Le séjour en bordure de mer de Nini et des Branques se déroula à merveille jusqu'au dimanche matin. Après quoi, comme des milliers de vacanciers, ils se retrouvèrent confinés dans le bungalow par une tempête. Le genre de mini cataclysme aussitôt placée sur le compte du dérèglement climatique par l'ensemble des services météo. Leur journée se déroula à contempler le défilé d'objets variés tels que mobilier de jardin, parasols, matériel de plage et autres ustensiles de camping non scellés au sol. Leur retour au bercail pour répondre à l'emploi du temps de Nini se trouva repoussé jusqu'au cœur de la nuit du dimanche au lundi à défaut d'accalmie.
Même avec une violence décroissante au gré de s'éloignement de la Côte, la tempête avait aussi laissé son empreinte à l'intérieur des terres. Et lorsque l'équipe au complet retrouva la villa, tables chaises et transats en plastique avaient déserté la terrasse. Les barbecues mobiles étaient renversés. La cabane de l'âne s'était effondrée, celle des autres animaux gisait sur le flanc. La boite aux lettres elle-même avait pris la clef des champs. Autre disparition que Nini eut le loisir de constater ; du billet que les Jureliez-Derenoncourt avaient punaisé sur sa porte avant d'embarquer dans leur taxi il ne subsistait qu'un lambeau comportant juste l'en-tête ; « Chère Stéphanie ».
En cherchant dans les massifs de fleurs, la jeune femme ne découvrit qu'un fragment détrempé portant paraphé d'un sybillin « an-Pan est ». L'émouvant attachement du vieux couple à leur lapin nain ramena un peu de baume au cœur à Nini.
Poussé hors du lit par une envie pressante, Djelloul s'était approché de la baie vitrée donnant sur le parc commun aux deux villas afin de contempler l'étendue des dégâts à la lumière du jour. Le potentiel musculaire du groupe allait se retrouver mis à rude contribution pour le nettoyage des pelouses. Avec une bonne partie de son branchage éparpillé çà et là, le saule justifiait de son appellation «pleureur ». Quelle tristesse.
Les animaux déambulaient de débris en fragments. Ils flairaient les vestiges de la tempête avec méfiance en cherchant quel profit tirer de ce chamboulement. Soudain Djé sentit sa chevelure se dresser d'horreur sur son crâne avant même d'avoir identifié avec certitude la nature exacte de l'objet cause de son effroi. Le Briard de Nini secouait dans sa gueule un paquet blanchâtre qu'il expédiait en l'air. Il le rattrapait au vol pour le secouer à nouveau, avec violence. Ses grosses pattes martelaient le sol et, à grandes envolées du cou, il projetait encore son « jouet » dans les airs avant de se précipiter pour le piétiner.
Djé supposa qu'une crise de démence se s'était abattue sur le chien, mais il n'eut de conviction définitive sur l'objet de cette furie qu'au moment où la masse gluante de boue, de bave et de sang mêlés vint s'aplatir contre la vitre avec un affreux bruit visqueux. Le lapin nain des voisins.
Connaissant l'attachement de Nini aux animaux, Djé jugea que l'heure de la réflexion était dépassée. Il se précipita vers la chambre à coucher de leur hôtesse, peu soucieux de sa tenue légère, et ne jugea même pas utile de frapper à la porte. Le spectacle qu'il découvrit le statufia.
A quatre pattes sur la moquette, caparaçonné du drap de satin à la manière des destriers d'antan, Désiré contemplait avec amour une Jeanne d'Arc revêtue d'une armure en plastique moulé, brandissant une épée, casquée d'un heaume de même matière, occupée à déclamer des vers dont la teneur échappa à l'intrus pour cause de stupeur.
- On répète ! Aboya Nini, furieuse de cette violation de leur intimité.
Doutant d'avoir les yeux bien en face des trous, Djé ferma les paupières et secoua la tête dans l'espoir de se remettre les idées en place. En pure perte. Une fois les yeux rouverts, la scène qui s'offrait à lui était la même.
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Les Ch'tis braqueurs
ActionQuatre amis bien installés dans la communauté voient leur vie bousculée par une accusation abusive de viol. Un crime qui leur vaut d'office un ticket gagnant pour la prison. Un séjour derrière les barreaux qui va sacrément modifier leur vision de...