Novembre 2015: Partie 1

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         La suite de mon voyage au pays de Shakespeare c'est un peu mieux déroulé, nous avons passé le reste du séjour dans le Savoy à Londres pour une visite de la capitale britannique en amoureux, bon il y avait toute la famille mais on préféraient rester rien qu'à deux, on déambulait dans Trafalgar Square, on observait toute la ville dans le London Eye, on posait devant Big Ben, Tower Bridge, on faisait une séance shopping dans Harrods et forcément arrêt devant Buckingham Palace. Malgré ce cadre idyllique, des désaccords, des coups de gueules apparaissaient.  Je commençais à regretter d'y être allé, que tout entre nous c'était passé trop vite.
         Les cours avaient déjà repris depuis une semaine et je me retrouvais en allemand à côté de Louis, comme d'habitude le prof n'avait aucune autorité jusqu'à ce qu'il parle du voyage en Allemagne pour Décembre. Tout à coup on passait niveau sonore d'un réacteur d'avion à une bibliothèque universitaire. Le prof nous annonçait la destination: Berlin. Il voulait que par groupe de 2, nous présentions un monument de la ville une fois là bas. Petite précision, les groupes étaient imposés. Forcément la bonne blague aurait été que je me retrouve avec la peste... Il faudrait que je la ferme plus souvent. Quand le prof a annoncé mon nom et Piotr, je m'étais littéralement décomposé et j'avais fini à moitié sous la table en me faisant lynché par Louis. Il y avait eu quoi ? Un alignement des planètes ? Un rite satanique pour me maudire ? Un complot Reptilo-illuminatie des franc-maçons ? Ça s'annonçai vachement sympas. Bon au moins je n'étais pas avec un boulet, comme partout il avait des bonnes notes dans la langue de Goethe. Pour une fois il fallait que j'aille vers lui, ça me réjouissais pas beaucoup mais bon. Il rangeait ses affaires quand j'engageai la conversation:" salut, pour le travail qu'on doit faire ensemble,  on pourrait pas le faire ce week-end ? En tout cas le commencer ?" Il releva la tête en mode je m'en bas les couilles, souffla un bon coup et dit "euh... Ouais, tu peux venir chez moi si tu veux, dimanche 14h ?

-oui c'est super.

-il y a quelque chose qui ne va pas ?

-non, c'est juste que je suis un peu surpris.

-surpris pourquoi ?

-on va pas se le cacher, on s'apprécie pas beaucoup, et là tu m'invites chez toi.

-c'est parce que je veux que les choses soient bien faite." Puis il sortit de la salle en me laissant sur le carreau. Bon pour l'instant on ne s'était pas encore entre tué. Le reste de la journée était passé rapidement. Toujours des fous rire avec les fulgurances de Antoine, les questions connes de Lisa et mes maladresses, ont avait de quoi pour s'occuper.
         Le soir même, je sentis le besoin de faire des longueurs. Au mois de Novembre, c'était limite suicidaire, l'eau était glacée, ma peau était devenue rouge. Je donnais tout ce que j'avais, ma détermination me permettais de tenir dans cette mer insupportable mais ce qui me faisait vraiment avancer c'était ma colère au fond de moi. La pression que me mettait mes parents pour mon avenir, les sautes d'humeurs de Ambre mais le pire c'est qu'après notre escapade à Londres, je pensais que nos désaccords allaient se calmer mais au contraire elles se faisaient plus fréquente, je reprochais son rapprochement avec Ethan, j'avais peur d'être finalement qu'une relation sparadrap, mais elle cherchait à me convaincre du contraire. Peut être que la distance était trop pesante ? Elle me reprochait mon manque d'implication dans notre relation, que c'était toujours à elle de m'appeler, que ça fait longtemps qu'on ne s'était plus envoyé de lettre. Ça devenait compliqué mais à chaque fois on recollait les morceaux.
Je retournais à l'hôtel après mon défoulement, frigorifié par la brise de la mer. Le royal était très calme ces temps-ci, il faut dire que la météo était pas top, il ne pleuvait pas mais c'était gris, Patrick ne me croyait pas que j'avais piqué une tête, par un temps pareil. Je me dirigeai vers l'ascenseur quand Patrick m'interpella. Apparement j'avais reçu une lettre. Je la saisis et répartis dans la cage en fer, je profitai du court trajet pour l'examiner. Postée en Angleterre, sûrement un coup de ma chérie.
Après une douche chaude pour me réchauffer, je l'installai au bureau pour faire mes devoirs mais d'abord il me fallait élucider le mystère de la lettre. Elle disait "Mon amour,
Ici sans toi, je ne vais pas bien, je regarde en boucle nos photos, je porte ton pendentif tous les jours, ton tee-shirt avec ton parfum est devenu mon doudou mais tu me manques beaucoup trop. Je pleure alors que j'écris cette lettre. Je t'aime, tu ne peux pas savoir à quel point et ça me fait mal quand je me dispute avec toi. Ces temps ci, tu vois des photos de moi et de Ethan parce que sa famille est venu plusieurs fois chez moi et oui je l'aime bien mais mes sentiments amoureux sont définitivement mort, je peux te l'assurer, fais moi confiance. Je comprends que pour toi aussi cette situation est compliquée, c'est pour ça que je t'envoie ce bracelet" je regardai plus en détail l'enveloppe et y trouvai un bracelet de Tom Hope. L'encre était argenté, le cordage en bleu et les points d'attache rouge. Je repris ma lecture:" il ira bien avec ta Daniel Wellington argentée, c'est con mais j'aime bien la métaphore du marin partit en mer, sache que je t'attendrai toujours au port. Je t'aime. Holland." Je mis le bracelet et il rendait bien avec ma montre. Je saisis une feuille et un crayon et écrit tout ce qui me passait par la tête. Le rendu final était un peu penché, mon écriture était pas terrible j'avais limite honte mais elle serait heureuse de recevoir une lettre. Je la remerciai pour son cadeau, que je pensais fort à elle, qu'elle me manquait et bien sûr, que je l'aimais.
Mon père rentrait complètement épuisé par une dure journée, il m'a demandé de conduire pour le retour, sauf que ce matin Stéphane André n'a pas pris sa voiture usuelle, non il avait pris la T-150 de mon arrière-grand-père. J'ai halluciné quand j'ai vu ce bijou, garé entre deux berlines plus conventionnelle. Elle avait était carrossé par la société Figoni & Falashi en 1937. Ses courbes typique des années 30 en faisait une voiture impressionnante mais malgré tout légère. Je me répétais sans cesse que ce n'était qu'un rêve et que j'allais me réveiller. Mon père aussi aurait préféré conduire. La fatigue... avec son haleine de Chivas. Je m'installai au volant et réveillai le monstre dormant sous le long capot. Son bruit d'un autre âge venant tout droit de son âme sonnait comme une symphonie à mes oreilles. La sortir du parking ne fut pas chose aisée, la direction assistée n'existait pas à l'époque. Je quittai la ville prudemment, appliquant à la lettre les conseils de mon père. L'énorme française se laissait faire, elle ne cala pas du trajet et je me permis une accélération en ligne droite. La légende raconte qu'elle peut atteindre les 200 km/h et franchement j'avais atteint 120 sans problème. Je ralentis tout de suite après ma petite folie car je passai au virage du tertre rouge, enfin je le surnomme comme ça car il ressemblait beaucoup au virage éponyme. À la petite différence près, que sur le circuit du Mans, il n'y avait pas de ravin au delà de la rambarde de sécurité. Ce virage avait fait des morts, des croix et des bouquets ornaient la glissière. Mon père avait toujours la même réaction: il fixait la glissière et ne disait plus un mot. J'aurais dû faire le tour.
Nous étions arrivé sans encombre à mon grand soulagement mais il reste une dernière épreuve: garer cette machine infernale. Sur la propriété, il y avait une vieille étable dans le même style que la maison. Une grande porte en bois à deux battant cachait presque 100 ans d'ingénierie automobile française. Depuis la Peugeot type 143 du début de siècle de mon arrière-grand-père jusqu'à l'affreuse Peugeot 607, elle était la preuve que le design français était en panne et du coup mon père a rompu la tradition en achetant son Audi A8. Il y en avait 8 au total il me semblait. Elles étaient garés en épi, se faisant face par groupe de 4. Une rangée de néon se reflétaient sur les peinture majoritairement sombre et éclairaient la pièce comme en plein jour. Heureusement pour moi, la T-150 fut aisée à garer étant en première position. Si ça ne tenait qu'à moi je les aurai mises toutes sous bâche mais je n'avais pas mon mot à dire, elles étaient toutes à mon père où plus précisément au groupe et seul le président pouvait les utiliser. Je n'avais jamais exploré cet endroit car il m'était interdit. Quand on a 8 ans et qu'on faisait des traces de doigt partout d'accord mais à presque 18 ans. Je décidais de rester un peu parmi ces beautés d'un autre temps, je les détaillais avec soin et remarquait de petit détail amusant comme sur la DS la présence d'un téléphone, l'intérieur bariolé de la delage DM typique des années 20, les rideaux sur les vitres de la delahaye type 180. Une fois arrivé au fond de l'étable je sentis un courant d'air provenant du mur. Je l'examinai avec minutie et je m'aperçu que ce n'était qu'une toile tendue. Je dirigeai vers un côté et me faufilai derrière. Il faisait très sombre, la lumière de la pièce d'à côté avait du mal à m'atteindre. Je sortis mon portable et utilisai la torche pour savoir ce qui se trouvai ici. Je distinguais une énorme masse sombre. Je m'approchai et devinai qu'il s'agissait d'un véhicule, plutôt bas, avec un long capot. Je pris le tissus et le tirai d'un coup sec sauf que ça avait affolé les souris et moi-même par la même occasion. Le calme revenu je découvris la bête. Je pensais à une américaine mais j'avais faux et c'était même mieux. Son étoile à 3 branches, son long capot, ses feux verticaux, son look agressif.... c'était une Mercedes 230 Sl. J'en croyait pas mes yeux, sa peinture était écaillée mais je voyais ses lignes dynamiques, sa capote en toile laissait apparaître l'armature en métal, ses jantes rouillés devaient être magnifique autrefois. C'est comme si on l'avais abandonnée ici, ou plutôt cachée. Je tentai d'ouvrir la porte délicatement et à mon plus grand étonnement elle s'ouvrit. Il régnait dans l'habitacle une odeur pestilentielle de crotte de souris, de moisi, de renfermé. Je laissais la porte ouverte pour aérer avant de m'installer. Je pris place avec précaution du côté chauffeur, et m'imaginais au volant de ce petit bolide, les cheveux au vent. Je fouillais un peu partout et trouvais des cassettes dans la boîte à gants, en même temps dans les années 60, c'était le support le plus courant. Je dépliai le pare-soleil et les clés me sont tombé dessus. Je tentai naturellement de réveiller son cœur mécanique mais rien, pas même un son. J'étais un peu déçu mais je m'attendais à ce résultat. Je repartis laissant ma trouvaille derrière moi et fermai ce palais des merveilles.
         Pour le dîner, Francesca avait préparé un rôti Orlof avec des pommes de terres et un mélange de légumes. Maman était rentrée tard de son déplacement de Genève, ça faisait du bien de la voir, nous étions donc presque au complet. Papa décida de nous parler de la réunion annuelle du groupe, enfin de la réunion de famille à Innsbruck pour Noël et pour nouvel an. Il nous demanda ce que nous souhaitions pour Noël. Elise demanda naturellement un nouveau portable avec une enceinte, du parfum, du maquillage, des vêtements bref tout ce qu'elle a déjà ou presque. Mon paternel devant mon silence me demanda :"Et toi Thomas ?

De la haine naît l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant