22 septembre 2016
Trois jours étaient passés.
Absorbé par un appel d'offre qui nous impliquaient tous très fortement avec mon équipe, je ne repensais pas aux évènements du début de semaine. La réalité allait rapidement me rattraper.
Mon téléphone sonna un jeudi matin.
- Allo Jonathan ?
C'était ma mère.
- Oui maman, comment va tu ?
- Et bien, je suis sous le choc, ma voisine est décédée.
- Comment ça ?
- Tu sais, la voisine du second, celle qui me faisait les courses. Je t'en ai parlé quand tu m'a contacté l'autre soir.
Je me remémorai notre conversation.
- Je te disais, ce soir-là, que je ne n'étais pas en grande forme, et quelle me faisait mes courses tous les jours en même temps que les siennes. Bon. Ce matin, allant mieux et jugeant que marcher un peu me ferait le plus grand bien, je décidai de me forcer un peu pour aller à la Boulangerie située à deux pâtés de maison. Et là, Impossible de retrouver ma clé au moment de fermer ma porte ! Là-dessus, ma voisine, me voyant sur le palier en train de jurer, me proposa d'y aller à sa place. Je n'ai pas refusé évidement, mais ne la voyant pas revenir une heure après, je me suis inquiété. J'ai appelé sur son portable et une personne a décroché à sa place, m'apprenant qu'elle avait été renversée par une voiture en traversant. C'était un témoin de la scène.
Ma mère était en larme.
- Ça aurait dû être moi à sa place. J'aurai emprunté exactement le même trajet tu entends ? Le même ! Il parait que le conducteur n'a même pas freiné. Il ne l'a pas vu. Il tapotait un texto sur son portable.
- Je restai figé. D'ordinaire j'aurai attribué cet évènement à une simple coïncidence, au manque de chance. Mais là, c'était différent. C'était comme si elle été passée entre les gouttes d'eau.
- Reste chez toi, ne bouge pas, je te rappelle d'ici ce soir.
J'avais un coup de fil urgent à passer.- Je t'écoute, reprenons notre conversation de la dernière fois.
Il était 19h30, j'avais demandé à Claire de venir chez moi le soir même. Nous étions assis tous deux dans le canapé du salon.
- Ma mère a failli passer l'arme à gauche, c'est sa voisine qui est morte à sa place.
- Je sais
- Comment ça tu sais ?
- Chacun de nous a un destin, auquel nous ne pouvons échapper. Je t'ai averti, rappelle toi.
- C'est quoi ces conneries ?
Je me repris.
- Excuse-moi. Mais pour un esprit cartésien comme le mien, j'ai un peu de mal.
- Je comprends ta réaction.
- Qui est tu Claire, dis-moi.
- Je suis vendeuse dans une boutique de prêt à porter, jusqu'ici je t'ai dit la vérité. Après, quand j'ai dit que j'étais ton ange gardien, en réalité je suis médium.
- Un médium ? C'est quoi ça ? Tu parles avec les morts ?
- Un médium est une personne sensible à des phénomènes que tu ne peux pas percevoir avec tes cinq sens. Je perçois des manifestations de ce que l'on pourrait appeler « l'au-delà ». Donc oui, on peut dire que j'ai le don de communiquer avec les morts. Ils m'utilisent comme vecteur de leur ultime volonté. Après une fois le boulot réalisé, ils sont censés accéder à la sérénité si je puis dire, et je n'entends plus parler d'eux.
- Mais dans mon cas, avec qui as-tu eu un contact ?
- Ton père.
Je restai sans voix. Ça dépassait ma raison.
- Mon père ? Je ne comprends pas. Tu as parlé avec mon père ? Comment ? Quand ?
- J'étais à l'hôpital au même moment que toi. Ton père est rentré en contact avec moi. J'ai pu faire le rapprochement car il m'a indiqué ton prénom. Et J'ai entendu par chance ta mère t'interpeler dans le couloir, ce qui m'a permis de te localiser, si je puis dire.
- Mais mon père n'était pas mort, au moment où je t'ai croisé à la cafétéria.
- J'avoue effectivement que c'est bizarre, car le coma n'est pas la mort. Cependant je pense que nous ne savons pas tout dans ce domaine. Il a dû vivre ce que l'on appelle une EMI, une Expérience de Mort Imminente. Il a dû rentrer en contact avec moi à ce moment là.
- Que t'a t-il dit précisément ?
- J'ai compris qu'il avait quelque chose à se faire pardonner. C'était en rapport avec l'argent, j'ai senti qu'il avait besoin de prouver son amour.
C'était hallucinant. Tout était plausible dans ses propos.
- Comment ?
- En vous protégeant toi et ta mère.
