Five / Chapitre 2

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Une blessure me suffit.

Je plonge mon nez dans son cou et respire fort son odeur. Elle est sucrée avec une pointe de Vanille. Elle me surprend en ne sursautant pas, elle a juste un mouvement pour dégager le passage.

-C'est bon ? Tu as senti ? Je peux continuer ? Me dit-elle sarcastique.

-Tu fais quoi ici et pourquoi tu l'as buté ? Tu n'as pas l'air d'avoir du remords. En fait, tu as l'air indifférente, comme si tu venais juste de commander un café.

Elle jette un regard sur le corps derrière moi. Ses pupilles se dilatent un bref instant, quelque chose passe. Un trouble, un frémissement et puis plus rien.

Rideau.

-Je ressens bien certaines choses mais ça ne te regarde pas. Le fait d'abattre ce... mec n'est pas horrible pour moi. Une vermine de moins. Dans ce quartier, qui me le reprochera ? Personne.

Elle hausse les épaules et se détourne. Je la chope par le poignet et la retiens.

-Tu ne m'as pas répondu. Pourquoi tu m'as aidé ?

-Je passais par là pour rentrer chez moi. J'habite depuis trois semaines là-bas.

Elle désigne du menton les appartements qui font face au mien.

-J'ai bien vu que tous les soirs, tu sors fumer et que tu traînes dans cette ruelle, reprend-elle. Tu vas réfléchir ou glander, je ne sais pas et je m'en fous. Ce soir en rentrant, j'ai surpris ce camé à te suivre. Je me suis dit que je pouvais t'aider. Maintenant lâche-moi, je suis crevée, sans mauvais jeux de mots. J'ai travaillé tard et j'ai envie de dormir.

Elle secoue son bras et je la laisse partir. Je la suis des yeux, la regardant traverser et entrer dans l'immeuble. Au bout d'une minute, j'aperçois une lumière éclairer une pièce au troisième étage.

Voilà, je sais où crèche ma sauveuse.

Par contre, j'ignore son nom.

*****  

Après avoir envoyé un message à un de mes hommes, je remonte chez moi. Je vis dans un quartier populaire. Je pourrais aller où je veux. Mais ici, c'est chez moi. Je m'y sens bien. Tout le monde me connaît.

J'ai la paix la plupart du temps. Et si pour mon plus grand déplaisir, j'ai à régler certains problèmes, je n'ai pas à me préoccuper de quoi que ce soit. Rien à cacher, ni à nettoyer. Les hommes de mon père vont venir chercher ce qui reste de Kenny.

Pas de flics, pas de questions. Et le message passera que si on me cherche, on se retrouve six pieds sous terre. Dans le cas présent, ce n'est pas moi qui ai fini le travail mais ma petite sauveuse n'ira pas se vanter. Le téléphone sonne au moment où j'entre.

Je calme mon souffle et décroche. Pas besoin d'être doué en devinette pour savoir qui appelle.

-Oui ?

-Que s'est-il passé, Nom de Dieu !

-Aucune idée. J'étais tranquille et Kenny a décidé de me flinguer. Il n'a pas donné de raison.

-Fallait-il que tu le tues ?

-Non, mais ça m'a fait plaisir. Jamais pu l'encadrer.

Je souris. Je sais qu'il ne peut pas me voir mais il me connaît, il sait que je prends mon pied à le foutre en colère.

-Toujours à me mettre des bâtons dans les roues, rage-t-il.

-Si tu es plus ennuyé de la mort de ce cafard qu'inquiet pour ma santé, je ne vois pas pourquoi je devrais me refuser le plaisir de t'enfoncer.

-Attention à ce que tu dis. Tu me dois le respect, Noah.

Sa voix se refroidit à vue dil.

-Non, le respect, ça se gagne et tu n'es rien pour moi. Juste mon géniteur, rien d'autre.

Je raccroche avant qu'il ne puisse répondre.

Mon père ne se préoccupe que de lui et de ses affaires. Rien n'a d'importance à part ça. Je suis un mec basique, je n'ai pas besoin de lui. Depuis longtemps.

Il a une information vitale pour moi. Tant qu'il ne me la fournit pas, je suis obligé d'obéir. Et encore, je trouve toujours le moyen de contourner ses ordres. De le contrarier et de repousser les limites de sa patience.

Après.

Je le tuerai.

Je me déshabille, je prends une douche et soigne ma blessure. Pas besoin de point, j'y mets des strips pour refermer la plaie et un pansement collant par- dessus.

Quand je sors de la salle de bains, j'aperçois la lumière dans l'appartement d'en face. Elle est toujours réveillée. J'ai une vue imprenable sur son salon. Comment je ne me suis pas rendu compte plus tôt que cette fille vivait-là ? Il faudra que je trouve des informations sur elle.

Son nom, son job, d'où elle vient. Elle n'a pas sourcillé en tuant le cafard de service. Je dois faire attention. Peut-être qu'elle a fait ça pour avoir un retour. Je lui dois la vie.

Selon elle.

Je pouvais me débrouiller tout seul. Je verrais bien si elle réclame un service. On ne tue pas sans raison. Il y en a toujours une.

Une ombre se déplace et je l'observe. Elle semble tourner en rond. Les bras autour d'elle comme pour se protéger, se rassurer. Puis elle se fige et je croise son regard.

Une rue nous sépare, pourtant je me noie en elle. Elle est bien plus vivante que tout à l'heure. Il y a des sentiments qui se bousculent dans ses yeux et sur son visage. Elle coupe notre échange en se détournant et je la vois sursauter.

Elle me reluque de haut en bas. Sa main frotte sa bouche de façon inconsciente, trop absorbée par ce qu'elle voit. Je suis nu et elle apprécie ce qu'elle découvre. Je me souviens de son odeur et de sa voix. Je sens le poids de son regard glisser sur moi.

L'excitation me prend et mon sexe se dresse, fier. Je souris de sa stupéfaction. Et commence à me caresser.

De loin, je la vois rougir. Ça me plaît de la déstabiliser. Voir ses expressions changer, son corps se tendre. Ses yeux qui brillent et parcourent mon anatomie. J'aime surtout observer le dégel de son petit minois et l'échauffement de ses pommettes. Elle se rapproche de la fenêtre, semblant hypnotisée.

Je l'imite et pose mon avant-bras libre sur la vitre. Nos yeux sont rivés sur l'autre. Sa poitrine se soulève de plus en plus vite. Elle n'est plus si indifférente maintenant. Mon ego s'en réjouit.

Soudain, elle ferme le rideau et éteint la lampe.

Je ne peux pas m'empêcher de rire. Elle n'a pas tenu le duel et j'ai gagné.

Je retourne sous la douche finir ce que j'ai commencé. En pensant tout du long à ma jolie tueuse de voisine.

Five [Sous Contrat d'édition Hugo Poche. Sortie le 13 Juin 2019]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant