Chapitre I : (1) Flamme masquée, secrets absorbant sa lumière

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J'attends le jour où il viendra. Où il me demandera cette clef. Où je ne répondrais pas. Et où il me tuera. Cet inconnu qui sait tant de choses sur moi, alors que j'ignore tout de lui. Je ne me plains pas de ce que j'endure, certaines personnes doivent subir des choses encore pires. Certes il m'est arrivé beaucoup de malheur, mais ceci est la vie. Même si à cinq ans, on ne s'en rend pas forcément compte.

Vous vous demandez surement qui je peux être. Autant le dire, même si je ne vois pourquoi vous en avez besoin, puisque ma vie risque de finir dans peu de temps. Mon nom est Hosthon, mon prénom, Madeline. Je ne suis pas comme les héroïnes des livres, je n'ai rien de spécial, pas de pouvoir et encore moins une vie incroyable. A seize ans, j'admets que j'ai vécu pas mal de chose. Perdre tous les membres de ma famille a été insupportable, surtout perdre mes parents. Mais j'ai grandi et mûri depuis. C'était leur destin de partir.

Et c'est aussi le mien.

Au bout de trois ans à vivre seule, on peut avoir le cerveau légèrement détraqué. Alors ne soyez pas surpris, je peux penser d'étranges choses dans des conditions déplorables.

Trois ans, c'est long. Attendre que son tueur vienne vous tuer, c'est long. Vous vous demanderez pourquoi attendre ? Pourquoi ne pas fuir ? Pourquoi ne pas dire tout aux autorités ? Et bien même moi, je n'ai pas la réponse. Fuir mais pour aller où ? Que pourraient faire les autorités contre un psychopathe comme lui ? Peut-être que l'inconnu est mort. Il n'a pas donné de nouvelles depuis la dernière lettre. Mais je l'attends toujours. Il doit surement être en train d'échafauder un plan machiavélique.

Vois-tu la photo en haut ? Figures-toi que c'est moi. Ne me demandez pas pourquoi je me suis teins les cheveux en rouge, même moi je ne sais pas. Peut-être pour montrer ce que j'ai vécu. Des cheveux rouges, comme la couleur qui a coulée de tous les membres de ma famille. La même couleur que ce liquide froid dont tout le monde redoute.

J'évite tout contact avec les autres. Mon cher meurtrier serait capable de s'en prendre à eux, et je refuse que quelqu'un meurt par ma faute. Seule la directrice du lycée sait que je vis seule, c'est tout. Elle me donne un peu d'argent pour subvenir à mes besoins.

Un livre attira mon attention, me sortant de mes pensées. Je me dirigeai vers les étagères en chêne sombre, où des livres fantastiques s'alignaient et prenait la poussière. Si je pouvais, je les prendrai tous. Mais le règlement n'autorise l'emprunt que de trois livres. Je retirai doucement l'ouvrage de son emplacement, et lus le titre. « Les Sorcières du Clan du Nord », un livre que j'avais déjà vu auparavant, mon œil avait été attiré par la couverture colorée et sombre à la fois. Je décidai de le prendre et retournai à ma place. Deux livres reposaient déjà sur la table ronde, et je posai le nouveau au-dessus de la pile. Il ne faut pas que j'oublie d'aller à la superette du coin, mes placards sont vides !

J'entendis des talons claquaient dans mon dos, seul bruit interférant avec le silence. Je me retournai et reconnus la seconde bibliothécaire, celle qui travaillait le soir, et que je n'appréciais pas. Ses yeux en amande noirs me fixaient, flanquaient derrière des lunettes parfaitement rondes. Sa veste bleue marine s'accordait avec sa jupe, arrivant sous les genoux, de la même couleur. Pour finir, ses escarpins noirs martyrisaient le parquet ciré, provoquant un bruit insupportable. La femme se posta devant moi, m'observa un moment, puis déclara, d'une voix dépourvu d'une quelconque gentillesse :

-La bibliothèque va fermer.

Traduction de ses gentilles paroles : Sortez d'ici immédiatement, où c'est moi qui vous sors. Décidément, je ne peux la supporter, et c'est réciproque !

J'attrapai ma pile de livres et me hâtai vers la sortie. Je marchai à travers les rues, désertes à cette heure, hormis quelques couples qui se dirigeaient vers le restaurant du coin.

Je sortis de la ville et marchai en trainant les pieds. Ma maison se situe à l'extérieur de la ville, entourée d'arbres. Tout le monde pense que j'habite dans une autre ville, de ce fait, ils ne peuvent faire le lien entre moi et cette maison, qu'ils pensent abandonnée. Et la maison m'appartient, mes géniteurs avaient fini de la payer il y a une dizaine d'année. J'arrivai enfin devant chez moi, j'ouvris la porte, rentrai et m'affalai dans le canapé. Je choisis le premier livre sur la pile et commençai ma lecture.

Quand je levai les yeux de mon bouquin, il est déjà dix-neuf heures et demi, je n'ai pas vu jamais le temps passé, encore une fois ! Je posai mon livre et allai à la cuisine pour me faire à manger. Quand j'ouvris le placard, je m'aperçus qu'il était vide, j'ai oublié d'aller faire les courses en sortant de la bibliothèque... Maudite femme, c'est de sa faute ! J'attrapai mon sac et sortis de la maison sans oublier de refermer derrière moi. Ne me dîtes pas que je ne suis pas organisée. Je le suis. Mais qui me dit qu'il viendra ? Qui me dit qu'il n'est pas mort ? Je sais bien, mieux vaut ne pas se faire d'illusion.

Je marchai quelques minutes et arrivai à la ville. Je tournai dans la petite ruelle et aperçus une ombre sur un toit, elle se cacha précipitamment, mais trop tard. Je continuai de marcher sans m'en occuper. La ruelle est très longue et étroite. Je n'aime pas ce genre d'endroit, il pourrait arriver à tout moment, c'est même possible que ça soit lui... Je marchai de plus en plus vite, commençant à croire que c'était bien lui. Mon corps était parcourut de tremblements et je me demandais s'il ne fallait pas que je fasse demi-tour.

J'arrivai bientôt à la sortie quand on m'attrapa le poignet et qu'on me plaqua contre le mur. D'instinct, je sortis ma dague de la manche de mon manteau. Je la pointai sur l'homme -à en croire par sa silhouette- qui se tenait face à moi, son visage caché dans l'ombre du soir. Ma main tremblait, trahissant le masque calme que je m'étais collée au visage.

-N'est pas peur. Range cette dague.

-Que voulez-vous !?

-Je ne te veux aucun mal. Je sais ce qu'il t'arrive, et je suis là pour t'aider.

La personne s'avança et je pus voir son visage, éclairé par un lampadaire. C'était un garçon. Du même âge que moi, semblait-il. Ses traits semblaient taillés et polis dans la pierre, tellement ils étaient harmonieux et soignés. De fines lèvres parfaitement droites, un nez, petit et légèrement retroussé, des yeux chocolat, des sourcils légèrement broussailleux et des cheveux noirs en batailles. Sans ses cheveux mal coiffés, on aurait pu le confondre avec un prince.

-Personne ne sait ce qu'il m'arrive. Laissez-moi.

Je me dégageai, rangeai ma dague et partis. Fort heureusement, le garçon ne me suivit pas. Mais qui était-il ? Pourquoi disait-il qu'il savait ce qu'il m'arrive ?

The LastOù les histoires vivent. Découvrez maintenant