Chapitre 7 : Flamme

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-Et bien aidons les !

Un habitant du village venait de briser le silence et l'attente, et Chasseur lui en fut reconnaissant. Son pied le brûlait, et il n'avait aucune envie de s'infecter. Deux des citoyens de ce minuscule village vinrent prendre Chasseur pour l'emmener dans une petite bâtisse circulaire. Ils le posèrent sur un petit lit très dur. Les deux hommes ressortirent ensuite, pour parler à une bonne partie de la communauté. Chasseur ne pouvait les voir, mais il les entendait aisément.

-Qu'est-ce qu'on fait ? Demanda une femme.

-On devrait déjà apporter de l'eau pour le désinfecter, proposa un homme.

-Oui, rétorqua un autre homme, mais ce n'est pas parce qu'on désinfecte sa blessure qu'il va se rétablir !

-On devrait peut-être lui mettre un bandage !

-Mais avant cela, il faudrait que l'on désinfecte le bandage !

-Mon père dit qu'on se rétablit plus rapidement si la blessure respire.

-Mais une blessure ne peut pas respirer !

-Quand elle est à l'air libre, quoi !

-Au pire, si ça s'infecte, on pourra toujours couper la jambe !

Chasseur comprit alors qu'il n'était pas arrivé dans une communauté de médecins et que ces gens pleins de bonnes intentions pourraient bien mettre sa vie en danger.

Le groupe s'interrompit lorsque Féline arriva. Elle ne semblait pas avoir entendu la conversation.

-ça va Chasseur ? Demanda-t-elle.

-Non, j'ai mal, répondit le blessé.

-Ne t'en fais pas, ils vont te soigner.

Le jeune homme voulut rétorquer et expliquer à son amie ce qu'il venait d'entendre, mais un homme arriva avec un bol rempli d'une eau brune, verte, où nageaient quelques herbes.

-Voilà, c'est pour désinfecter votre blessure, de l'eau de la rivière, annonça l'homme, fier.

-Cette eau ne va-t-elle pas plutôt m'infecter ? Demanda Chasseur, inquiet.

-On dit qu'il faut mettre de l'eau sur les blessures pour les désinfecter.

-Oui, mais si l'eau est sale, cela n'enlève aucune bactérie !

-Mais non. On en a décidé ainsi avec le village.

Ni Chasseur, ni Féline n'eurent le temps de réagir lorsque l'homme versa le liquide verdâtre sur la blessure du jeune homme. Ce dernier poussa un cri de douleur, puis l'homme partit.

-Ne vous inquiétez pas, ça fait mal, mais c'est pour votre bien ! Affirma-t-il avant de disparaître.

-Cet homme est fou ! On aurait peut-être mieux fait de partir quand il était encore temps ! S'époumona le jeune aigle.

-Ne dis pas ça, Chasseur. Ces gens veulent nous aider !

-Oui, ils veulent nous aider, mais ils vont me tuer !

-Mais non, Chasseur. Tu t'en sortiras sûrement moins bien que dans un hôpital, mais tu vas quand même guérir !

-Je n'en suis pas si sûr... Ces gens sont des malades ! Tu as vu leur eau ? Est-ce qu'on va devoir boire ça ?!

-Ne bouges pas, je vais faire le tour des lieux, voir si il n'y a pas un puits, ou quelqu'un qui s'y connaît un peu mieux.

Et la jeune femme partit laissant le jeune homme seul avec ses craintes et ses douleurs. Féline traversa le village, passant devant des enfants, des hommes et des femmes qui semblaient être très pauvres, mais néanmoins heureux. Lorsqu'elle atteint la rivière, elle comprit la raison de cette couleur. La rivière était presque à sec. L'unique rivière de ce désert ne serait bientôt plus que du sable imbibé d'eau. L'unique endroit de ce village où de la végétation poussait. Féline regarda au loin et vit, accolée à la rivière, une somptueuse maison, entourée de palissades. On pouvait néanmoins voir un jardin verdoyant, ainsi que les pompes plongées dans la rivière. La jeune femme s'avança un peu, pour mieux voir cette immense maison. C'était sûrement la maison du grand homme qui les avaient laissés aux soins du peuple.

