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Camille

En Sciences, je me trouve assise à côté d'Hugo. Il fait le guignol, comme à son habitude dois je dire. Le professeur nous a demandé de ne pas sortir nos affaires. Je remarque que chaque table contient une bassine avec pleins de petits outils à l'intérieur. Il nous a dit de mettre nos blouses, c'est ce que tout le monde fait. Je me demande bien ce qu'on va faire. J'espère que ça ne sera pas quelque chose d'écoeurant parce que je risque de ne pas travailler si c'est le cas.

- Bien. Tout le monde est prêt. Aujourd'hui comme vous l'aurez compris ou non, nous n'allons pas écrire ni faire les activités que je vous fais faire habituellement. Chaque table dispose d'une bassine avec certaines choses se trouvant à l'intérieur. Aujourd'hui vous allez équeuter une grenouille !

Annonce t'il. Je manque de m'étouffer. Pardon ?! Moi, équeuter une grenouille, ça n'arrivera pas. Jamais de la vie je toucherais à une grenouille. J'ai horreur de ces bêtes là. Toutes les filles présentes dans la salle poussent des cris d'horreurs, ce qui ne m'étonne pas.

- Berk !

Crie une fille.

- Ah non ! Je touche pas à ça moi ! C'est visqueux c'est...

Frissonne une autre fille.

- ASSEZ ! Cessez de toujours vous plaindre !

Hurle le professeur. Je sursaute. Je ne m'attendais pas à ce qu'il hausse le ton aussi rapidement. Il n'a pas l'air autant patient que d'habitude. Je sens que cette heure va être longue, très longue. J'ai déjà hâte qu'elle se finisse alors qu'elle vient tout juste de débuter.
Un soupire sortit de ma bouche sans que j'ai le temps de m'en rendre compte. Le professeur descend de sa petite estrade, là où son bureau est avec le tableau, accompagné du vidéo projecteur. Il tient plein de petites boîtes entre ses mains, je ne me réjouis pas du tout à l'idée de devoir toucher une grenouille sans vie, qui sera devant moi. Si j'ai une soudaine envie de vomir, ça sera la faute du professeur.
Il s'approche de notre table et dépose la boîte, tant attendue par le débile qui est assis à côté de moi. Le professeur remarque que je ne me réjouis pas du tout de travailler sur ce "projet".

- Et bah alors Camille, que se passe t'il ? Ce n'est qu'une grenouille. Ce n'est pas comme si c'était un requin ou bien un scorpion ou je ne sais quoi d'autre.

S'exclame t'il en faisant des gestes dans l'air pour accentuer ses mots. Je ne lui réponds pas et je lui fais un de mes plus beaux sourires forcés. Mon camarade, Hugo, qui est à côté de moi me donne un coup de coude.

- Aller Camille ! On va s'éclater !

Rit il. Son rire tellement ridicule et contagieux, me donne envie de rire à mon tour malgré le fait que je ne voulais pas ricaner. Hugo se rapproche de la table et prend la boîte entre ses mains.

- Vous pouvez l'ouvrir.

Autorise le professeur. Hugo l'ouvre délicatement comme s'il avait peur de ce qu'il y avait à l'intérieur. Il ôte le couvercle et fait des gros yeux.

- Ça une grenouille ?

Dit il en la prenant entre ses doigts.

- Mais elle est toute petite !

- M.Torres ! Cessez donc de jouer avec !

L'avertit le professeur. Hugo la repose aussitôt après s'être fait gronder. Il l'allonge sur la table et s'empare des outils présents dans la bassine. Je me suis un peu éloignée de lui pour avoir la grenouille la plus loin possible de moi.

- Tu as peur qu'elle te saute dessus ou quoi ?

Se moque t'il.

- Blablabla !

Je lui sors ce mot pour qu'il la ferme. Rien que de voir ceci sur la table me donne envie de vomir sur place alors il en est hors de question que je la touche. Hugo la coupe en deux, je le regarde faire avec dégoût. Si je pourrais quitter la classe, je le ferais en courant

- Camille, euh il faut que tu m'aides à la tenir.

Me dit il en tournant la tête vers moi.

- Hugo, je ne peux pas la toucher.

Répondis je en le regardant. J'essaie de faire un effort et me rapproche un peu. J'ai la batracophobie, la phobie des grenouilles. Nous sommes dans un endroit public et donc je ne peux pas me permettre de pousser des cris à cause d'une grenouille. J'ai peur mais j'ai encore plus peur de faire une crise. Je ferme les yeux et envoie ma main vers l'animal mort. Une matière fine et visqueuse se répand sur mon doigt. Je retire ma main très rapidement et me mets a pleurer. Pleurer parce que je fais une crise à nouveau. Pleurer parce que j'en ai plus qu'assez de faire des crises à tout bout de champs. J'en ai marre, je me sens fragile, une incapable qui ne sait faire que des crises dans sa vie. Je frappe mon poing sur la table excédée, je pleure tellement que je peux remplir des seaux et des seaux entiers.

- Camille ! Oh mon dieu ! Monsieur ! Monsieur ! Camille fait une crise !

Crie Hugo paniqué. Je pousse des cris. J'en ai marre de toutes ces crises. Je veux que ça s'arrête. Je ne veux plus en faire. Je n'arrive plus à respirer. Je pleure et je pleure encore. Encore des crises et toujours des crises. Je n'aime pas l'impression que je donne aux autres. J'ai l'impression moi même de faire des crises tout le temps. Je déteste ça. Toute la classe me regarde, ce qui me mets deux fois plus en rogne. Je suis énervée, épuisée, faible. Le professeur accourt vers moi, il essaie de me rassurer mais rien n'y fait. Je me sens lourde, j'ai des bouffées de chaleurs monstrueuses. J'ai de plus en plus de mal à respirer. Je n'entends plus rien, je ne vois plus rien. J'ai besoin de lui.

Jamais Moi Sans ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant