19 Septembre 2016
- Revois ta copie Franck, tu ne peux pas te pointer devant un client avec une proposition commerciale comme celle-ci, à 20% plus chère que nos concurrents directs.
- Désolé pas d'accord avec toi Jonathan, c'est justement la proposition qui est différente car elle offre plus de services que les autres.
- Es-tu au moins sûr de la valeur ajoutée de tes services ? Le client est-il prêt à payer la différence ? s'il te plait fait ce que je te dit, revois ton offre, je veux la voir demain matin sur mon bureau !
Ce lundi matin avait démarré sur les chapeaux de roue. J'étais enfermé avec trois de mes commerciaux depuis plus de deux heures. Malgré l'automne qui pointait son nez, l'été indien rendait l'atmosphère suffoquant dans cette salle de réunion mal climatisée.Depuis la mort de mon père, les choses avaient quelque peu changées, ma mère et moi étions éloignés. Pas vraiment fâchés mais j'avais besoin de prendre du recul et réfléchir, sur moi-même et mes choix. En clair j'étais un peu paumé. « Fais la paix avec toi-même » avait dit ma mère. Mais de quoi parlait-elle ? J'avais construit ma vie sans rien demander à personne, à bout de bras, comme mon père d'ailleurs. Avec le recul c'est peut-être le seul point commun que nous ayons eu. Il ne rechignait pas à la tâche, je pouvais lui accorder un bon point.
J'avais fait un break estival au mois d'août pour me ressourcer de mes excès professionnels et personnels, avec deux semaines dans le sud de la France, seul. J'avais déniché un Hôtel sympa sur Booking.
Quant à claire, nous étions devenus amis. Nous sortions de temps à autre ensemble à Paris, nous balader sur les quais, nous faire une toile ou du lèche vitrines dans une rue commerçante. Elle était curieuse de tout. Paris était ma passion et j'adorais lui faire découvrir tous ces endroits un peu atypique, d'une ruelle cachée au détour d'un faubourg, à la place du Tertre bondée de touristes. Nous marchions, souvent en silence, mais ce silence n'était jamais pesant. Les allers-retours Paris Rouen n'avaient plus lieu d'être, son amie hospitalisée était maintenant hors de danger.
J'étais donc déjà en sueur ce lundi matin, en train de me battre avec mon équipe sur un sujet épineux à souhait. Une pause, bien méritée me fut imposée par l'arrivé d'un Texto.
" Rappelle-moi, stp, Claire "
Je sortis de la salle pour m'installer dans mon bureau nettement plus respirable. Je pris quelques minutes pour la recontacter.
- Allo Claire, c'est Jonathan, tout va bien ? Tu voulais me joindre ?
- Oui, merci tout va bien. Es-tu disponible ce soir ? Il fait beau et je me disais que nous pourrions nous retrouver. Connais-tu le parc Montsouris ?
- Oui, bien sur.
- Et bien donnons-nous rendez-vous là-bas à 19h.
- Parfait, alors à ce soir !
- À ce soir Jonathan.J'arrivai peu avant 19h, elle était déjà là, le visage fermé. Elle portait sa robe blanche. Cette fois je le lui fis remarquer.
- C'est vrai le blanc est ma couleur favorite, sans doute une déformation professionnelle !
- Vendeuse de robe de mariée, c'est vrai !
J'avais faim, nous recherchâmes un coin pour grignoter. Attablés à la terrasse d'un café non loin du parc, je dégustai un croque-monsieur avec appétit. Claire m'accompagnait d'un simple café latté en me dévisageant de son regard bleu acier.La nuit commençait à tomber. Je ne sais pas si c'était l'effet du vin blanc qui accompagnait mon croque ou le reliquat de mes turpitudes de mes nuits précédentes, mais je me sentais bien et en confiance totale avec elle.
- Jonathan, je voudrais te parler.
Le ton employé tranchait avec la Claire que j'avais connu jusqu'à maintenant. J'avais presque du mal à finir ma bouchée.
- Je t'écoute.
- En fait Je suis là pour t'aider.
- C'est très gentil, mais à quoi ?
- À te protéger toi et ta mère. Vous êtes en danger.
- Précise rapidement s'il te plait Claire, je ne te suis pas, et tu commences à me faire flipper.
Impassible, Claire me fixait, accoudée à la table. Autour de nous le café était désert. J'étais soudain mal à l'aise.
Elle répéta calmement et lentement en détachant presque chaque syllabe.
- Vous êtes en danger ta mère et toi. En danger de mort.
Je faillis tomber de ma chaise.
- Mais qui est tu Claire ? Tu me fait vraiment flipper là !
Je la sentis hésiter.
- Je suis une sorte d'ange gardien.
Je me levai brusquement. Ou était la fille que j'avais connue depuis plusieurs semaines. J'avais un imposteur face à moi.
- Assied toi s'il te plait Jonathan, ce que j'ai à te dire est très sérieux.
- Mais comment peux-tu dire cela ? Sérieux ? Tu te pointe dans ma vie, nous devenons amis, et du jour au lendemain, tu m'annonces que ma mère et moi courons un très grave danger ! Que tu es un ange gardien en plus ! C'est de la science-fiction ton truc ou quoi ? Je te préviens avec moi ça ne marchera pas comme ça.
- Je sais, c'est difficile à croire, il faut que tu m'écoutes, j'ai des choses importantes à te dire.
C'en était trop, je ne pouvais pas en entendre d'avantage, je décidai de déguerpir, la laissant seule dans ce café.Sur le trajet du retour, je ressassai sous mon casque les propos de Claire, cette fille débarquant de la planète Mars.
Ne pouvant m'en empêcher, je me rangeai sur le bas côté et appela ma mère. Une sonnerie, deux sonneries, ça ne répondait pas. Il était 22h30, pas normal. Alors que je m'apprêtai à raccrocher, j'entendis le déclic caractéristique.
- Allo, fit-elle avec un ton inquiet, qui est à l'appareil ?
- Allo maman, c'est Jonathan, est ce que tout va bien ?
- Euh, oui oui, je suis juste un peu surpris de recevoir un coup de fil à cette heure-ci. Surtout venant de toi qui m'appelle très peu en ce moment.
- Tu es sûr que tout va bien, rien de particuliers ?
- Non, tout va bien, mais pourquoi me poses-tu cette question ?
- Pour rien, je te laisse, bonne nuit maman.
- Bonne nuit Jonathan.
Avant de raccrocher
- Maman ?
- Oui
- Ferme bien ta porte à double tour.
- C'est déjà fait.
- Et s'il te plait fait très attention à toi.
- Si ça peut te rassurer, je sors très peu en ce moment, je me sens un peu patraque, c'est ma voisine qui fait mes courses.
Je restai quelques minutes immobile. Je ne croyais pas à toutes ces histoires grotesques. Mais j'étais inquiet pour ma mère. Après tout je ne connaissais cette fille que de depuis quelques semaines, et je ne savais pas de quoi elle était capable finalement.
Mon portable bipa plusieurs fois, Claire voulait absolument que je la rappelle.De retour chez moi ma nuit fut très agitée, je ressassai en boucle ma soirée, et, pour autant, je ne savais pas à quoi m'en tenir. Et si elle avait raison ? Mais dans ce cas comment pouvait-elle savoir ?
Le matin Claire m'avait laissé un texto
« Jonathan rappelle-moi vite ».
Je décidai de ne plus prêter attention à cette fille, j'avais, au fond de moi, l'intuition qu'elle ne m'attirerait que des emmerdes.
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Bleu acier
AzioneJonathan Bertin a 32 ans. Jeune salarié dans une start-up il a tout pour réussir. L'argent, les filles, les motos, il profite de la vie. Jusqu'à ce qu'on lui apprenne que dans 3 jours, il mourra. Le chrono est déclenché, il a 3 jours pour changer so...