Chapitre 10: "Il faut qu'on parle"

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Samedi 2 septembre.
15h30.
Maison du quartier Périer, Marseille.

Assise sur une chaise de la salle à manger, je réfléchis à ce que je vais dire à David. Il n'a pas répondu à mon sms, cela fait pourtant plus de quatre heures que je lui ai envoyé. Sa banque fermant à midi, il a dû le voir. Enfin bref, quoiqu'il en soit, il finira bien par rentrer, autant m'y préparer. Perdue dans mes pensées, mon téléphone émet le son d'un sms.

— Je suis en route, désolée ma puce je n'avais pas vu ton sms, qu'est ce qui se passe ?

Bien, David ne va plus tarder, et je dois avouer que mon anxiété ne cesse de croitre. Lorsqu'il passe la porte, il est tout sourire, égal à lui-même. Comme s'il ne semblait pas se douter que je sois au courant de sa petite infidélité ! Et ça, ça me met en rogne ! Son comportement confirme son message, putain il se doute de rien. Quand il s'approche pour m'embrasser, je ne peux que le repousser. Je ne sais pas si je dois lui balancer de but en blanc que je suis au courant, ou si je dois amener la chose en douceur.

— Qu'est ce qui se passe ma puce ça va pas ? Qu'est ce qui s'est passé chez ta copine ? Elle t'a monté contre moi c'est ça ??? plus il parle et plus il s'énerve.

— Ah non, ne mêle pas Emy à ça ! C'est entre toi et moi ! je m'insurge.

Il se dirige vers la cuisine, prend une dosette de café qu'il met dans la machine.

— Café ? Me demande-t-il.

Je me lève pour m'assoir au comptoir de cuisine, avant de me raviser dans une grimace. Non je n'ai pas oublié sa baise torride sur celui-ci. Je m'assois alors à notre superbe table de salle à manger en châtaignier, qui ne nous sert que très rarement.

— Je veux bien oui.

Nos deux cafés brulants dans les mains, il vient de rejoindre à table. En silence, nos yeux perdus dans nos tasses respectives, chacun attend que l'autre prenne la parole. Franchement, je ne sais pas comment amener la chose. Je veux dire, c'était l'homme de ma vie, celui dans lequel j'avais une confiance absolue, je me sens vraiment démunie. Jamais je n'aurais imaginé vivre cette situation un jour. Heureusement pour moi, c'est lui qui brise la glace.

— Chérie, qu'est-ce qui a ?

Il est tout mielleux et c'est malheureux mais ça m'énerve à un point !

— A toi de me le dire, David...
Je choisis la provocation, appuyée par l'appellation par son prénom, chose que nous ne faisions plus depuis des années.

— Je ne comprends pas où tu veux en venir....

Le pire je crois c'est qu'il a l'air sincère ! Je souffle bruyamment, me lève et me dirige vers la console de l'entrée où j'ai déposé mon sac à main. Mon téléphone en main, je me rassois en face de David. Après avoir recherché les photos que m'avait envoyé Clara, je lui fais glisser le mobile sur la table en lui crachant :

— Et ça, chéri (en appuyant fortement sur le « chéri ») ça ne te dit rien ?

Mon ton est amer et cassant. Sa réaction ne se fait pas attendre, plus il fait défiler les photos, plus il blêmit.

— Mon cœur, ce n'est pas ce que tu crois... me marmonne-t-il.

Je ne peux m'empêcher d'éclater de rire !

— C'est dingue, c'est toujours ce que vous dites, vous, les hommes infidèles ! Alors dis-moi, David, qu'est-ce que je dois croire ? Que tu as malencontreusement trébuché bouche ouverte et langue dehors dans la bouche de cette nana ? Et qu'en te relevant, ta queue au garde-à-vous hors de ton jean a fini accidentellement dans sa chatte ? Eclaire moi !

— Je....pffffff....
Il cherche ses mots, il patauge et je me délecte de sa difficulté.

Pour enfoncer le clou, je lui balance :

— Dis le David, putain, dis-le que tu m'as trompé ! Dis que ce n'était pas un accident ! Dis-le !

— Oui, t'es contente ? Oui je t'ai trompé !

