Munis de nos sacs de provision, nous suivons tous notre tuteur dans les montagnes pour notre épreuve en groupe, la dernière épreuve de l'école. Adam rentre les données dans notre smartwatch nous expliquant l'endroit où nous sommes censés le retrouver avant 18h00 ce soir. Les trois autres groupes ont également été lâchés à d'autres endroits stratégiques. Notre mission consiste à arriver les premiers. Rien de bien difficile jusque là.Lorsqu'Adam s'en va, nous avançons le plus rapidement possible, presqu'en courant vers le but ultime. Romain ferme la marche, tandis que Michelle se tient devant en sifflotant. Des branches nous fouettent le visage. Je lève les yeux pour sentir qu'une pluie fine commence à tomber et au bout de longues minutes de la boue se forme sur le sol. Nos baskets sont recouvertes de crasse et Michelle se plaint d'être sale, elle râle sans arrêt, ce qui n'a pas l'air d'agacer Romain, mais plutôt de l'amuser.
Je repense à Adam et à notre baiser et je suis enveloppée de doute. Mon amie Capucine me manque, j'avais l'habitude de tout lui confier, ici, je n'ai personne.
Michelle se met à hurler tout à coup en glissant le long du sentier, Romain me pousse hors de son chemin, pour aller à sa rescousse. Malheureusement, elle s'est blessée et a mal à la cheville.
— Madelyne, tu dois finir la course, seule. On a encore une chance de gagner, tu en es capable, me dit Romain.
— Mais... on est une équipe, et je m'en fiche de remporter ce prix, je ne vous abandonnerai pas, dis-je déterminée.
— Il a raison, vas-y, j'ai trop mal et je vais nous ralentir. Fonce et explique au tuteur que j'ai eu un accident. Tu emmèneras du renfort après pour nous récupérer.
— Bien.
Laissant derrière moi mes amis, je suis le chemin indiqué par la smarwatch, avec une boule nichée au creux de mon ventre. Je suis pétrifiée. Un tunnel sombre se dresse devant moi et je n'ai aucun autre choix que de le traverser. J'inspire profondément et m'engouffre à l'intérieur en tâtonnant les murs froids et mouillés, j'ai de l'eau jusqu'aux genoux et plus j'avance, plus l'eau semble augmenter. J'allume la lampe sur ma montre, l'issue est encore loin, je dois nager car je n'ai pas pieds.
Quelques arrêts par-ci et par-là pour reprendre mon souffle, j'ai les bras en feu, les doigts crispés par le froid maintenant. Je reprends la nage rageusement cette fois pour en finir avec ce pénible moment. La sortie se montre enfin se débouchant sur un lac gigantesque entouré d'une falaise. Avec peine, je grimpe sur un des rochers pour voir ce qui m'attend par la suite. Si les indications sont bonnes, il me faut grimper. La seule pensée qui me vient à l'esprit est que cette école est une mission suicide.
Quand je lève la tête pour commencer mon ascension, des visages me scrutent de part et d'autres de la falaise. Est-ce le fruit de mon imagination ou je perçois des rires ? À ma gauche, un garçon grimpe aussi prudemment qu'il le peut ; il est de l'équipe adversaire. Je sais pertinemment que la victoire se trouve en haut, mais je ne peux me résoudre à monter sous le regard aguerri de toutes ces personnes. Ça me stresse. Et si j'échoue ? Si je me ridiculise ?
Tout à coup, mon smartwacht sonne, c'est Adam.
— Maddy que se passe-t-il ? Tu ne montes pas ?
— C'est une de mes peurs : faire des choses sous le regard des autres et me ridiculiser.
— Je sais et je suis là, ne t'inquiète pas.
— Père me répétait toujours de ne pas me ridicule.
— Tu n'as pas besoin de réussir pour être aimée. Pourquoi tu te mets constamment cette pression? Tu n'es plus à la Nouvelle France. Tu te sens encore obligée de performer, de tout réussir. Maddy, tu as le droit d'échouer, de rater et de recommencer. C'est la vie tout simplement !
Et c'est le silence. Il raccroche. Monter dans le vide me fait peur, mais pas autant que l'échec. C'est idiot ! Je me rends compte à quel point j'ai été formatée par mon passé et ma culture à penser de cette façon. Mes jambes regagnent de la vigueur et plus je grimpe, plus je laisse derrière moi une partie de mon passé et de mes peurs. Je ne cesse de me répéter :
Je suis FRAGILE mais
Je suis...
CAPABLE.
LIBRE.
BRAVE.
AIMÉE.
La victoire a été plus facile que je ne l'aurais cru. Je suis acclamée par une ovation, des élèves m'aident à me mettre debout, une autre me tend une bouteille d'eau. D'un hochement de tête, je les remercie et je vais m'écrouler sous un arbre à l'abri de tous et du soleil. Petit à petit, je sens mes muscles se relâcher et sens les douleurs après l'effort, gagner tout mon corps. Malgré moi, je m'écrie intérieurement « j'y suis arrivée ». La satisfaction est de courte durée. Mon tuteur, suivi de madame Goeffrey, me sermonnent :
— Madelyne, j'ai le regret de vous informer, me dit-elle avec douceur, que ton équipe et toi avez échoué à cette épreuve.
— Ah, mais nous sommes arrivés avant 18h ! me défends-je.
— Oui, TU es arrivée, mais où est le reste de ton équipe ? me demande Adam.
— Michelle s'est blessée, Romain m'a demandé de partir et de continuer sans eux pour gagner et...
— Vous formez une équipe, malheureusement, on n'abandonne pas ses coéquipiers. C'est une règle fondamentale. Vous auriez dû les aider, conclut madame Goeffrey avant de s'en aller.
— Si on était en mission pour sauver quelqu'un, tu ne pourrais pas agir de la sorte ! Désolé mais toi et ton équipe avez raté cette épreuve.
Encore sous le choc, je demeure par terre sans la moindre énergie pour bouger. Des larmes de colère se déversent sur mon visage, mes yeux sont rivés sur le sol.
— Une équipe de secours est allée chercher tes amis.
Dégoutée.
Énervée.
En colère.
Incomprise.
Ce sont les sentiments que j'éprouve à cet instant. Le cauchemar s'achève par une phrase d'Adam, juste avant de quitter les lieux :
— Eh Maddy, n'oublie jamais que l'échec fait partie de ton apprentissage, il faut savoir perdre pour savoir gagner.
La suite dès demain mes loulous!!! N'oubliez pas, laissez-moi vos impressions et le vote avec l'étoile magique !!! AH ah. Mille merci. Marie
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FRAGILE, (série Brèches) Tome 1 (terminée) #wattys2017
Ficção CientíficaParmi les décombres de la Nouvelle France, une petite fleur fragile se dessine pourtant, un pissenlit. Parmi les jeunes filles du pays à marier, Madelyne, « trop fragile et pas intelligente » selon son père, fera une rencontre inoubliable qui bouscu...