Chapitre 49

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Musique: Bilie Eilish- Bellyache


PDV Octobre : 

Quand j'ouvre les yeux, il me faut un temps d'adaptation pour me faire à l'idée qu'Owen est à côté de moi. Le voir dans mon lit me laisse pantoise, puis les événements de la veille me reviennent. Je le regarde rouler sur lui-même, entrouvrir les yeux. Il a l'air surpris, moi tout ce que je vois, c'est les bleus sur son visage, plus marqués que la veille malgré mes soins.

— Rah putain, c'est quoi ce délire ?

Il grogne, je lève les yeux au ciel, me redresse; on va en avoir des choses à se dire.

— Alors, pas trop dure la gueule de bois ?

— Mmh... Il s'est passé quoi hier ?
  
Ses yeux se baladent dans la pièce. Des souvenirs lui reviennent peut-être, mais l'expression stupéfaite qui marque ses traits me laisse deviner qu'il est surtout confus.

— Attends... Est-ce que... Est-ce qu'on a couché ensemble ?!

— Alors là, pas du tout ! Je ris, avant de me reprendre devant son incompréhension. Tu veux peut-être que je te rafraîchisse la mémoire ?

Owen hoche la tête, jette plusieurs regards circulaires autour de lui comme pour s'assurer qu'il ne rêve pas. Je suis à deux doigts de me pisser dessus tellement la situation est hilarante, mais quand on va rentrer dans le vif du sujet, mon rire va rapidement se tarir.

— Bon, par où commencer...

— Je me souviens parfaitement du début de la soirée, enfin, après qu'Aaron se soit jeté sur moi, c'est le trou noir.

— Ouais, du coup t'as aucun souvenir de quand c'est vraiment parti en couilles.

Alors que je m'installe plus confortablement, Owen m'accorde toute son attention. Même après ce qui s'est produit hier, malgré ses bleus et ses yeux légèrement gonflés, pas l'ombre d'un de mes sentiments n'a changé.

— Bon, du coup, quand Aaron est parti faire un tour avec Alaska pour se changer les idées, j'ai voulu t'aider, sauf que t'en as fait qu'à ta tête et au lieu de venir avec moi, t'as préféré te mettre une sale cuite. Heureusement, j'ai fini par te convaincre de nettoyer tes plaies, sauf que t'étais trop bourré pour t'en occuper toi-même, alors je t'ai aidé. Après ça, t'arrêtais pas de dire de la merde, je t'ai amené dehors pour qu'on marche un peu histoire que tu décuves. On est arrivé dans ma rue, je croyais que tu allais mieux, mais tu m'as à moitié gerbé dessus...

Devant sa mine déconfite, je me retiens de rigoler, pour un joueur, j'imagine que c'est pas très glorieux d'apprendre ça alors qu'il ne se souvient de rien. Néanmoins il reste concentré, alors j'envisage de poursuivre le récit de nos petites péripéties avec l'espoir qu'après, on puisse passer à un autre sujet. Un sujet qui m'intéresse infiniment plus.

— Heu du coup j'en étais où... Ah oui, du coup j'ai voulu rentrer pour me changer et toi il fallait absolument que tu te nettoies aussi, donc on est monté chez moi. Le temps que je prenne ma douche, puis que j'aille dans ma chambre pour voir si t'étais en état de marcher, tu t'étais endormi. Voilà, maintenant que tu sais, tu peux clairement imaginer que non, on n'a pas couché ensemble.

— Ah bah là, ouais c'est sûr, mais putain... Je pensais pas avoir merdé à ce point...

— Ouais, mais c'est pas tout...

Je laisse ma phrase en suspens, je ne sais pas jusqu'où je peux aller par la suite, mais après ce qui s'est passé entre nous hier soir, j'espère qu'Owen s'ouvrira à moi, suffisamment pour combler les vides que les mystères de sa vie me laissent.

— Qu'est-ce qui peut être pire que ce que tu m'as déjà dit ?

— Je sais pas si c'est pire, mais disons que tu m'as appelée Mélodie une bonne partie de la soirée, alors je voulais savoir qui c'était.

Un silence se creuse entre nous durant lequel j'ai l'impression de perdre cette mince complicité qui semblait voir le jour. Owen soupire, laisse sa tête retomber sur l'oreiller.

— J'ai beau me creuser la mémoire, j'ai pas la moindre idée de qui ça peut être, je connais pas de Mélodie, enfin, du moins, pas que je me souvienne.

Son regard s'ancre dans le mien, j'ai mal de le voir si serein alors qu'il me sort un tel mensonge. Et si ce n'était pas la première fois ? Mélodie est un souvenir douloureux pour lui et je peux le comprendre, mais soudain, c'est toute ma relation avec lui qui est remise en question. Le sentiment qui me compresse les poumons me plonge au cœur de mes doutes. À cet instant, j'espère qu'Owen est capable de cerner dans le fond de mes yeux, l'écorchure que ses mensonges créent, même s'ils ne sont là que pour le protéger.

— Je suis désolée, mais ça prend pas. Va falloir que tu trouves quelque chose de plus crédible, parce que je sais qui est Mélodie...

Sur le coup, je prends soin de bien choisir mes mots, je n'ai pas envie de le blesser davantage en voulant bien faire. Je veux seulement qu'il puisse me faire confiance, suffisamment pour m'avouer de lui-même l'existence de son ex qui le tourmente encore aujourd'hui.

— Pardon ?

Il a l'air déstabilisé et j'ai soudain peur de faire une gaffe en parlant un peu trop. J'ai peur de mentionner Estelle et qu'elle ait des problèmes par la suite, mais après réflexion, si Owen a un problème avec le fait que je sois au courant, ce n'est pas à sa sœur qu'il doit s'en prendre. Je préfère même le voir me détester plutôt qu'il lui en veuille par ma faute.

— Écoute, tu m'as déjà dit que je te rappelais quelqu'un, quand j'ai assemblé les morceaux avec Estelle, elle a parlé d'une certaine Mélodie, sans m'en dire plus. Alors disons que ça m'a intriguée que tu m'appelles par son prénom hier et à plusieurs reprises... Je minaude en prenant soin d'omettre quelques détails pour le bien de tous.

Je ne veux pas qu'il pense que je me mêle trop de tout, bien que ce soit un peu le cas, néanmoins, s'il n'avait pas semé autant de doutes en moi, je n'aurais peut-être pas cherché à voir ce qui se cachait au-delà de ses projections. En attendant, Owen se mure derrière un silence que je ne suis pas en capacité de combler, aussi grand mon désir soit-il. Je ne peux qu'attendre, le cœur rongé par l'impatience, qu'il m'accorde ne serait-ce qu'un regard. Après quelques secondes, il se redresse et me fusille du regard avec un désespoir troublant.

— Des fois, t'as son rire. T'as sa façon de s'exprimer qui me donne envie de me sortir les doigts du cul. C'est la chose qui m'a le plus frappé quand on s'est vus il y a deux ans et en même temps, ça m'a rappelé des choses qui ont ravivé des blessures trop récentes à ce moment-là. Maintenant tout ce que je peux te dire c'est que Mélodie est la seule personne que j'ai aimée dans ma vie, aimée à un point que t'imagines même pas, mais elle est morte, et il n'y a rien de plus à dire.

C'est douloureux de le voir parler si franchement de ce qu'il a ressenti pour elle, lui qui fait mine d'être incapable de donner du vrai. J'ai le tournis, le tournis nauséeux d'imaginer tout l'amour qu'il a pu lui porter. Pendant une seconde, je ferme les yeux, je me revois insister auprès de lui pour qu'il nous accompagne à la plage avec Estelle. Comment pouvais-je, à cette époque, imaginer l'infinie souffrance qui le consumait ? J'ignorais tout de lui et pourtant, j'avais la sensation que mes sentiments à son égard étaient réels, mais l'étaient-ils vraiment ? Et aujourd'hui ? Mon cœur qui s'emballe atrocement quand je vois la douleur derrière son masque, témoigne-t-il de la sincérité d'un amour que je pourrais lui porter ? Suis-je seulement capable d'aimer un être aussi amoché qu'Owen au point de pouvoir l'aider à refermer ses blessures ? Et si je le pouvais, combien de temps lui faudrait-il avant de pouvoir partager avec moi les cauchemars qui le hantent et dont je n'ai même pas connaissance ? Mes tourments prennent le dessus. 

Virginity Game (Deuxieme Version)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant