Quartier de l'Opera

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24 Juin 2016

- Encore merci Jonathan pour la semaine dernière.
Assis à la terrasse du café de la Paix, j'avais donné rendez-vous à Claire sur le coup de 19h00, dans le quartier de l'Opéra.
"si si j'insiste, votre quartier sera le mien pour boire un verre » m'avait-elle dit la veille au téléphone. Elle souhaitait me revoir pour me remercier. J'avais donc choisi ce quartier, non loin de mon bureau pour ne pas risquer d'être en retard, ma réunion du jour se terminant peu avant.

En cette journée estivale, il faisait chaud. Les touristes affluaient et les cars se succédaient pour débarquer des hordes de japonais prêts à tout pour se faire photographier devant le perron de l'académie de musique.
J'aimais bien le Café de la Paix, outre son décor intérieur somptueux, il offrait une vue imprenable sur la place de l'opéra. D'ailleurs nous nous y rendions fréquemment avec quelques collègues pour y fêter nos victoires d'un jour. Notre prodigalité n'avait parfois aucune limite.

Je sirotai ma bière, la tête un peu dans les nuages, en ressassant, malgré moi, ma journée quelque peu houleuse. Claire, un jus d'orange frais à la main, était souriante. Elle portait la même robe blanche aperçue sur le parking.
- Vous savez Jonathan, vous n'aviez pas besoin de m'emmener ici pour m'impressionner.
Je reconnu son regard bleu acier me transpercer.
- Pourquoi dites vous ça ?
- Disons que je n'ai pas l'habitude de côtoyer ce genre d'endroit.
- Et bien, il faut un début à tout.
Sur le ton de la confidence, elle ajouta :
- Entre nous, vous savez, j'ai d'autres priorités dans la vie. Mais ceci-dit, l'endroit est charmant. Donc trinquons et profitons du moment présent.
- Je suis heureux que ma mère ait pu vous dépanner.
- Elle a été charmante, vous avez beaucoup de chance d'avoir une maman comme ça.
- C'est vrai vous avez raison. Au fait pour votre voiture, quel est le diagnostic ?
- Panne d'alternateur. Je n'ai aucune idée de ce que c'est ! Mais après quinze ans et 150 000km, le garagiste dit que c'est normal, donc pas d'autres choix que de le croire.
- Que faisiez-vous dans cette clinique ?demandais-je.
- Et bien j'ai une amie hospitalisée depuis maintenant trois semaines, pour un accident de voiture. La convalescence est longue, alors je lui rends visite régulièrement.

Nous passâmes un agréable moment ensemble à discuter de nos parcours respectifs.
Claire et moi avions quasiment le même âge, elle avait 30 ans et habitait la banlieue sud, dans l'Essonne. Elle était vendeuse dans une boutique de prêt à porter et habitait un deux pièces non loin de son travail.
Elle avait fait preuve de beaucoup d'opiniâtreté depuis son jeune âge. Orpheline dès l'âge de douze ans, elle avait été placée dans une institution. Un Bac Pro esthétique en poche, de petit boulot en petit boulot, elle avait intégré une petite boutique dans le centre-ville et depuis maintenant deux ans elle était conseillère en robes de mariée. Un rêve de gamine. Son plus grand plaisir était de vendre du rêve. Le premier essayage était pour elle quelque chose de magique. Contempler le regard plein de bonheur d'une cliente, la comblait, selon ses termes. C'était un remède aux tracas quotidien et à ce monde si brutal qui nous entourait. En l'écoutant j'étais étonné par l'optimisme de cette jeune femme, au parcours personnel pourtant difficile.
- Comment va votre père Jonathan ?
- Son état est toujours stationnaire. Mais j'avoue ne pas être optimiste.
Je ne crois pas vraiment aux coïncidences, mais il y a parfois des choses troublantes.
Au même moment mon téléphone sonna.
C'était ma mère. En larme.
Je compris, en un instant, pourquoi.

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