Il fallu une petite minute pour que la salle se vide entièrement. Soudain, comme si c'était une évidence, Noah comprit pourquoi son professeur la retenait. Il la regardait intensément, une pointe de défi dans le regard, un sourcil arqué, ayant hâte de finir son "jeu". Personne n'avait levé la voix pendant une bonne minute, qui leur paru interminable. L'homme finit par parler le premier.
"Holmes. Ravi de vous avoir comme élève, Miss?
-Leblanc, Noah Leblanc" dit elle avec un léger rictus. Cet homme avait pu décrire une bonne partie de sa vie mais avait été incapable de trouver son nom pourtant facile, étant la seule d'origine française. "Qu'avez vous trouvé de plus sur moi?"
Holmes la dévisagea quelques secondes. Elle savait pourquoi il voulait lui parler. Quand elle avait posé sa question, un sourire en coin s'était emparé de ses lèvres. Il n'en revenait pas, elle serait une élève parfaite, déjà très perspicace.
"Vous fumez... occasionnellement mais plus souvent ces derniers temps, vous vous êtes mariée à peine majeure, donc il y a deux ans environ. Il a été ignoble avec vous. Vous avez divorcé rapidement. Joli tatouage, et désolé pour ce qu'il représente.
-Merci d'avoir gardé cette partie pour vous. Mais il y a une petite erreur, légère mais importante.
-Vous êtes française!" S'exclama-t-il "Bon Dieu oui! Dix-huit ans! Vous vous êtes mariée à dix huit ans, pas à vingt et un! Donc vous êtes restés ensemble un peu plus longtemps. Votre deuil date d'il y a moins d'un an. C'est à ce moment là que vous êtes partie. Bon sang Sherlock! Tu aurais du y penser!" Finit-il pour lui même.
Il baissa la tête, se mettant une bonne paire de claques mentalement. Il examina d'un peu plus près la table de son élève et y ramassa l'emploi du temps. D'un oeil dubitatif, il regarda Noah. Pourquoi n'avait elle choisi que les deux matières qu'il enseignait lui-même? Il vit l'étudiante la tête baissée, une larme humidifia le papier d'un de ses cahiers et se jura d'élucider le mystère de ses cours.
Il avait ravivé en elle le souvenir de son enfant perdu, que la mort subite inexpliquée du nourrisson avait emporté. Elle s'était juré de ne plus y repenser et s'était fait tatouer les initiales du petit derrière l'oreille. Il avait du le voir quand elle avait enlevé son bonnet, passant devant lui pour s'asseoir.
Lui se remit une paire de claque. Il avait fait pleurer une Miss. Il se rendit compte qu'il devait en apprendre un peu plus sur les sentiments humains, et que son jeune âge ne facilitait pas la tâche. Du haut de ses vingt-sept ans il osa briser ce silence étouffant.
"Hum, désolé Miss Leblanc, je... je ne voulais pas... j'ai mis ma fierté personnelle en avant et j'ai oublié que vous aviez vécu une période assez difficile que vous auriez probablement voulu oublier. Je..." il eut comme un éclair " il faut aller faire soigner votre cheville! Je vous emmène chez un médecin! Allez! Allez!"
Sans qu'aucun n'ajoute un mot, elle rangea ses affaires et allait mettre ses Dr Martens quand il l'en empêcha.
"Croyez moi, si vous enlever votre patin vous aurez du mal à remettre le pied dans une chaussure."
Elle l'écouta perplexe et il partirent tous deux. À sa plus grande surprise, il s'arrêtèrent devant le bureau d'un professeur. Holmes toqua une fois et ouvrir la porte dans la foulée, sans attendre de réponse. À la grande stupeur de la jeune femme, elle se tenait devant de docteur Watson qui la toisa de toute sa hauteur. Puis il regarda son collègue et ami l'oeil interrogateur. Après quelques brèves explications et une rapide auscultation de la grande blessée il s'avéra qu'il n'y avait qu'une entorse et qu'elle pourrait continuer à utiliser ses patins à condition de garder sa cheville bandée et de ne pas forcer dessus. Ayant finit sa journée, Noah reparti chez elle. En rentrant, elle remarqua qu'une bicyclette neuve était posée dans le hall de l'immeuble.
L'étudiante était couchée depuis une bonne heure, sans pour autant dormir, quand un morceau de violon se fit entendre dans tout son appartement. Elle vérifia plusieurs fois, mais son portable était éteint. Ce devait être le "voisin bruyant" dont avait parlé madame Hudson. Elle savoura la musique, magnifique mais d'une tristesse sans nom. Vers la fin du morceau, des gémissements féminins se firent entendre à plusieurs reprises, de plus en plus fort. Au bout de quelques minutes, Noah se leva et enfila des chaussures et une veste, histoire de ne pas sortir en simple nuisette.
Elle dévala les escaliers et se retrouva au premier étage, lieu de débauches, et frappa trois coups secs sur la porte du 221A. Personne ne vint et elle allait recommencer quand un bras, sortit de nulle part, frappa une seule fois. Le coup était tellement violent qu'il fit trembler la porte. Elle n'eut pas le temps de se retrouner pour voir le visage de celui qu'elle savait être le "voisin bruyant" que la porte s'ouvrit sur le docteur Watson, vêtu d'un unique caleçon, haletant et rouge. Il s'excusa, referma la porte ne laissant pas à Noah le temps d'analyser la situation.
Elle entendit les marches grincer et fit demi tour pour découvrir, très surprise, le visage de son professeur, en jean taille basse, torse nu. Ce dernier détailla à son tour son élève, en vêtements de nuit pastels, veste en cuir et boots noires. Il lui fit un clin d'oeil, lui sortit un " très joli nuisette, très rock!" avant de monter l'escalier quatre à quatre et de claquer sa porte. La française resta quelques secondes la bouche entre ouverte, les joues rougies avant de reprendre ses esprits et de remonter se coucher.
"Il savait" se dit elle "il a vu mon adresse sur mon poignet ce matin. Et Watson habite ici, c'est pour ça qu'il savait pour l'appartement libre. Et maintenant que je le dis, je n'ai pas entendu la grande porte en fer forgé d'en bas se fermer hier..."
Elle fut coupée dans ses réflexions par une nouvelle mélodie, toujours du violon, toujours aussi triste.
"Le vélo! Il est à lui! Madame Hudson est trop petite et Watson, bien que ce ne soit que dans sa tête, boite énormément. Mais il est tout neuf... il vient de l'acheter?"
Elle s'endormit, perdue dans ses pensées, grâce au doux son du violon.

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Les Voisins D'en Dessous
FanfictionJe sentis une main secouer légèrement mon épaule, une voix masculine m'appelant plusieurs fois "Miss... Miss?" Sortant de ma torpeur avec difficulté, je m'assis, en me frottant les yeux, sur ce qui me servait de lit. Je regardais l'homme en face de...