PLUS FORT QUE MOI

Chapitre 43 Laura

C'est le grand jour ! Putain, je suis euphorique. On va enfin me retirer ce fichu plâtre, enfin j'espère. S'il y en a un qui me dit que je dois le garder encore quelques jours, je jure que je l'étrangle. Je me redresse rapidement sur le lit jusqu'à réaliser que je n'aurai jamais dû faire un mouvement aussi rapide, la tête me tourne et les nausées me reprennent. J'inspire profondément et expire tout l'air contenu dans mes poumons dans le but de chasser l'envie de vomir.

Hadrien pose sa main brulante sur mes reins et me caresse lentement du pouce.

-Ca va ma petite chatte ?

-Ouais, j'ai juste encore la nausée ! Ca me saoule d'être encore malade, je suis au début du quatrième mois, ça devrait passer normalement ?

-J'y connais rien mon cœur, on posera la question à la gynécologue tout à l'heure. Quelle heure est-il ?

-Huit heures trente.

Hadrien ayant réussi à détourner mon attention, je me sens déjà beaucoup mieux et c'est maintenant mon estomac qui réclame. Il y a vraiment de quoi devenir folle.

-On va se lever car on va devoir décoler dans une heure. Tu veux le petit déjeuner au lit ma petite chatte ?

-Certainement pas, je vais lever mes grosses fesses jusqu'à la cuisine avant de devenir énorme. En plus, c'est certainement la dernière fois que je subis ce plâtre alors ce n'est vraiment pas le moment de jouer les assistés.

Le rire d'Hadrien réveille ma bonne humeur et c'est avec le sourire qu'on poursuit les préparatifs. A neuf heures trente tapantes, je boucle la ceinture du siège passager du gros 4X4 acheté par mon homme.

Après m'être enregistrée à l'accueil de l'hôpital, je rencontre le chirurgien qui m'a opérée puis je passe un scanner pour vérifier la consolidation des os de ma jambe puisque la radiographie est déconseillée en cas de grossesse. Après ces divers examens et avant d'obtenir la réponse quant au retrait de mon plâtre, Hadrien et moi nous rendons au cabinet de la gynécologue à l'étage supérieur. On patiente une petite demie-heure avant qu'elle nous appelle.

-Alors Laura, comment vous sentez-vous ?

-Grosse, pleurnicharde, nauséeuse toujours et empotée !

-Eh bien, ça a le mérite d'être clair.

Hadrien a un grand sourire greffé sur le visage mais prend la bonne décision de se taire.

-Je viens de passer le cap des quatre mois et j'ai des nausées à longueur de temps alors que ça devrait cesser, non ? J'ai un ventre énorme enfin pas si énorme que ça mais chez certaines femmes la grossesse ne se remarque qu'à partir du cinquième mois, je ne comprends pas. En plus j'ai l'impression de le sentir bouger, est ce que c'est seulement possible ? Et puis je ne fais que manger, je vous jure que j'essai de freiner mais si je ne mange pas j'ai des vertiges, vous croyez que je vais prendre vingt kilos ?

-Oh là, ça fait beaucoup de questions. Suivez-moi, je vais répondre à l'ensemble de vos interrogations tout en procédant à une échographie mais sachez déjà que rien de tout ça n'est alarmant.

Je prends place sur la table des examens après avoir enfilé une blouse et gardé uniquement ma petite culotte. La gynécologue place mes pieds dans les étriers, relève ma blouse et enduit mon ventre de gel transparent. Hadrien, assis sur une chaise juste à coté de moi, ne sourit plus du tout.

L'écran s'allume et le médecin place sa sonde sur le bas de mon ventre. Un vacarme assourdissant envahit tout le cabinet. La gynécologue se lève rapidement pour éteindre le son.

-Qu'est ce que ... ? Comment j'ai pu ne pas ... ?

J'ai l'impression que quelque chose ne va pas du tout, je commence à paniquer quand je lis l'inquiétude sur le visage de ma gynéco. Elle attrape son téléphone dans la poche de sa blouse et compose rapidement un numéro.

-Maria, tu peux venir s'il te plaît, j'aimerai que tu voies ça ! Ok, je t'attends.