Alors que je croyais me réjouir de lui mettre le nez dans son caca, l'entendre de sa bouche me blesse énormément. Les larmes me montent et je lui murmure :

— Mais pourquoi ? Je...enfin, je pensais qu'on s'aimait, que.... Moi je t'aimais David, plus que tout.

Il s'est levé et arpente désormais le salon, salle à manger de long en large.

— Je ne sais pas quoi te dire Maïa.

— Tu ne sais pas quoi me dire ? Commence par le début ! Pourquoi ? Quand ?

Je m'énerve, je pleure de tristesse et de colère.

— Je... C'est arrivé comme ça ! Tu passes ton temps au boulot, et même à la maison tu ne peux t'empêcher d'y penser ou de travailler encore ! Je me sentais seul Maïa ! Tu peux le comprendre ça ? Et puis, cette routine, métro / boulot / dodo ne me dit pas que tu l'as pas ressenti toi aussi ? Ça s'est fait comme ça, ce n'était pas prémédité !

— Ah ben super, ça va être ma faute maintenant ! T'es chié quand même ! Oui, notre vie était routinière c'est pas pour autant que je suis allée voir ailleurs bordel ! Tu ne t'aies pas dit deux minutes, tiens je faisais quelque chose pour casser la routine ? Un petit week-end en amoureux ou je ne sais quoi ? Ben non, tiens c'est le train-train à la maison, je vais aller fourrer une vieille blonde décolorée !

— Ne parle pas d'elle comme ça, tu la connais pas !

— A parce que toi oui ? Ca y es, tu as couché avec elle quelques fois et tu la connais bien? Ah mais attends ! Votre petit manège ça dure depuis combien de temps ?

Je me suis également levée, et lui fait face, l'index pointé vers lui.

— Elle s'appelle....
Je le coupe sur le champ.

— Je n'en ai rien à foutre de comment elle s'appelle, je veux savoir depuis combien de temps tu la baises ?

— Presque deux mois je dirais. Me dit-il en baissant la tête.

C'est le choc, la douche froide... Deux mois...putain j'ai été trompée pendant deux mois...Je n'en reviens pas.

— T'es vraiment qu'un connard David....lui lançais-je en pleurant.

— Ah ben oui tu es une sainte toi, hein, sainte Maïa ! Madame je ne vis que pour mon boulot ! Pour les remerciements que tu en as en plus ! Et tu ne t'aies pas dit que si tu étais peut-être un peu moins introvertie ça aurait été mieux entre nous ? Merde ! Toujours à faire la gueule quand on est avec nos amis ! Aucun imprévu dans la vie de Maia, tu règles tout à la minute, tu es une vraie maniaque du contrôle !

Il me jette ses reproches à la figure et je me décompose.

— Quoi ? Je suis comme ça parce que tu m'as façonné ainsi ! Monsieur vient de la haute, il faut toujours être tiré à quatre épingles, toujours surveiller son langage, sa ligne, ses sorties. Je n'ai fait que me calquer à toi ! Alors ne viens pas me reprocher maintenant ta vie trop tranquille de banquier fils à papa coincé ! Son regard s'assombrit, c'est la première fois que je le vois ainsi et il commence à me faire peur.

— Désolé d'avoir une famille moi ! Tu ne cesses de rejeter la faute sur les autres, mais tu as fait quoi pour retrouver ton passé puisque tu sembles si attachée à cela ? C'est une excuse ça Maïa ! Tout comme ta pote Emy, derrière qui tu te caches ! Tu te caches parce que tu es une fille paumée, et ton caractère je peux plus le supporter ! Des années que je subis tout ça, la coupe est pleine. C'est de ta faute tout ça Maïa ! Au moins, dans les bras de Béa je me sens vivant !

Il vient de me porter le coup fatal. Le coup de poignard qui déchire mon cœur. Je n'ai plus rien à dire, et quand bien même je suis incapable de formuler la moindre phrase. Les larmes dévalent mes joues, je n'arrive même pas à le regarder en face. Alors je fais ce qui me semble le plus opportun, je fuis. Sans jeter un dernier regard à David et à cette maison qui a été mon cocon depuis de nombreuses années, je claque la porte au nez de dix années de vie commune.

LA DANSE DE L'AMOUR Où les histoires vivent. Découvrez maintenant