- Rien ne prouve que tu n'aies pas entendu une conversation avec ma mère. Il te suffisait ensuite de te faire passer un médium.
- C'est vrai, je ne peux pas te le prouver. Mais il y a autre chose que t'on père m'a dit, la phrase suivante « l'amour est plus fort que tout ». Dis-moi si j'ai pu l'inventer ? Si c'est le cas tu n'auras jamais confiance en moi et je préfère arrêter notre discussion tout de suite et m'en aller.
Je réfléchis un instant. C'est la phrase prononcée par ma mère sur le parking de la Clinique. Claire n'a pas pu entendre.
- Non effectivement, tu n'as pas pu l'inventer.
- Mais toutes ces semaines passées, notre rencontre, nos sorties, c'était du bidon ? Un stratagème pour m'annoncer ça ?
Elle rougit.
- Au début je ne savais pas comment t'aborder. Je ne pouvais débarquer comme ça et te dire «salut, j'ai un message de votre père décédée ». Ma voiture est vraiment tombée en panne, il y avait deux personnes sur le parking, et bien sûr c'est vers toi que je suis allé. Pour la suite, nous nous sommes revus, et je n'ai pas jamais trouvé le bon moment pour le placer dans une conversation. J'ai appris à mieux te connaître, et j'ai jugé, vu ton esprit cartésien et peu enclin à ces choses, que je ne devais pas me précipiter. Et j'ai bien fait. La preuve notre dernier repas la semaine dernière, c'était déjà très limite, tu es parti sur le champ, rappel toi.
- C'est le coup de l'ange gardien, je n'ai pas pu.
- Effectivement, si c'était à refaire, je le ferai différemment. Mais sache que tout ceci n'enlève rien à toutes les sorties agréables que nous avons fait ensemble. Et, pour être honnête, je me sentais bien à tes côtés.
Elle se mit à rougir, détournant son regard du miens.
Pour ma part, j'étais peu enclin au sentimentalisme, je cherchais à comprendre la situation.
- L'incident qu'a vécu ma mère est-il lié à tout cela ?
- Je pense que oui. Comme je te l'ai dit chacun de nous a une destinée. Visiblement ta mère était censée mourir aujourd'hui en allant chercher du pain. Elle a déjoué les plans de la faucheuse, en quelque sorte.
- Alors nous n'avons pas de libre arbitre ? Tout est écrit à l'avance ?
- Je ne sais pas te répondre Jonathan. Je suis mortel comme toi, et simple messager avec l'au-delà. C'est un sujet complexe à comprendre, à accepter et qui structure notre existence. Connais-tu la fameuse phrase d'Albert Camus à ce sujet ? « .. ou nous ne sommes pas libres et Dieu-tout-puissant est responsable du mal. Ou nous sommes libre et responsable, mais Dieu n'est pas tout-puissant ». En tout cas ton père m'a dit que vous courriez tous les deux un grave danger. L'incident de ce matin semble le prouver. Ta mère a eu beaucoup de chance de ne pas retrouver ses clés à cet instant.
- T'a-t-il dit à quelle échéance ?
- La semaine dernière si je t'ai demandé de me contacter pour nous voir le soir même, c'est qu'en réalité j'étais rentré de nouveau en contact avec lui. Pour être précis c'est lui qui m'a recontacté.
Je sentis un frisson me parcourir le dos.
- Et c'est là qu'il m'a indiqué deux dates où toi et ta mère allaient être en danger de mort. C'est la première fois que j'ai ce genre de message de la part des défunts.
- Et quelle sont ces dates ?
- Le message n'était pas très net mais il m'a répété plusieurs fois deux dates, « 22 et 25 septembre ». Mais je ne sais pas si toi et ta mère êtes visés ensemble, la communication a été interrompue.
- Le 22 c'est aujourd'hui, la voisine est morte à sa place ! Et ça n'était pas prévu comme ça, bien sûr. Donc cette date est maintenant dernière nous, si je puis dire.
- Faux ! Il est - elle regarda sa montre - 20h05, et la journée n'est pas terminée. Je ne sais pas si tu étais concerné par ces deux dates. Donc si vous arrivez sain sauf à minuit, cela veut dire deux choses : primo que ta mère sera définitivement hors danger puisque son heure est déjà passée, deuzio ..
Je l'interrompis - Que la date du 25 ne concerne que moi.
Elle acquiesça, l'air sombre
- Et c'est dans trois jours.
Livide, j'ajoutai
- Dans trois jours je vais mourir.
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Bleu acier
AcciónJonathan Bertin a 32 ans. Jeune salarié dans une start-up il a tout pour réussir. L'argent, les filles, les motos, il profite de la vie. Jusqu'à ce qu'on lui apprenne que dans 3 jours, il mourra. Le chrono est déclenché, il a 3 jours pour changer so...