Hadrien intervient, il est aussi blanc que son tee-shirt.

-Vous pouvez nous dire ce qu'il se passe ?

-Oh ne vous en faites pas, rien de grave. J'ai juste demandé à mon interne de venir vérifier une petite chose avant que je vous l'explique.

Une jeune femme à la peau mate et aux cheveux bruns bouclés entre et nous salue puis les regards des deux médecins se tournent vers le moniteur que je ne peux désormais plus voir. Je me tourne vers Hadrien pour chercher du réconfort mais je déchante vite quand je réalise qu'il fixe méchamment les deux jeunes femmes. Elles sourient, c'est bon signe non ?

-Il y a ... un problème ? Je les interroge.

-Tout dépend si c'est un problème pour vous. Il y a quelque chose que je n'ai pas vu aux premiers examens et je m'en excuse mais tout va bien, ok ?

-Ouais mais c'est ...

-Putain, vous allez nous dire ce qu'il se passe ! Hurle Hadrien en se levant de sa chaise.

-Calmez vous monsieur Peters, s'il vous plaît. En fait ... elle tourne doucement l'écran vers nous ... il y en a deux.

-Deux quoi ? Deux problèmes ?

-Non deux bébés.

-De quoi ?

Hadrien est soudain pris d'un fou rire incontrôlable alors que je me décompose en regardant l'écran de l'échographe qui affiche clairement deux paires de jambes. Deux bébés, mais ce n'est pas vrai. Comment je vais faire, je ne vais jamais y arriver ? Hadrien continue à rire et je n'ai qu'une envie : le pincer à sang pour qu'il arrête mais il est trop loin. La gynécologue rallume le son après l'avoir baissé au minimum et je suis bercé par le doux son de deux cœurs qui battent à l'unisson : mes bébés. Oh putain, je ne sais même pas si je suis heureuse ou déprimée.

-Voilà qui explique le fait que vos symptômes de grossesse soient décuplés et que vous preniez du poids plus rapidement. Je vais ajuster votre traitement de vitamines et vous donner quelques conseils pour éviter de prendre trop de poids mais vu votre gabarit, aucun problème à ce que vous preniez une vingtaine de kilos.

-Une vingtaine de quoi ? Mais vous êtes malade ?

Le fou rire d'Hadrien redouble.

-Tu vas la fermer toi !

Hadrien tourne la tête vers moi et cesse de rire.

-C'est une super nouvelle ma petite ...

-Si tu utilises mon surnom je te jure que je t'arrache les cou...

-S'il vous plaît ... nous interrompt l'interne. Je sais que la nouvelle est difficile à digérer mais ce n'est pas une mauvaise nouvelle en soi. Nous allons tout faire pour que ça se passe au mieux. Ok ?

-Ouais, il ne manquerait plus qu'ils m'annoncent qu'ils ne vont pas me retirer mon plâtre aujourd'hui, et là je serai bonne pour une dépression profonde.

Je prends une grande inspiration pour tenter de chasser la crise d'angoisse qui menace, tentant de relativiser les choses. J'ai à peine dix-neuf ans et je ne vais pas avoir un mais deux bébés alors que je n'ai pas terminé mes études et que je viens de décrocher un petit emploi à domicile. Comment je vais faire pour gérer et pour rembourser mon frère en même temps ?

-On va y arriver. Me chuchote Hadrien.

J'ai dit ça à voix haute ?

Hadrien passe sa main dans ma nuque et me caresse doucement derrière l'oreille ce qui a le mérite de me détendre instantanément.

-Ca va mieux ?

-Ouais, je vais m'y faire, pff !

-Bon passons aux choses sérieuses. Nous suggère la gynécologue.

-Les choses sérieuses ?

-Le sexe.

Hein ? Elle croit vraiment que c'est le bon moment pour parler de sexe ?

-Celui des bébés, vous voulez connaître le sexe ?

-Parce qu'on peut savoir ? Si vous m'annoncez que ce sont deux filles, je crois que je vais faire un malaise.

Les deux médecins serrent les lèvres comme pour retenir un sourire, je la sens vraiment mal celle là.