16 janvier, 15h30

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---------MARTIN------

Les notes tambourinent dans son crane.

Ça ne tourne pas rond dans son esprit. Ça raisonne mal dans sa tête.

Exaspéré, Martin envoie valdinguer ses partitions.

Les «La », les « Dos », les « Mi » roulent sur le parquet.

Trois jours qu'il essaie de composer.

Trois jours qu'il n'a pas eu de ses nouvelles.

Trois jours qu'il ne pense qu'à elle.

Fébrile, il attrape son papier à rouler et sa vieille boîte en bois.

Il incurve la feuille. Il tasse son herbe.

Où sont passées ces maudites allumettes ?

Ah, les voilà !


1er bouffée, 1er mouvement : « On se reverra ! »

Oui, mais quand ?

2eme bouffée, 1er mouvement : toujours le même ramdam*.

Quand ?

3eme bouffée, 1er mouvement .... Non ! Ça suffit !

Ça ne peut plus continuer comme ça !

Il se laisse glisser sur le sol.

Absorbé par la drogue*, il ferme les yeux.


Peu à peu, les contours de la pièce s'effacent.  Il  n'est  plus  dans  son  bel  appartement  du  quartier  Saint-Germain.   A la place, des parois de granit déchirées. Un air lourd, saturé, chargé de poussière. Des cris stridents de rapaces affamés. Il tousse. Il s'étouffe. Il suffoque. Il a chaud et il a soif. Tout autour de lui, du sable  et de la pierre. Un désert rouge. Un désert sang. Et puis, il y a cet éclair et cet immense coup de tonnerre. Un vent violent chargé d'humidité. Une pluie dense. Des gouttes grosses comme le poing. Des gouttes qui lavent les rochers. Les rouges se délient. La pierre de la falaise fond comme de la neige ocre au soleil. L'eau se teinte de vert. Le sable se transforme en fleurs. Les rochers deviennent des peupliers. Plus bas, tout en bas, de l'autre côté de la berge, assise, les jambes dans l'eau, Ophélie.

Ophélie qui ne le voit pas.

Ophélie qui s'enfonce dans les eaux.


Martin se réveille. Assis, en sueur, adossé à son sofa.

La nuit est tombée sur Paris.


OPHELIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant