrètement possible jusqu'à la porte de derrière. Les Combattants ne nous détectèrent pas.

Mais ce fut la déception quand je constatai qu'un cadenas à carte magnétique verrouillait la lourde porte blindée. Je me tournais vers Ethan, consciente que nous étions bloqués.

Mon fils secoua lentement la tête, cherchant une solution.

-"Papa dit souvent que ces vieux systèmes de sécurité ne résistent pas à la chaleur." Me dit-il en souriant.

Je regardais mon Lanceur. La solution était entre mes mains.

Mais la détonation allait certainement alerter les Combattants aux alentours. Il fallait faire vite.

Je pris mon fils par la main et de l'autre main tendis mon arme face au cadenas. Je pris une longue respiration et pressai la détente.

Le bruit fut infernal. Mais le cadenas avait sauté.

-"INTRUS DÉTECTÉ." Firent les voix hachées des Combattants autour de nous.

Leurs têtes s'étaient tournées vers nous à un angle anormal pour un humain, et leurs armes nous pointaient.

Je poussais violemment Ethan à l'intérieur du Ministère pour le mettre à l'abri. Et je tirais sur les machines au hasard. Le laser brûlait leur fausse peau mais ne semblait pas entamer leurs muscles d'acier en dessous, ni aucun organe moteur.

Une rafale de lasers s'abattit sur la porte et autour de moi, j'esquivai.

-"TUER HUMAINE. TUER HUMAINE." Répétèrent les robots à l'unisson.

Je rouvris la porte blindée et m'engouffrais hors de cet enfer. J'entendis une nouvelle pluie de laser qui tombait sur la porte à grands bruits. Mon fils pleurait pendant que j'essayais de pousser une table en verre en travers de la porte pour la bloquer temporairement.

Les Combattants tapaient à grands coups derrière cette dernière. Je reculais, abasourdie par cet excès d'adrénaline qui circulait dans mon corps.

-"Maman... J'ai mal. Et tu saignes." Se plaignit Ethan dans mon dos.

Il avait effectivement reçu un ricochet qui lui avait égratigné profondément la joue gauche. Il saignait un peu mais était surtout brûlé par le laser qui l'avait effleuré.

Je me précipitai vers lui.

-"Tu mets ta main sur ta joue et tu ne l'enlèves pas, mon chéri. D'accord ?" Lui dis-je, affolée.

Je n'attendis pas qu'il me réponde et je le pris dans mes bras en courant. Les Combattants multipliaient les coups contre la porte, ils allaient finir par la défoncer.

Il fallait faire vite. Et trouver le bunker.

Nous arrivions dans la Salle du Conseil. Une antique télévision était allumée, des chiffres défilaient. Il me fallut quelques secondes pour comprendre de quoi il s'agissait.

C'était un décompte. Affichant le temps restant avant la bombe atomique. Avant la fin du monde.

Je posais Ethan à terre. Et une douleur fulgurante à la cuisse me paralysa sur place.

Je saignais en abondance. Un morceau de la porte blindée s'était arraché lors de la fusillade et s'était incrusté dans ma cuisse. La blessure était profonde et ne semblait pas anodine.

J'essayais tant bien que mal de me concentrer sur autre chose, et mes yeux rencontrèrent les chiffres du décompte.

L'effroi me saisit : il restait un peu moins de deux minutes pour trouver le bunker.

J'entendis un bruit puissant, comme une porte qui vient d'exploser.

Mon cœur rata un battement. J'entendais les pas pesants des Combattants qui se rapprochaient de notre position.

Ethan me regardait, avec ses petits yeux remplis de terreur et sa main sur sa joue ensanglantée.

Une intuition me criait que le bunker était sous nos pieds. Alors je virais les chaises et je me mis à pousser la table de réunion avec toutes mes forces restantes.

A bout de souffle, je retirais le tapis qui dissimulait la poignée de fer rouillée de la trappe de l'abri. Dans un cri de souffrance, je soulevais la lourde plaque de métal et hurlais à mon fils de sauter dans le trou. Il s'exécuta sans broncher.

Il restait à peine cinquante secondes sur le compteur. Je vis les Combattants débouler dans la Salle du Conseil, leurs lanceurs pointés sur nous. Avant qu'ils ne nous tirent dessus, je sautai dans le bunker, en refermant derrière moi. Je tournai la valve pour rendre hermétique l'abri antiradiation.

Ma blessure à la cuisse m'élançait.

Les Combattants griffaient la trappe que je venais de verrouiller, avides de nous tuer.

Je serrais Ethan contre moi, dernière chose qui me restait en ce monde.

-"Boum." Murmura t-il doucement.

Une explosion puissante retentit au loin, le sol trembla sous nos pieds, de la poussière tomba des murs sombres.

Puis ce fut le silence et la pénombre.

La fin de toute vie sur Terre n'avait pas fait plus de bruit.

Tout mon être hurlait. Beaucoup plus fort que n'importe quelle bombe.






Cœur de Métal.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant