Chapitre 70

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J'avais réussi à me trainer jusqu'à la cuisine par je ne sais quel moyen, le cœur en sang, la vision trouble et les pensées embrumées. "Non", sa voix résonnait dans ma tête comme si on m'assénait un coup mortel. Assise à cette table, le visage dans mes mains pour récolter les larmes qui l'inondent je ne sais plus quoi penser. Je suis meurtrie, ma réaction est peut-être trop forte pour un mot de trois lettres. Un mot dit sans réfléchir, mais un mot qui veut tout dire. Un mot qui signifie qu'elle et moi ne sommes pas plus que de simples colocataires, c'est cette image là qu'elle souhaite donner à son frère. Et je ne peux me permettre de me résigner à une telle place aux yeux de sa famille. Elle qui est tout pour moi depuis quelques mois, je ne vois que par elle, n'ai envie que d'elle, n'aime qu'elle. Elle pour qui je ne suis rien ? Je ne peux pas y croire.

Samuel : Hey la fren ... oh ... Ivy ? Ça va ma puce ?

Mon colocataire n'hésite pas une seconde avant de prendre mon visage tout humide dans ses deux grandes mains et pouvoir inspecter mon état. 

Samuel : Eh, pourquoi tu pleures ? 

Ivy : T'inquiètes pas Sam, ça va aller. Juste un peu de nostalgie.

Samuel : Quand je suis nostalgique, j'ai rarement les yeux bouffis et le nez qui coule. T'es moche quand tu pleures en plus. Arrête ça de suite s'il te plaît ça me met mal à l'aise.

Ivy : (en riant) Connard

Samuel : Qui t'a brisé le cœur ? Je vais de ce pas lui éclater la gueule. 

Ivy : Laisse Sam, j'aurais une discussion avec elle plus tard.

Samuel : Oh, c'est Hailey alors. 

Sans attendre ma réponse, il sort de la cuisine en furie et interpelle ma colocataire "TOI ! TU VIENS DE SUITE DANS LA CUISINE !" Moi qui ne voulais pas faire de scène devant notre invité, voilà que mon plan a lamentablement échoué. Je n'entends pas la voix de Hailey depuis là où je suis mais je n'entends pas non plus celle de Samuel alors j'imagine qu'elle s'est levée du canapé sans dire un mot. Entendant des pas et des murmures dans le couloir je sèche rapidement mes yeux, prends une grande inspiration et me concentre pour ne pas pleurer à nouveau. 

Samuel : Je vous laisse discuter.

Il lâche son plus sale regard pour ma colocataire et quitte la pièce tandis que ma copine me regarde avec inquiétude. 

Hailey : Ça va pas chérie ?

Ivy : Ne t'approche pas de moi.

Hailey : Qu'est-ce qu'il se passe Ivy ? 

Ivy : Toi et moi ? Je croyais que ça voulait dire quelque chose pour toi.

Hailey : Mais de quoi tu parles ?

Ivy : Tu l'as dit à ton frère, toi et moi on n'est pas ensemble.

Hailey : Bébé s'il te plaît laisse-moi t'expliquer. 

Elle s'approche dangereusement de moi, sa beauté me ferait presque tomber directement dans ses bras mais je n'en ai pas envie. Je préfère qu'elle ne m'approche pas pour le moment, je me connais, je suis trop faible pour lui résister et trop en colère pour lui pardonner. 

Ivy : Vas voir ton frère Hailey, on en parlera plus tard j'ai pas envie là.

Une larme solitaire coule le long de sa joue et sans dire un mot, elle tourne les talons et repars d'où elle vient. Quant à moi, je monte m'enfermer dans ma chambre et m'allonger sur le lit froid, laissant couler mes larmes. Il y a une raison pour qu'elle ait répondu non à son frère mais je ne peux m'empêcher de pleurer et de lui en vouloir. Je crois que je suis beaucoup trop fragile. Je ne sais pas combien de minutes ou d'heures je suis restée allongée là, à laisser couler mes yeux sur les draps, à renifler ma morve dans mon nez, à fixer le mur comme si ma vie dépendait de ce petit "non". Pathétique.

Le temps semblait être arrêté jusqu'à ce que j'entende quelqu'un frapper à la porte de ma chambre, l'ouvrir sans attendre une réponse de ma part puis un corps appuyant tout son poids sur mon matelas en gardant une distance avec moi et enfin un long bras entourer mon corps pour m'empêcher de partir. Je sais directement que la personne n'est pas Hailey, sans même avoir besoin de parler je sais qu'il s'agit de Samuel. 

Samuel : Tu veux m'expliquer ce qu'il se passe ma beauté ?  Je déteste te voir pleurer. 

Ivy : Son frère lui a demandé si on était ensemble. Elle a dit non. 

Samuel : Comment ça non ?

Ivy : Bah je me suis dit exactement la même chose, comment ça non ? 

Samuel : Ça fait pas 2 semaines que vous êtes ensemble non plus, encore, j'aurai pu comprendre mais là. 

Ivy : C'est pour ça, j'attends ses explications. 

Nous cessons de parler, je ferme les yeux en appréciant l'étreinte que m'offre mon colocataire. Avoir son soutient dans cette petite histoire me fait du bien. Je sais que je me fais des idées, que je pense trop pour un seul petit mot mais voir que quelqu'un d'autre pense comme moi me fait du bien. Une nouvelle fois, je suis sortie de mon repos par quelqu'un qui frappe à la porte, une fois de plus la porte s'ouvre avant que j'aie eu le temps de répondre. Je ne prends même pas la peine de regarder qui se tient devant mon lit, Stefan et Jimmy ne sont pas à la maison, je sais que c'est elle. Le corps de mon colocataire se raidit à côté de moi, comme pour me protéger de l'altercation à venir. 

Hailey : Qu'est-ce que ... qu'est-ce qu'il se passe ici bordel de merde ?!

Samuel : Je la réconforte puisque tu ne sais pas le faire toi-même. 

Hailey : Pardon ? 

Son ton me glace une nouvelle fois le sang, doucement je me tourne et mon regard rencontre le sien. Elle est furieuse et pour cause, je sais exactement ce qu'elle est en train de se dire en voyant mon ami me câliner de la sorte.

Hailey : Ivy ! Qu'est-ce qu'il se passe là putain ? 

Samuel : Hailey ...

Son regard de fureur se tourne vers le garçon et si elle pouvait, elle le tuerait directement. 

Hailey : Samuel, dégage. 

Il ne bouge pas, son regard à elle oscille entre Samuel et moi, empli de rage, je sens qu'elle pourrait nous détruire en une fraction de secondes. Je tapote légèrement l'épaule de mon ami et celui-ci comprend que je lui demande de partir, il m'embrasse la tempe et s'en va en dévisageant ma colocataire qui n'est pas redescendue de sa colère. 

IVYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant