Nous avons vite pris congés de mes parents. Je ne voulais pas passer une minute de plus en leur compagnie. Je les ai embrassés, comme une fille aimante le ferait malgré mon envie de vomir. Mon père a eu un mouvement de recul et ma sœur a joué son rôle de fille adorable à la perfection. Ma mère était étrange, cependant. C'est la première fois que je l'ai vue me regarder avec tristesse et culpabilité. Est-ce qu'elle commencerait enfin à se réveiller ? Je préfère ne pas y croire. Le peu de fois où j'ai pensé que l'instinct maternel de Clara Stone se manifestait, je me suis pris une bonne dérouillée. Elle me mettait KO en une phrase ! Alors, inutile de me faire des films. Et puis, c'est trop tard maintenant. J'ai appris à vivre sans.
Je monte derrière le volant en soupirant. Ryan s'installe sur le siège passager et boucle sa ceinture. Je démarre dans un silence pesant, refusant de le briser. Je n'ai plus rien à dire à Ryan Johnson. Par contre, lui garde les yeux rivés sur moi. Et bien sûr, je suis mal à l'aise. En présence d'un autre mec, cela ne me ferait ni chaud ni froid, mais avec lui... Aucun garçon ne m'a fait autant d'effet. Il a beau me balancer des horreurs à la figure, je ne peux m'empêcher d'être attirée. Et maintenant que son parfum envahit l'habitacle et que nous sommes seuls dans un espace confiné, je meurs d'envie de me jeter sur lui. Mais je ne le ferai pas. Il ne le mérite pas.
— L'ambiance était un peu tendue, ce soir.
Sa voix grave résonne dans le petit espace et me fait frissonner.
— Tes parents ont l'air sympa, je dis d'un ton indifférent sans quitter la route des yeux.
— Ils le sont, contrairement aux tiens.
Je pince les lèvres. Le dîner a dû être une véritable catastrophe pour que d'une, Ryan me rejoigne dans la cuisine et de deux, que les Johnson s'en prennent à ma famille chérie.
— Ta mère ne te défend jamais quand ton père et ta sœur se moquent de toi ?
— Comme tu as pu le constater.
Mon ton est amer. Je lui ai répondu sans en avoir l'intention mais après tout, il n'est ni aveugle ni sourd. Il a pu observer l'amour que me porte ma famille par lui-même, comme ses parents d'ailleurs. D'où l'invitation de Madame Johnson à un dîner sans mes géniteurs.
N'empêche, je suis dégoutée que mon père et ma sœur se soient donné en spectacle devant des étrangers, enfin, surtout devant un étudiant de Stanford. Pour une fois, ils auraient pu prendre sur eux et éviter de déblatérer sur mon dos. Mais non, il a fallu qu'ils se valorisent en me dévalorisant. C'est tellement plus facile ! Et maintenant, c'est moi qui vais payer les pots cassés.
Je retiens difficilement mes larmes. Malgré tous mes efforts pendant de nombreuses années, avant que je ne comprenne que cela ne servait à rien, mon père n'a jamais pu me blairer. Je sais que ma mère ne me hait pas, mais elle a toujours suivi son mari infidèle, quitte à renier sa propre fille. J'essaye de faire avec mais en des moments comme celui-ci, j'ai du mal. Et forcément, il faut que j'aie un spectateur.
— Qui a commencé ?
La voix de mon passager non désiré me tire de mon auto-apitoiement pathétique.
— Quoi ?
— Les hostilités.
Un sourire ironique se forme sur mes lèvres. Je lâche même un petit rire sardonique.
— Ça ne pouvait pas être moi, ça c'est certain.
— Ah ? Et pourquoi ? Tu as peut-être fait quelque chose sans le savoir ?
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Ne me résiste pas
Storie d'amoreEt si pour une fois, le beau garçon finissait avec la peste de service? Cette peste, c'est moi, Jenna Stone, 21 ans. J'étudie à l'université de Stanford à San Francisco et d'ailleurs, je suis cette année, la Présidente de la sororité Kappa Alpha Th...