Tome 2, III.
La mer avait emporté son manteau, l'une de ses chaussures sûrement en train de flotter loin derrière lui. La joue écrasée contre le sable, le corps trempé, le froid mordait un peu plus chaque seconde ses muscles. Il toussa, encore et encore, recrachant brusquement l'eau qui s'était accumulée dans ses poumons.
Sur le dos, les paupières lourdes, Alec finit par ouvrir les yeux. Flou, mouvementé, le paysage se dessina progressivement, les vagues et le vent animant cette glaçante réalité.Reprenant doucement ses esprits, il se mit à faiblement gratter le sable, lorsqu'il le vit enfin ; ce soleil noir, ce sombre astre dominant la plage, face à lui, plus réel que jamais, aussi impressionnant que dans ses souvenirs.
Il avait réussi. Son projet, sa traversée, il avait réalisé l'impossible.
Alec se redressa alors, le regard toujours rivé sur le ciel, un sourire euphorique marquant petit à petit son visage. Ne comptait désormais plus que la vue de ce soleil, ce symbole de renouveau, de liberté. Mais le froid le ramena rapidement à la réalité, celui-ci bien plus agressif que dans ses visions. Ce ne fut cependant qu'à ce moment qu'il nota l'étrangeté de ce silence, de cette absence, cette brusque solitude. Et lorsqu'il voulut se relever, Alec buta brutalement sur quelque chose et manqua de peu de tomber.
— Qu'est-ce que...
Le Dirigeant venait littéralement de trébucher sur un pied, une jambe dont le corps inanimé demeurait à côté de lui. Un peu perturbé, il ne bougea pas et analysa un instant celui-ci. Sur le ventre, la figure enfouie dans le sable, il avait lui aussi perdu la plupart de ses habits dans l'océan.
Lentement alors, Alec s'approcha de l'homme, prêt à le réveiller à son tour.
— Nous y sommes, mon ami, lança-t-il en le retournant. Nous...
Le regard pétrifié de celui-ci le foudroya d'un trait. Les yeux grands ouverts, l'expression totalement figée, il était comme paralysé... Ses membres aussi lourd que du plomb, il était comme mort.
— Comment... Non... Non, non... !
Le Dirigeant se rua sur lui et se mit à le secouer dans tous les sens, le corps visiblement sans vie du naufragé ne répondant à aucun moment aux vives secousses.
— Combattant... ! Réveille-toi ! s'écria-t-il, la panique s'emparant instantanément de lui.
Mais l'homme ne réagit pas, Alec ne tenait désormais plus qu'un cadavre entre ses mains.
— Ce n'est pas possible ! Tu ne peux pas mourir ! Tu ne peux pas ! Debout !
Tandis que ses hurlements firent longuement échos sur la plage, il resta immobile, les yeux rivés sur le défunt au regard vide. Cette fois, ce n'était plus de froid qu'il tremblait, mais de peur, d'angoisse. Ce même élan de panique se transformant alors en une gigantesque tornade à l'intérieur de lui, il lâcha le cadavre et se releva, la réalité le frappant une seconde fois.
— Veky !
Le Dirigeant fit brutalement volte-face mais ne vit derrière lui qu'une infinie étendue de sable sans l'ombre quelconque de qui que ce soit. Affolé, complètement désorienté, l'espace d'un instant Alec n'était plus sûr ; l'avait-il vraiment prise avec lui ? Pourquoi cet homme était-il là et pas Veky ? Se pourrait-il qu'elle...
Chassant immédiatement cette pensée de son esprit, il s'élança droit devant lui et scruta attentivement les horizons, le vent emportant jusqu'au loin les appels qu'il ne cessait de lancer.
— Veky !
Il ne savait plus où donner de la tête. Où était-elle ? Et les autres ? Pourquoi n'y avait-il personne ?
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L'Héritier (en réécriture)
Vampiros*Présélection Wattys 2018.* La méchanceté, cette vilaine chose qui empoisonne le cœur des gens et les pousse à commettre des actes insensés. Heureusement pour Veky, un incident de taille lui permet d'affronter le harcèlement dont elle commence à êtr...