Interlude : Premier Jour

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Attention pour ce chapitre : le rating "adulte" se justifie pleinement. Si vous êtes sensibles, c'est le moment de faire demi-tour. Étant donné la dureté du propos, je suis comme toujours curieuse et anxieuse de votre avis =)

Bonne lecture !

Natalhea

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Drago presse ses mains l'une contre l'autre. Les menottes qui lui mordent les poignets ne lui laissent guère d'autres options. De toute sa vie, jamais Drago n'aurait cru que le froid puisse se montrer aussi pénétrant. Il s'infiltre par les jointures blindées du bateau, les poursuit dans le vent qui siffle autour de la cabine, partout. Drago retient ses mains de trembler. Il s'efforce d'imputer cela à la rigueur de l'hiver, et non à la peur qui lui dévore le ventre. Il a peur, pourtant. Il serait inutile de le nier.

En face de lui, dans l'embarcation de Charon, son père laisse son regard dériver dans le vide, étranger à toute sensation. Lucius Malefoy n'a pas répondu au moindre stimulus depuis l'annonce de la sentence au tribunal, moins de vingt minutes plus tôt. Depuis, des Aurors vêtus de noir les ont jetés dans cette cage avant de les balancer à la mer, direction Azkaban.

Drago se cramponne à la banquette métallique et retient un haut-le-cœur. Il ne peut pas voir ce qu'il se passe à l'extérieur, mais la mer est déchaînée. Comme toujours aux environs d'Azkaban. Les vagues de trois mètres de haut les font plonger et pointer du nez toutes les dix secondes, dans un manège incessant. N'y tenant plus, Drago s'étale dans un coin de la cabine et vomit. Il n'a quasiment rien à vomir. Son estomac se contracte douloureusement pour le lui faire ressentir, et ce n'est pas le mal de mer qu'il devine sur sa langue : c'est le goût de la peur. Dans cinq minutes, dix maximum, ils seront arrivés. Ils seront arrivés, et lui-même ne repartira plus avant dix longues années.

Drago ferme les yeux, tente d'oublier cette vérité implacable qui lui tombe dessus, qui l'écrase, détruit son avenir et sa vie, mais il n'y parvient pas. Un nouveau remous le projette à terre dans sa propre bile, et il se rattrape à son père dans l'espoir de le faire réagir :

– Père ! articule-t-il, les lèvres sèches, submergé par l'odeur de sel et de poisson pourri qui règne à bord. Père, je vous en prie ! Il faut que vous réagissiez !

Mais Lucius Malefoy regarde à travers lui, comme s'il était transparent. Il n'a pas conscience de se trouver dans le même espace que lui. Il ne sait même pas où il est.

Eperdu, Drago fixe la porte lorsqu'on vient les tirer de leur prison maritime. Deux hommes en uniforme gris, matraque à la ceinture, bâtis comme des minotaures, les considèrent d'un air circonspect tandis que Charon arrime le bateau à l'unique ponton délabré d'Azkaban.

– Sortez de là, ordonne le premier homme.

Lucius Malefoy se lève et obéit sans protester. Il ne regarde personne. Drago songe que ce n'est pas son premier séjour à Azkaban, et quelque chose en lui se serre d'inquiétude. A l'époque où son père avait été emprisonné à Azkaban, les Mangemorts en étaient encore les maîtres. A présent, Lucius et lui seront les seuls partisans de Lord Voldemort en vie entre ces murs...

– Dépêche-toi ! crie le deuxième homme en frappant du poing contre l'embrasure métallique.

Drago sursaute violemment. Son costume imprégné de sel craque lorsqu'il se lève pour sortir à son tour sur le ponton. On l'immobilise aussitôt pour une première inspection. Drago, lui, observe l'île. C'est encore pire que tout ce qu'il avait imaginé.

Azkaban est un ilôt de pierre et de désolation perdu au beau milieu de la mer du Nord, à quelques encablures de la côte écossaise. Plantée là comme le fléau des dieux lui-même, la forteresse se dresse, noire, lisse, impénétrable, une gigantesque tour sans le moindre relief, engluée par des générations de lichens ruisselants et d'algues parasites. Aucune fenêtre pour observer les nouveaux venus sur le débarcadère, aucune porte autre que le pont-levis qu'on leur fait franchir au pas de course sous la pluie battante.

SunlightOù les histoires vivent. Découvrez maintenant