4. Mortel

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Tome 2, IV.


— La noire est parfaite.

— Faites-en bon usage, me fit Démis en souriant.

Mais je ne prêtais presque pas attention à ma nouvelle tenue, totalement absorbée par ce nouveau reflet de moi que je discernais à travers le grand miroir qu'avait sorti Shar. J'avais encore du mal à me reconnaître, cette fille aux longs cheveux blancs, bien plus clairs et brillants que les autres — à croire que, peu importe le degré de ce ravage capillaire, mes gènes de vampire parvenaient à tout sublimer.

— Puis-je ?

J'acquiesçai doucement et aussitôt Démis se plaça derrière moi, dégageant mes cheveux de ma nuque pour attacher le vêtement. Mais elle se stoppa brusquement, un petit « oh » d'étonnement s'échappant soudain de sa bouche.

— Quoi ? m'exclamais-je immédiatement.

Elle ne répondit pas et se contenta simplement de ramener la totalité de ma chevelure sur mon épaule. C'est alors que je la vis, cette petite mèche sombre oubliée au milieu de toute cette blancheur. La faisant doucement glisser entre mes doigts, je l'observai un moment, me disant que son oubli n'était peut-être pas un simple hasard

— Nous devons remédier à cela avant de partir, on ne sait jam...

— Non, coupais-je Shar. Je la garde. Je ferais attention, personne ne la verra.

— Mais s'ils la trouvent...

— Ça n'arrivera pas. Et qu'ils essaient de me toucher ; là, ils en verront du noir.

La bonne femme me scruta un court instant sans un mot et finit par hocher la tête.

— Bien..., fit-elle de nouveau. Allons-y maintenant, les filles doivent aider Quirin. Et vous, contentez-vous simplement de regarder, de découvrir... Mais je vous en prie ne vous éloignez à aucun moment de nous, ou plutôt de moi. Ne parlez qu'à moi et uniquement moi. C'est important, nous ne sommes vraiment à l'abri de rien.

— Entendu.

— Ne commettez pas d'imprudence, ajouta-t-elle.

Avec toute la pression que l'on venait de me mettre, je pouvais déjà dire que cette première sortie n'allait pas être une partie de plaisir.



Nous nous frayâmes un chemin parmi les gens et leurs épaisses fourrures, la mienne doté d'une large capuche que je m'empressai de mettre une fois dehors —le souvenir de ces regards étranges sur moi ne cessant de parasiter mon esprit.

Marchant derrière aux côtés d'Abaya, je ne savais littéralement plus où donner de la tête. J'étais tout aussi intriguée par les visages des passants et leurs identiques chevelures que par les innombrables objets sur ces étalages et les couleurs saisissantes des tissus exposés par les marchands. Tout me paraissait être d'une beauté incroyable, j'en oubliai presque l'immensité de ces bâtiments qui nous entouraient, les quelques rayons du Setran frappant contre l'acier brillant des buildings.

— Shar !

Complètement distraite par les nombreuses activités autour de moi, j'en oubliai de m'arrêter lorsque Démis et les autres se stoppèrent et heurtai le dos de Shar, celui-ci soudain dur comme de la pierre.

— Enso, bonjour, fit celle-ci. Je suis désolée, mais nous sommes pressées, discutons une autre fois...

— Qui est-ce ? la coupa l'homme.

Pas très grand, les cheveux d'un blond cendré plutôt terne, je le vis légèrement se pencher vers moi, tentant visiblement de mieux apercevoir mon visage. Je baissai alors la tête et immédiatement, je sentis Abaya m'attraper la main avant de fortement me la serrer, sa soudaine anxiété traversant instantanément mon corps. Tout le monde était particulièrement tendu, je le sentais plus que jamais.

L'Héritier (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant