Dryre -tome 1 : L'innocence du Feu

Chapitre 23

   Je la sens au fond de moi. Cette frayeur. Cette peur. L'inconnu me donne la chair de poule, et la tension palpable dans l'école n'arrange rien. Cela fait déjà quatre jours que le directeur nous a annoncé notre départ prochain. Durant ce laps de temps, je n'ai pas fait grand-chose, je dois dire. Pourtant il le faut. Il faut que je me bouge. Que je me prépare.

C'est étrange au fond. Il y a deux mois, je n'avais pas la moindre idée de qui j'étais, et maintenant, l'avenir du monde repose au creux de mes mains. Tous pensent que je suis forte, que je vais faire les bons choix et qu'avec moi la victoire est assurée. Malheureusement, ils oublient que je n'ai que dix-sept ans. Dix-sept petites années de vie durant lesquelles mes seules préoccupations se résumaient à quels vêtements choisir pour tel ou tel évènement, à avoir de bonnes notes pour pouvoir espérer faire quelques études et à m'amuser avec mes amis. Ma petite vie bien rangée que j'aimais et qui a basculé du jour au lendemain, sans que je ne puisse rien y faire. Conclusion, je panique.

C'est dans un état de léthargie que je parviens dans la chambre de Lexie. Ah...Lexie. Un phénomène cette fille ! Pourtant, je me souviens de notre première rencontre, dans la cafétéria. Elle m'a fait une place dans son cœur dès l'instant où nos regards se sont croisés. Elle a été mon repère au début, puis elle est devenue mon amie, ma confidente. Son look décalé et son tempérament enfantin vont me manquer.

– 'Yana ! m'accueille cette dernière, tu vas me faire le plaisir d'arrêter d'afficher cette mine renfrognée, qui d'ailleurs ne sied pas du tout à ton teint.

Sa mine faussement colérique arrive à m'arracher un sourire. Décidément, c'est le rayon de soleil dont j'avais besoin pour aiguayer ma journée.

– Oui, désolé Lexie, je ne suis pas de très bonne compagnie en ce moment...

Depuis qu'il a été annoncé que je faisais partie de l'élite et que nous devions partir dans peu de temps, je suis constamment dans mes pensées, ou en train de discuter avec Rakvail par la pensée. Il faudra d'ailleurs que je passe lui dire bonjour car je ne l'ai pas vu depuis mon dernier cours d'animalus d'il y a quatre jours.

Je regarde mon amie. Sa chevelure bleutée est en pagaille et quelques mèches viennent se coller sur ses joues rebondies. Ses yeux bleus me fixent avec insistance.

– Quoi ? Demandai-je en fronçant les sourcils.

Elle soupire et pose ses mains sur ses genoux.

– Je... c'est juste que tu vas me manquer. On ne se connaît pas depuis des lustres mais tu as réussi à franchir une barrière en très peu de temps. Cela ne se voit peut-être pas, mais mes vrais amis se comptent sur les doigts d'une main, et je sais que tu en fais partie.

Je ne sais pas quoi répondre. Honnêtement, je suis émue. Très émue. Je la prends dans mes bras et la serre fort.

– On se reverra, je lui chuchote, et comme ça, on aura pleins de choses à se raconter !

Pour toute réponse, elle me rend mon étreinte avec vigueur. Elle se décale alors et tend sa main dans ma direction, l'auriculaire levé.

– On va se faire la promesse du petit doigt.

Je me retiens de rire devant son sérieux et lève moi aussi mon doigt.

– Promets-moi de revenir, enchaîne-t-elle, et aussi de vivre le moment présent comme si c'était le dernier.

Les larmes menacent de s'échapper de mes yeux, alors je me concentre et réponds :

– Promets-moi de te battre pour être heureuse, promets-moi que notre amitié sera inébranlable jusqu'à la mort.