- Qu'est-ce que tu voudrais pour Noël ?
M'a pitoyablement demandé mon père, trempant son croissant dans son café. Repas de famille ? Non. Peut-être que si. Papa m'a offert le déjeuner au restaurant de l'hôpital, est-ce que ça compte ?
J'ai haussé les épaules.
- Rien.
Pas la peine de te fatiguer à me trouver un cadeau, t'es même pas capable de m'offrir un peu de ton temps.
Mon père a voulu croquer dans son croissant, mais il s'est brisé avant d'avoir atteint ses lèvres pâteuses. Il a eu le réflexe de mettre sa main pour rattraper la miette imbibée mais un épais filet de café s'est échappé et a glissé le long de son menton.
Il s'est senti gêné, je m'en foutais, il me faisait juste pitié.
Rapidement il a épongé la table et s'est frotté le bas du visage, des morceaux de serviette sont restées coincées dans sa barbe.
- Tu te souviens de ce parc animalier qui a ouvert ?
Celui qui a ouvert il y a cinq ans ?
- Hm. J'ai sèchement répondu en buvant mon chocolat.
- Il faudrait que je t'y emmène.
"Il faudrait", oui. Ça fait cinq ans qu'il m'en parle.
Et cinq ans qu'il préfère boire des bières avec le voisin.
J'ai enfilé ma veste, et je me suis levée.
- Il faut que j'aille en cours. Salut.
- Passe une bonne journée.
- C'est ça.
Mes parents m'ont toujours fait pitié.
Toujours.
Entre ma mère qui pleurait devant moi et mon père, accablé et complètement impuissant qui tapotait le dos de sa femme en larmes, je ne sais pas lequel des deux me faisait le plus pitié, mais je les trouvais pitoyables.
Pitoyables.
C'est exactement le mot, douloureux, déchirant.
Mes parents sont pitoyables.
***********************************
Je me le répétais encore dans le bus qui me conduisait à l'école. Plus ça me faisait mal de me le dire, plus ça me faisait du bien. Pour vous expliquer à quel point j'étais devenue un déchet, depuis peu, j'adorais caresser l'os de ma colonne vertébrale, mes côtes, mes hanches, les sentir à même ma peau, l'angle pointu sur le point de percer ma peau, ne plus avoir ni muscle, ni graisse. Plus rien. Parce que c'était ce que je suis devenue ; rien.
J'aimais voir mes cernes gonfler, virer violet. Regarder mon poids diminuer encore plus chaque jour, mes mains trembler lorsque j'étendais mes doigts, avoir la nausée dès que j'avalais quelque chose, me gaver d'anti-dépresseurs tous les matins, ced sensations de vertiges dès que j'agite la tête.
J'aimais sentir ma santé dépérir, me lamenter sur mon sort, alors qu'au fond,
j'aimais ça.
Les gens qui me croisaient me jugeaient, se retournaient parfois, et je pouvais les entendre dire « Elle est anorexique ? », une dame s'est assise près de moi et a essayé de m'expliquer que j'étais suffisamment belle, que je n'avais pas besoin de faire un tel régime, que c'en devenait effrayant, dangereux. Je m'en foutais.
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Hello Scott /Histoire terminée ~♥/
RomantiekIl n'y a pas de populaire. Ni populaire, ni intello. Pas de capitaine de football non plus. Pas de racaille, de pouf, de paumé. Rien Il y a seulement Scott Walker, Et lui, il est spécial.