Musique : Cats on Trees- Love you like a song
Il est dix-sept heures, mon avion a atterri il y a une heure et être seule dans un pays étranger comme le New-Jersey n'est définitivement pas la chose pour me mettre à l'aise. C'était l'idée de mon père à la base, que je vienne passer un an ici pour reprendre contact avec ma mère, être diplômée auprès d'elle. Il en a fait une fixette pendant plusieurs mois jusqu'à ce que j'accepte et très loin de moi l'idée de m'en réjouir. J'étais juste... Curieuse. Deux années se sont écoulées depuis ma dernière visite. Deux années sans nouvelles de ma mère, il y a de quoi devenir dingue, mais on s'y fait, on s'arme de colère, d'incompréhension, de frustration, et ça nous fait tenir le cap, ça nous fait dire des choses qu'on pourrait regretter, du type « Oui papa tu as sûrement raison, je devrais retourner là-bas, ça apaiserait mes tensions, remonterait mon moral», balivernes à présent. J'attends, j'attends et ma mère ne vient pas, le nœud qui se forme dans mon estomac se resserre. Aie. J'essaie de focaliser mes pensées sur des souvenirs apaisants, le visage de Solange par exemple, oh oui, ma sœur a toujours eu des sourires très doux à mon attention, elle a toujours été avenante, pourtant, le temps n'a pas joué en faveur de notre complicité. Je dirais même qu'avec notre passé, il est étonnant que nous soyons restées proches, soudées malgré la distance.
— Octobre ?
Je me redresse, fais volte-face et découvre ma mère, d'apparence soignée dans son tailleur mauve, quasi-impeccable.
— Salut maman.
Elle m'embrasse sur le front, je tente un misérable sourire que mes lèvres ont à peine la force d'esquisser.
— Tu n'as pas trop attendu ? j'ai eu quelques problèmes avec la voiture.
Je hausse les épaules comme si j'étais indifférente à ce retard. Finalement, je ne sais pas ce qui était le plus confortable, être seule dans l'appréhension ou en face d'elle et de son regard qui un coup me fuit un coup m'assène de froideur. Elle empoigne sèchement ma valise, fait claquer ses talons en direction de la sortie tandis que je reste bras ballants, l'esprit bloqué sur ces retrouvailles minables qui trouvent illico presto leur place dans mon top trois des pires scénarios possibles. je m'empare de mon petit sac et m'empresse de la rattraper.
Dans la voiture, l'odeur entêtante d'un parfum style Gucci emplit l'habitacle, je plisse le nez, fronce les sourcils et baisse la vitre dès qu'elle démarre.
— Ferme la fenêtre, il fait froid.
— Juste une minute, ça pue là.
Elle se tourne vers moi, je la fixe avec hésitation, sans savoir qu'elle attitude je suis en droit d'adopter ou non. Sans même détourner son regard du mien, elle enfonce son doigt sur un petit bouton à côté de la portière et ma vitre remonte. L'air frais ne balaie plus mon visage, je grimace. Cette situation a quelque chose de frustrant.
— Bon, sinon, comment tu vas... Toi ?Ces quelques mots m'arrachent la gorge. Par où commencer quand la personne censée tenir la plus grande place dans votre vie s'en est retirée, vous enlevant au passage le bonheur d'avoir une sœur ? Rien que d'y penser, j'ai des frissons qui remontent le long de mon dos, des émotions jusque-là restreintes qui cavalent comme une armée de destriers prête à mener une guerre qu'aucun État ne soupçonne encore. Elle laisse traîner un silence qui me fait serrer les poings.
— Je vais bien, merci. Solange est contente que tu viennes par ailleurs.
Je souris, ça me touche, mais ça ne suffit pas à éteindre cette déception qui grandit en moi. Est-elle contente que je sois là elle aussi ? Mon regard bifurque dans sa direction. Je voudrais qu'elle coupe le moteur, qu'elle me dise que cette situation est une blague et que ces deux dernières années ont été horribles parce que je lui ai manqué, mais qu'elle n'avait pas le choix. Elle était en mission top secrète pour le gouvernement, elle a même dû confier Solange à une voisine. Non, non elle n'a pas délaissée une de ses filles, non, non, il n'y en a pas une qu'elle préfère... Sauf que le silence nous perd et aucune de mes pensées ne suffit à me remonter le moral. Peut-être qu'il y en a bien une qu'elle préfère. Mon amour-propre en prend un coup. Céder à la tristesse ou se parer d'un bouclier de rage ? Ainsi est le dilemme en face duquel je tangue depuis quelques années. Je surprends du coin de l'œil le regard de ma mère se poser à plusieurs reprises sur moi. Elle analyse ma tenue puis mon visage en pinçant sa lèvre du bas, elle a l'air nerveuse, elle a l'air distante, finalement, c'est d'indifférence que je me drape.
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Virginity Game (Deuxieme Version)
Teen FictionOctobre ne s'est jamais entendue avec sa mère, alors qu'elle s'installe chez elle pour renouer les liens et faire sa terminale, de douloureux souvenirs refont surface et son entrée au lycée empire les choses. Elle se retrouve mêlée au Virginity Gam...