10. Dirigeante

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Tome 2, X.

À genoux dans cette petite salle, je ne réalisais toujours pas qu'Alec était là, enfin. Je n'avais tout à coup plus aucune envie de me retenir, de me voiler la face. Il quitta alors quelques instants ma bouche et s'empara de mes mains.

— Il va exploser, dit-il tout bas en portant l'une d'elles contre sa poitrine.

Lui-même ne semblait pas comprendre l'acharnement effréné de son cœur. Je me contentai de fixer son torse, l'esprit soudain submergé par la réalité. Je ne voulais pas y penser, mais c'était carrément plus fort que moi.

— Qu'est-ce que tu fais ici ? Avec ces gens ? fit-je subitement, l'air inquiet. C-Ce sont eux, ces monstres qui terrorisent les gens ! C-C'est elle qui s'occupe de tout, j'en suis certaine, je...

— Non, pas ici, la coupa-t-il rapidement. C'est trop risqué, cette femme est partout.

J'étais complètement affolée, je ne savais plus quoi penser, non pas de lui, mais d'eux. D'elle. Alec avait-il connaissance des activités d'Elensia ? En connaissait-il les raisons ? Des dizaines de questions émergèrent dans ma tête, j'étais perdue. Impossible pour moi sur le moment de cacher mon inquiétude. Alec embrassa alors doucement mes mains et parvint, malgré ma peur et mon incertitude, à immédiatement me calmer. Je l'observai, une énième fois. Je m'imprégnai encore et encore de sa figure, de son long et fin nez, de ses cils sombres abritant cette paire d'émeraudes, de ses tendres et délicieuses lèvres.

— Je pensais l'avoir, dis-je tout bas. J'ai fait tout ça pour l'instrument, pour le récupérer, pour partir d'ici... Mais je ne l'ai pas. Sans lui, c'est fini.

Il me fixa attentivement, en silence, ses sourcils se fronçant légèrement.

— Et malgré tout tu es ici, répondit-il après un moment.

Je baissai alors les yeux et hochai la tête. Oui, malgré les mensonges et la trahison, j'étais ici. Et ce n'était plus pour moi.

— Je t'ai un instant cru mort, parti avec les autres..., lançais-je tout à coup. Et pendant longtemps, je n'ai rien ressenti. Parce-que je t'en voulais tellement, je te maudissais de toutes mes forces, et ça m'épuisait. Je... Je ne savais plus où j'étais, qui j'étais, qui j'aimais... Je ne comprenais plus rien. J'étais seule avec ma colère, je n'avais plus qu'elle sur qui me reposer.

Son regard profondément ancré dans le mien, il m'écoutait avec attention, mes mots semblant l'impacter un peu plus chaque instant. Mais il ne répondit pas. L'air triste, désolée, presque coupable, je soupirai doucement.

— Si tu savais tout ce que j'ai dû m'infliger pour enfin arriver à ce moment, dit-il enfin après un long moment d'observation. Je te voyais tous les jours. Tu venais la nuit me toucher, m'enlacer, tu serpentais autour de moi avec ces yeux et cette chaleur qui me rendent fou. C'est grâce à toi, à nos souvenirs, que j'ai vraiment eu envie de retrouver qui j'étais.

Ses paroles me procurèrent à la fois frissons et inquiétude.

— Que t'est-il arrivé ? demandais-je peu rassurée, ma main venant tendrement caresser sa joue.

— Et toi, jolie blonde ?

Sa tentative d'humour réussit malgré la situation à me décrocher un faible sourire. Nous avions tellement de choses à nous dire, à rattraper. Alec se pencha alors aussitôt et m'offrit un énième baiser, cette fois sur la petite risette qu'il était parvenu à m'arracher.

— Reste avec moi, murmura Alec.

Son souffle chaud, attirant, incroyablement prenant, me fit dangereusement frémir. Soudain prise par cette sauvage montée d'adrénaline, je restai silencieuse et laissai la fouge brusque de mes lèvres parler à ma place. Avide de ses mots, de son toucher, du feu de son corps, j'en demandais plus.

L'Héritier (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant