Les bancs du tribunal sont bondés. Les gens s'entassent dans les couloirs, font pression contre les portes, grouillent jusque dans la rue, sur les marches du monument. Les flashes des journalistes se déchaînent comme autant d'étoiles éphémères explosant dans la lueur du jour. La folie s'est emparée de Londres.
Voldemort est mort depuis dix-sept jours. Depuis, le tribunal ne désemplit pas. Les Mangemorts qui ont survécu à la bataille de Poudlard sont traqués et ramenés enchaînés sur les marches du palais de justice, comme un sacrifice offert aux Londoniens sur l'autel de la vengeance. La foule les conspuent et hurlent ; ils les frappent et leur crachent dessus, jusqu'à ce que les Aurors du Ministère parviennent à les faire entrer à l'intérieur, où ils sont livrés à une forme expéditive de procès. Le baiser du Détraqueur. Pour tous.
Désigné Ministre de la Magie à titre provisoire, Kingsley Shacklebolt a décrété que ce châtiment serait banni de son mandat, dès que le conseil de guerre serait terminé. Mais pour les Mangemorts, pas de pitié. Le peuple cherche un exutoire. Le peuple veut déchaîner toute la peur, la souffrance et la haine qu'il a emmagasinées ces vingt derniers mois, à cause d'eux. Le peuple veut leur rendre cette douleur au centuple.
Alors, on juge. On capture, on enchaîne, on exécute. Des dizaines d'âmes livrées au Néant. Il n'y a pas d'avocats, pas de pardon, pas de défense. Pas même de suppliques. Les prisonniers entrent et sortent à la file indienne, interdits de prononcer un seul mot, et les noms des condamnés défilent sur la liste du bourreau.
Voldemort est mort depuis dix-sept jours, et les victimes commencent à manquer. Inexorablement, le regard du peuple se tourne vers les derniers Mangemorts restants. Ceux qui se sont cloîtrés dans leur Manoir depuis la fin de la bataille. Les derniers survivants.
Kingsley Shacklebolt tente de tempérer, d'apaiser les tensions : « Les Malefoy ont abandonné leur maître pendant la bataille ! » s'exclame-t-il. « Lucius Malefoy est peut-être coupable, mais pas sa femme, ni son fils. Ce n'est qu'un gamin ! ».
Seulement, il est dangereux pour un Premier Ministre intérimaire de tenir ce genre de propos. Et tout le monde sait que le monde sorcier a besoin de Shacklebolt. L'heure est bien trop sombre. Ils vivent une époque de transition, de basculement. L'ombre pourrait si facilement se glisser à nouveau dans ce bref interlude qui sépare la guerre de la paix. La fin d'un conflit, le début d'un nouveau. Combien d'opportunistes pourraient voir là leur chance de saisir leur heure de gloire, combien de vautours prêts à profiter du moindre moment de faiblesse, combien de fanatiques, combien de vengeurs aveuglés par leurs pertes et avides de sang ?
Non, Shacklebolt doit rester en place. Coûte que coûte, il doit se faire élire aux prochaines élections. Et ne pas mécontenter ses électeurs. Une politique de sympathie envers les Malefoy ternirait cela. Aux yeux de la plèbe qui les juge, ils ne sont plus des individus, mais rien qu'un tatouage et un nom, collés sur un bout de chair que l'on veut déchirer jusqu'à l'os.
Alors, Shacklebolt consent. Dix-neuf jours après la mort de Voldemort, une escouade d'Aurors éventre le manoir Malefoy et traîne sur le pavé leurs occupants, à demi-nus, en pleine nuit : Lucius Malefoy, déjà l'ombre de lui-même, Narcissa Malefoy, hystérique et en larmes, et Drago Malefoy, terrorisé, tremblant, mais le moins surpris de tous. On les garde prisonniers dehors dans la nuit et le froid, tandis qu'ils contemplent les hommes du Ministère passer au peigne fin leur maison, sortir tout ce qui a de la valeur, détruire leur blason et leur nom. Le procès n'a même pas eu lieu que l'autodafé commence déjà.
Au petit matin, rien ne leur est épargné. On pourrait les faire transplaner directement dans la salle d'audience, mais non. Le peuple veut du sang. Du pain et des jeux, pour la plèbe. Les Malefoy et leur fils sont traînés sur le parvis de justice et contraints de traverser une foule qui scande des promesses de mort à leur visage. Le jeune Malefoy protège son visage de ses bras. Les gens le griffent, le bousculent, lacèrent ses vêtements. Une femme agrippe les cheveux de Narcissa Malefoy et les lui coupe au ras de la peau. Du sang dégouline sur la peau laiteuse de Narcissa, et Lucius Malefoy s'arrête ; il crie. On le frappe au visage. Les Aurors font mine de s'interposer, mais prennent soin d'intervenir trop tard. Il est déjà tombé à terre et on le piétine ; on l'étouffe, alors que Narcissa retient la chemise de nuit qu'on lui arrache de force pour la dénuder aux yeux de tous. Drago court enlacer sa mère. On le retient. On le frappe dans le ventre si fort qu'une onde de douleur se propage jusqu'au creux de ses reins. Incapable de se relever, il est impuissant lorsqu'une foule excitée par l'odeur du sang balance des pavés sur sa mère en larmes, la traitant de pute et de partenaire du Mal. Drago ne résiste pas lorsque les Aurors se décident à les soustraire au lynchage. On recouvre Narcissa d'une cape et on relève Malefoy père, le nez et la lèvre fendus. On les traîne à l'intérieur du tribunal où le reste de la justice doit être rendu.
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Sunlight
FanfictionA la fin de la guerre, Drago Malefoy est condamné à l'emprisonnement. Dix ans plus tard, Harry Potter l'attend à la sortie d'Azkaban. (Attention, scènes violentes et slash multiples.)