17 janvier, 5H38

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RUE  RAMBUTEAU.


A cette heure matinale, les quais des métros sont déserts. Les sans abris rêvent à un autre monde et leurs chiens miséreux à une autre vie.

Ophélie monte les quelques marches. Le Centre Pompidou est encore endormi. Un courant d'air froid lui cingle le visage. Elle enfonce un peu plus le menton dans son écharpe de laine.

Avant de dépasser le kiosque, elle hésite.

Est-elle certaine de ce qu'elle fait ? Son ventre joue les cages à papillons. Elle peut sentir leurs bruissements d'ailes. Elle peut imaginer leurs couleurs vives.

En règle générale, c'est le moment qu'elle choisit pour les faire taire. Aimer et se faire aimer, oui ! Pourvu qu'il n'y ait pas d'attachement.

L'attachement est une plaie. On s'attache à ce qu'on ne peut pas apprivoiser. On s'attache à ce que l'on risque de perdre. On s'attache à quelqu'un parce qu'il peut partir. S'attacher, c'est se contraindre soi et c'est contraindre l'autre. S'attacher, ce n'est pas aimer.

Or, elle va s'attacher si elle laisse vivre les papillons.

Elle va s'attacher si elle remonte cette rue.

Elle va s'attacher si elle dépasse le Kiosque.

Elle fait demi-tours.

- Ophélie ?

La voix rauque du chanteur  résonne dans la rue assoupie.

Elle se fige.

Que faire ?

Comme à chacune de ses décisions, elle serre les mâchoires.

Martin se tient à quelques pas. Les mains enfoncées dans ses  poches, les épaules en dedans et le dos vouté. Dans l'obscurité, il n'est qu'une ombre qui s'effile. Elle ne voit pas son visage. Pourtant, elle se remémore ses traits. Des lèvres pleines. Des pommettes hautes. Des yeux cernés. De grandes mains blanches et douces.

Il lui tend les bras comme  son  père le  faisait  lorsqu'elle était enfant.

La flamme des souvenirs reflue en elle. Elle attise un plus les papillons.

N'y tenant plus, elle se serre contre lui.

Il sent le cuir, l'alcool et le tabac brun.

Elle ne pense plus. Elle a chaud. Elle est bien.

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Média : http://www.parisrues.com/rues01/paris-01-rue-rambuteau.html





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