Chapitre 15

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En entrant dans les appartements de Rhadamanthe, la première pensée de Kanon fut qu'Athéna devrait avoir une petite discussion avec ses oncles quant aux logements de ses troupes d'élites. Sans avoir le style tapageur du royaume de Poséidon, l'endroit respirait le luxe et le raffinement. Il ignorait s'il en allait de même pour les autres juges, mais la décoration du Whyvern mariait harmonieusement chacune de ses nationalités, Grec, Romain, Allemand, Anglais... Visiblement le juge avait pas mal bourlingué au court de ses différentes réincarnations.

Sur le sofa, reposait comme esseulé, un violon qui lui, semblait récent. Dans un coin près de la fenêtre, le Gémeaux remarqua un piano. Mais bien plus que l'instrument, ce fut la photo posée dessus qui attira l'œil du jeune homme. Elle représentait deux personnes dans des costumes anciens. L'un d'eux était assis sur la margelle d'une fontaine d'un village italien, l'autre à terre à ses côtés. Les doutes de Kanon sur leur identité, s'envolèrent lorsqu'il prit le cadre. Il s'agit bien de Rhadamanthe et Valentine. Le juge arborait son habituelle expression hautaine, mais un sourire effleurait ses lèvres, il semblait détendu... Heureux même. A ses pieds, celui de la Harpie laissait clairement voir de la fierté et un pur bonheur d'être là. L'artiste, car il s'agissait en réalité de la reproduction d'un tableau avait vraiment su capturer avec ses pinceaux l'âme de ses modèles.

- Il a été peint par Alone lorsqu'il avait onze ans, expliqua Minos en faisant sursauter de surprise le chevalier perdu dans sa contemplation.
- Alone ? Ce n'était pas le réceptacle d'Hadès au dix-huitième siècle ?
- Oui. Ils l'ont rencontré par hasard au cours d'un voyage en Italie. Ils ignoraient qu'il s'agissait de notre seigneur Hadès. Mais cette photo ne lui rend pas justice. L'original est chez Valentine.
- Ah bon ? Je ne l'ai pas vu.
- Il a du le décrocher après la dispute qui a eu lieu juste avant votre rencontre.

Kanon grimaça à cette affirmation, songeant que la réconciliation allait être plus ardue qu'il ne l'avait imaginé.

- Que fait-on ici ? Demanda-t-il.
- Je suis venu à la recherche d'indices, avant d'aller au tribunal. Mais je n'ai rien trouvé qui indiquerait où il a pu se rendre. Je me suis dit qu'avec toi j'aurais peut-être plus de succès.    
- Mouais... Sauf que tu m'as démontré que je ne le connais pas du tout. Alors comment veux-tu que j'ai plus de succès ? Tu vas encore dire que je suis stupide. Je vais n'énerver. Tu vas t'énerver. Et ça n'aidera personne.

Minos profita que le Gémeaux ait le dos tourné pour esquisser un sourire malicieux. En réalité, il n'avait jamais songé que celui-ci était stupide, juste tellement facile à provoquer. Il effaça son sourire et reprit lorsque le chevalier se retourna.

- Pas cette fois car j'en ai besoin. Je connais Rhadamanthe depuis des millénaires, alors peut-être que je cherche trop loin et que la réponse est là, juste sous mon nez. Donc tes petites remarques débiles pourrait provoquer un déclic qui m'apporterait la solution.
    
Kanon lança un regard noir au juge et se mît à visiter chaque pièce sans un mot. Minos l'observait en silence guettant la moindre de ses réactions. Lorsque le chevalier revint au salon, il interrogea.

- Bon déjà, comment il a pu quitter les enfers sans être vu. Ça grouille de monde chez vous ?

Le juge se leva de la table basse où il était assis et se dirigea vers la chambre. N'ayant pas obtenu de réponse, le Grec le suivit. Minos actionna le mécanisme d'ouverture des souterrains. Le chevalier siffla mi-impressionné, mi-envieux.

- On n'avait pas ça chez Poséidon !
- Évidemment, vous vous seriez noyé !

Il n'eut pas le temps de jubiler que le chevalier répliquait ravi.

- Et une stupidité à zéro pour messire Minos !
- Je suis inquiet pour mon frère, bougonna-t-il de mauvaise foi en réalisant l'énormité de sa remarque.
- Et où cela mène-t-il ? Demanda Kanon qui n'insista pas davantage, voyant le juge soudain fatigué.
- Partout où l'on veut. Ces galeries parcourent  toute la planète.
- Eh bien ! On est pas dans la mouise !
- Ça tu l'as dis, soupira Minos. Je suppose que si tu voulais disparaître, tu ouvrirais autre dimension et tu y resterais.
- Mouais... Fit Kanon surpris. Une petite dimension peinarde avec personne pour me faire chier... Mais comment... Enfin... Je veux... Tu sais comment je disparaîtrais, moi votre ex-ennemi et pas ton frère !
- Je le sais car Rhadamanthe a fouillé sur toi dans les archives lorsque Valentine et toi avez commencé à sortir. Et pour nous, c'est plus compliqué. Avec toutes les vies que nous avons eu...
- Ouais... Ouais... J'ai compris, s'exaspéra le chevalier avant de s'exclamer outré. TON FRANGIN A ENQUÊTÉ SUR MOI !
- Je te prierai d'arrêter de hurler et il voulait savoir avec qui Valentine allait. Un mélange t'inquiétude et de jalousie...
- Je vois ! Et toi ? Où irais-tu à sa place ? Demanda-t-il tandis qu'ils regagnaient le salon.
- Moi... À la place de Rhadamanthe... Fit le juge songeur, les yeux brillants. Je me jetterai dans les limbes... Avec celui qui m'a brisé le cœur. 

La valse des sentimentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant