On entendait les pas pressés des passants qui marchaient sur les trottoirs. Les talons claquaient, les voix s'envolaient entre les bâtiments des rues, tel un brouhaha incessant qui grondait. En ce matin frais de décembre, l'odeur de pain qui émanait des boulangeries ouvertes nous assaillit les narines. Lola et moi, assises à la terrasse d'un café ouvert, attendions le début des cours. Elle avait entre ses mains un expresso, j'avais commandé un simple thé. Sous ce ciel noir matinal, le froid tenaillait notre peau.
J'avais rapidement fait part à Lola de mon souci pendant la nuit -en évitant les détails émotionnels et personnels-. Elle avait haussé les épaules, tandis que la fumée légère de son café venait embuer ses lunettes.
« Ce n'est rien. Ça arrive à tout le monde. C'est sûrement une simple crise d'angoisse.
-Vraiment ?
-Oui, il suffit juste de se relaxer, et de respirer. -Elle remit en place son bonnet sur ses cheveux auburn qui commençaient à friser sous l'humidité ambiante-. Tu inspires, tu expires. Inspires, expires...J'en ai fais souvent, et j'ai toujours réussi à m'en sortir. »
J'hésitai quelques secondes, mais ma voix faible sortit d'entre mes lèvres en un moment d'aveux :
« Mais...T'as déjà cassé un miroir, toi ? »
Elle avait faillit s'étouffer avec son café.
« Pardon ?
-Oui, j'ai...J'ai cassé mon miroir ».
Je lui ai montré ma main. Une entaille rougeâtre traversait ma paume. Elle plissa les yeux.
« Wow, Hélène ! Comment t'as fais ça ? Je veux dire...T'as cassé ton miroir avec ton poing ?
-Oui.
-Pourquoi ? »
J'aurais aimé lui dire ce qui me tracassait. A quel point j'étais troublée, et tout ce que j'avais aperçu dans le reflet de ce miroir à cet instant. Mais j'ai simplement serré la gorge, et j'ai fait part de ma fausse incertitude à Lola :
« Je ne sais pas ».
Mon amie a secoué la tête :
« La prochaine fois que ça t'arrive, je t'oblige à m'appeler, d'accord ? »
J'ai hoché la tête. Le silence s'est installé à table par la suite. J'ai soudainement senti ma poche vibrer. En agrippant mon portable, j'ai lu à l'écran que j'avais reçu un message d'un inconnu. Étonnée, je l'ouvris.
« Salut Helly, comment ça va depuis ton premier rencard avec l'alcool ? »
J'ai soupiré. Déjà, jamais on ne m'avait surnommé Helly. Et puis la blague de l'alcool ne me faisait pas forcément rire.
J'ai répondu en humectant mes lèvres :
« Très bien, même si je ne crois pas qu'on se reverra, l'alcool et moi. J'ai arrêté de répondre à ses messages. C'était pas un bon coup ».
J'ai ri à ma propre blague. De toutes façons, celui ou celle qui me contactait n'était pas complètement un inconnu ; il ou elle était à cette fameuse soirée et m'avait aperçue. Je restais perplexe quant à son identité. Mais j'avais, pour une drôle de raison, envie de continuer à jouer avec cette personne de l'autre côté du combiné, qui semblait à son tour s'amuser.
L'anonyme me répondit vite. Je vis simplement un numéro s'afficher à l'écran avec quelques mots :
« Bon choix. Mais tu sais, parfois le premier soir c'est le pire. On peut avoir une très mauvaise première impression. Il en faut plusieurs pour apprendre à connaître l'autre ».
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Oedipe reine
RomanceHélène a toujours rêvé d'être quelqu'un d'autre, s'imaginant dans un corps étranger. Elle voudrait être cette silhouette qu'elle voit et observe autour d'elle, celle qu'elle aperçoit parfois dans ses rêves les plus profonds. Oui, Hélène voudrait êt...