-Il est comme moi, c'est un voleur. Sauf que moi, je vole la richesse, lui, il vole la santé et la vie.

-Vous ne devriez pas rester là.

Féline se retourna et vit une jeune renarde.

-Si le Maître vous voit, il se fâchera et nous subiront tous une punition.

-C'est le « Maître » qui habite là bas ?

-Oui. J'aimerais bien avoir la même maison que lui.

-C'est lui qui prend l'eau de la rivière...

-Oui. Elle est presque à sec. Mais on ne eut rien faire contre le Maître. Tout ce qu'on a, c'est à lui ! Nos maisons, nos champs, nos bêtes, il prend possession de tout ! Même de nos vies ! Nous sommes à lui. Et si vous ne partez pas maintenant, vous allez subir le même sort !

-Si il veut s'en prendre à moi, il faudra d'abord se battre contre moi !

-Tu sais te battre ?

-Oui, très bien. Au fait, quel est ton nom ?

-Mon nom ? Flamme. Et vous ?

-Tu sais, tu peux me tutoyer, Flamme. Moi, c'est Féline.

-Venez... Viens chez moi !

-D'accord !

Féline suivit Flamme jusqu'à sa minuscule demeure. Cette dernière l'invita à rentrer, ce qu'elle fit. Elle vit des sortes de plantes, étalées sur des rebords.

-Qu'est-ce que c'est ? Demanda Féline en désignant les herbes.

-Ça ? C'est des plantes pour guérir. Mais les autres pensent que c'est de la sorcellerie...

-Mais alors, tu pourrais guérir Chasseur !

-L'aigle ? Les autres s'en occupent !

-Les autres ne savent pas s'en occuper ! Ils vont l'empoisonner plus qu'autre chose !

-Tu veux que j'aille voir ?

-J'aimerais.

Chasseur tremblait toujours dans son lit lorsque Féline arriva, accompagnée de Flamme. Il se redressa subitement et la jeune guérisseuse vit son pied déchiqueté, ensanglanté.

-Chasseur, voici Flamme, elle pourra peut-être te soigner. Avec des plantes, elle sait faire.

Féline était un as du langage, elle le savait. Impressionner ses ennemis rien qu'en parlant, c'était son quotidien. Mais parler d'une personne à une autre sans les blesser, ce n'était pas si simple. -Elle pourra peut-être me soigner ? Comme les autres ? On ne prédit pas l'avenir. Tourner une phrase pour dire la vérité, donner de l'espoir et ne blesser personne, elle n'y arriverait jamais. -Je suis sûre que je peux vous soigner. Chasseur se laissa alors retomber dans le lit, laissant la renarde observer sa blessure. -Comment t'es tu fais ça ? Demanda-t-elle. -C'est des loups, un d'entre eux m'a mordu alors que je tentais de m'envoler. -Des loups ? Il n'y en a pas par chez nous ! -Nous étions loin, expliqua Féline. En Antarctique. Je sais où habite ma famille. Flamme sortit des herbes de son sac, et les réduisit en bouillie avec sa main. Elle les étala ensuite sur le pied du blessé, qui hurla sous le coup de la douleur. -Calme toi, Chasseur, elle te soigne, avec des herbes ! À mon avis, tu n'as rien à craindre. La renarde sortit un rouleau de son sac, un rouleau de bandage. Elle recouvrit la plaie du jeune homme avec le tissu, puis, soulagée et satisfaite, dit : -Et voilà ! La jeune renarde semblait perdre son sourire. -Vous pouvez désormais repartir, dit-elle. -Tu ne veux pas venir avec nous, proposa Féline. -Je ne peux pas, le Maître punirait les autres... -Et bien, Flamme, je te jure que nous reviendrons te chercher. Il me faudrait juste savoir où tu te trouve, exactement. -Ce désert s'appelle Manial. Vous nous retrouverez facilement.

Chasseur et Féline prirent ainsi leur envol du désert Manial.


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